Argent : combien faut-il gagner pour être heureux ?

L'étude menée par Jean-Marc Germain, intitulée "Bien-être ressenti et revenu : l’argent fait-il le bonheur ?", examine une question complexe et toujours débattue : existe-t-il un niveau de revenu au-delà duquel l'argent n'améliore plus le bien-être ressenti ?

Un seuil au-delà duquel l’argent ne fait plus le bonheur ?

L'économie du bien-être, une branche en développement depuis les années 1970, s'intéresse à ce qui rend les gens heureux. Elle a été particulièrement influencée par le paradoxe d'Easterlin, qui stipule que la croissance économique n'entraîne pas nécessairement une augmentation de la satisfaction de vie. Les chercheurs utilisent des enquêtes sur la satisfaction de la vie et le bien-être émotionnel pour identifier des seuils au-delà desquels l'augmentation des revenus n'améliore plus significativement le bien-être ressenti. L’étude de l’Insee publiée le 10 juin 2024 met en évidence des seuils de satiété financière pour différents pays.

En France, ce seuil est estimé à environ 30 000 euros annuels par unité de consommation (UC), tandis qu'il est de 40 000 euros en Allemagne, 45 000 euros au Royaume-Uni, 60 000 euros en Australie et 80 000 euros aux États-Unis. Ces seuils indiquent le niveau de revenu au-delà duquel une augmentation supplémentaire du revenu n'améliore plus significativement la satisfaction de vie.

En France il faut gagner 30.000 euros par an pour être heureux

France

En France, le seuil de satiété financière est situé à 30 000 euros par an. En dessous de ce seuil, les augmentations de revenu ont un impact positif notable sur la satisfaction de vie. Cependant, au-delà de ce seuil, l'impact devient marginal. Il est intéressant de noter que les baisses de revenus affectent plus négativement la satisfaction que les hausses ne l'améliorent. Le chômage, l'insécurité et le stress au travail sont des facteurs particulièrement pénalisants en dessous de ce seuil de satiété​​.

Allemagne

En Allemagne, la situation est similaire à celle de la France avec un seuil de satiété légèrement plus élevé, à 40 000 euros par an. Les courbes de satisfaction par centile de revenu montrent une stabilité remarquable sur une longue période, malgré une augmentation des niveaux de vie. Les relations avec la famille, les relations sociales et la santé sont des domaines où la satiété est observée de manière prononcée​​.

Royaume-Uni

Pour le Royaume-Uni, le seuil de satiété est fixé à 45 000 euros. Comme en France et en Allemagne, les augmentations de revenu au-delà de ce seuil n'entraînent pas de gains en termes de satisfaction de vie. Les données montrent également que les Britanniques maintiennent des niveaux de satisfaction stables malgré des fluctuations économiques et politiques​​.

Australie

L'Australie présente un profil légèrement différent avec un seuil de satiété à 60 000 euros. La satisfaction de vie y est globalement plus élevée que dans les autres pays étudiés, en particulier dans les domaines du logement et de la sécurité. Cependant, un compromis semble exister entre le revenu et le temps libre, où une augmentation du revenu est souvent associée à une réduction du temps consacré aux loisirs.

États-Unis

Aux États-Unis, le seuil de satiété financière est beaucoup plus élevé, à 80 000 euros. Néanmoins, au-delà de ce seuil, l'amélioration de la satisfaction de vie se fait à un rythme ralenti mais significatif. Les recherches montrent que les Américains ont tendance à évaluer leur bien-être de manière plus positive à des niveaux de revenus élevés, comparativement aux autres pays.

Bien-être émotionnel contre satisfaction de vie

Les études montrent que la satiété se manifeste plus clairement dans le bien-être émotionnel que dans la satisfaction de vie. En général, les seuils de satiété pour le bien-être émotionnel sont situés entre 25 000 et 30 000 euros. Par exemple, les sentiments de solitude, de pessimisme et de nervosité diminuent avec le revenu jusqu'à ce seuil, mais au-delà, ces améliorations s'atténuent.

Alors, combien faut-il gagner pour être heureux ?

Les résultats de ces études suggèrent que l'argent contribue au bonheur jusqu'à un certain point, au-delà duquel son impact marginal décroît. En termes simples, une fois que les besoins essentiels sont satisfaits et que la sécurité financière est assurée, des gains supplémentaires en revenu n'apportent que peu de bénéfices additionnels en termes de satisfaction de vie. Les seuils varient d'un pays à l'autre, reflétant des contextes socio-économiques différents, mais l'idée centrale reste la même : l'argent fait le bonheur, mais jusqu'à un certain point.

Cette compréhension nuancée du lien entre revenu et bonheur peut informer les politiques publiques : elle souligne l'importance de réduire les inégalités et d'assurer un niveau de vie décent pour tous, au-delà duquel d'autres facteurs, comme les relations sociales et la santé, deviennent prédominants pour le bien-être.