Quel est le vrai lien entre monopoles et concurrence ?

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Par Stéphane Geyres Publié le 21 janvier 2013 à 12h15

On a souvent tendance à poser le monopole comme le contraire de la concurrence, et vice-versa. La Poste aurait ainsi une position de monopole dans la mesure où elle seule peut distribuer le courrier ordinaire sur le territoire. A l’inverse, la concurrence entre les différents opérateurs de téléphonie serait l’indice d’un marché dépourvu de monopole. Pourtant, ce dernier exemple montre que ces deux concepts sont souvent mal cernés et leur impact sur l’économie mal appréhendé. En effet, revenons un an en arrière avant l’arrivée de Free sur le marché de la téléphonie mobile. Trois opérateurs se partageaient le marché. Et cela suffisait pour qu’on nous affirme qu’il y avait concurrence et donc pas de monopole.

Pourtant, ce que l’arrivée de Free nous a révélé, c’est que les conditions étaient remplies pour qu’il y ait ce que Ludwig von Mises appelait un « prix de monopole » (voir L’Action Humaine, chapitre 15). Même si les opérateurs subissaient en effet une « certaine concurrence », in fine les prix étaient bien plus haut que lorsque Free a pu venir troubler la tranquillité d’une situation de cartel de fait. Et depuis, même si la concurrence s’est renforcée, elle reste néanmoins limitée puisque seuls les titulaires d’une licence accordée par l’état donne accès au marché de la téléphonie en France. Même avec ses tarifs agressifs, il est logique que Free ait cherché a entrer sur ce marché peu concurrentiel car du fait de la licence, vraisemblablement personne ne viendra tirer ses prix vers encore plus bas.

On voit donc que concurrence et monopole sont souvent relatifs dans les faits. Il y a d’ailleurs monopole dans de bien plus nombreux cas qu’on y pense en général. Chaque hôtel au monde a ainsi le monopole de son emplacement. Chaque restaurant celui de son chef. Chaque constructeur automobile celui de ses modèles. Et pourtant, dans ces trois cas, il y a bien concurrence. Alors ? C’est que la concurrence elle aussi n’est pas en réalité ce qu’on pense généralement. Murray Rothbard dans Homme, Economie et Etat nous explique que sur un marché libre, les produits et services sont tous en concurrence les uns contre les autres. On dit que la SNCF n’a pas de concurrence, mais c’est une erreur. Les compagnies aériennes, les autocars et la voiture lui font concurrence. Ainsi, le voyage est en concurrence avec les cadeaux, la nourriture, les spectacles, etc.

La France est d’ailleurs un pays où il y a, hélas, une longue tradition monopolistique. Sous différents prétextes, depuis les Mercantilistes (dont Colbert est l’icône), les gouvernants favorisent souvent les monopoles sous diverses formes et sur divers marchés. Une des motivations modernes au monopole tient à la supposée garantie de service. Ainsi pour justifier le monopole de La Poste, il est avancé que le marché libre ne pourrait pas garantir que tout français, où que soit son domicile, pourrait recevoir ou envoyer du courrier – ou du moins, pas selon des conditions identiques ni même raisonnables. Bien sûr, ce type de raisonnement est biaisé et ne peut moralement justifier le monopole. Prenons l’essence par exemple. Il est évident que son prix sera moindre aux alentours d’une raffinerie et que par contre elle sera plus chère en plein Massif Central, du fait du coût du transport. Or cela ne semble poser de problème à personne. Pourquoi dans ce cas ne pas imaginer des tarifs postaux variant avec la géographie française, plutôt que de forcer un monopole sans concurrence ?

Avec sa célèbre « Pétition des fabricants de chandelles », parue en 1845, Frédéric Bastiat, Député des Landes, se moque d’ailleurs du ridicule de ce type de mesures et de celui des revendications des multiples professions demandant ou profitant d’un monopole. Il rappelle que la concurrence est un mécanisme social naturel et que sans concurrence, il n’y aurait ni innovation, ni progrès. Et c’est là l’aspect le plus important de cette question. Finalement, monopole ou pas, ce qui compte, c’est que le marché soit toujours dynamisé par une saine et rude concurrence. Certes, c’est dur pour les offreurs de services et les producteurs. Mais c’est ce qui enrichit la masse des consommateurs.

On trouve ainsi aujourd’hui des exemples célèbres d’entreprises privées qui sont en situation de « monopole de fait ». On pense bien sûr à Google, qui draine probablement plus de 95 % des recherches sur le Net. Monopole ? Mais surtout : problème ? La bonne réponse est « non ». Non, car il est toujours possible à quelque courageux innovant de tenter de leur prendre la place. D’ailleurs, Google a pris la place de Yahoo! qui était le leader incontesté il y a une dizaine d’années. Alors demain, qui sait qui prendra la place ? Voire, le concept de moteur de recherche sera-t-il dépassé ?

Et finalement, on comprend que monopole ou pas, cela importe peu, s’il y a toujours possibilité de libre concurrence. Et nos différents auteurs se retrouvent ainsi pour caractériser ce qui fait en réalité un monopole et sa fonction réductrice de concurrence : l’état. Tout monopole réducteur de concurrence ne peut pas résulter du marché libre et doit découler de quelque réglementation. Et il suffit en effet de regarder autour de nous : La Poste, la SNCF, les taxis, les coiffeurs, les notaires, et même les avocats et les boulangers, toutes ces professions sont réglementées et protégées artificiellement de toute concurrence directe. Sur un marché libre et dans une société libre, il n’y a pas de profession protégée, toutes seraient soumises à une concurrence qui profiterait au peuple, les consommateurs. De là à conclure que tous ces statuts existent au détriment de l’économie…

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Simple citoyen viscéralement optimiste, consultant informatique, 25 ans d'expérience, bilingue, ayant vécu dans 5 pays sur 3 continents et connu l'aventure de la création d'entreprise - dans un pays ou c'est mal vu et très aléatoire. Libéral convaincu et même libertarien, venu au libéralisme après des années d'errance politique et une grande déception de la droite traditionnelle, de ses présidents de la 5eme république et de la "rupture" de 2007. Autodidacte et curieux, découvre l'école autrichienne d'économie et engloutit les opus magni de Mises, Rothbard et Hoppe en quelques mois, puis découvre le libéralisme en tant que doctrine et modèle social. La lecture de Salin, Ron Paul, Hazlitt, Ayn Rand et même Mandelbrot finit de me convaincre du bien fondé de l'analyse libérale. Commence alors le projet de contribuer à mieux faire connaître et comprendre le libéralisme, pour que nos enfants vivent dans un monde digne d'eux...

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