Le 7 novembre 2024, l’Assemblée nationale a voté l’adoption d’une taxe sur les super-dividendes, une mesure portée par les députés de gauche et soutenue, dans un contexte inattendu, par des voix du Rassemblement national. Ce vote marque une étape clé dans le remodelage du budget de l’État, suscitant des débats intenses et des critiques, notamment sur la légalité et l’efficacité de la mesure.
Super-dividendes : la taxe de la gauche sur les entreprises adoptée
Taxe sur les super-dividendes : une réforme ciblée sur les grandes entreprises
Cette nouvelle taxe vise les grandes entreprises dont le chiffre d'affaires atteint ou dépasse un milliard d’euros. Plus spécifiquement, elle concerne la part des dividendes distribués excédant de 20 % la moyenne des cinq dernières années. Cette portion sera taxée à hauteur de 5 %. Selon les initiateurs de la mesure, le but est de réguler les bénéfices des sociétés qui ont profité de périodes de crises successives pour verser des dividendes records.
Les groupes visés incluent des géants tels que BNP Paribas, Sanofi, Axa, LVMH et TotalEnergies, identifiés par le député Aurélien Le Coq (LFI) comme des exemples d'entreprises accumulant d'importants excédents financiers. « Les super-dividendes ne servent qu'à gonfler des bulles financières et à enrichir quelques-uns », a déclaré M. Le Coq lors des débats.
Le RN vote avec la gauche pour taxer les entreprises
La proposition a été adoptée à une large majorité de 145 voix pour et 37 contre, une victoire nette pour les députés socialistes, communistes, écologistes et insoumis. Le soutien du Rassemblement national (RN) a été déterminant dans ce vote, dans un hémicycle où les élus de la majorité présidentielle étaient moins présents.
Tableau récapitulatif : Résultats du vote à l’Assemblée nationale
Camp | Votes pour | Votes contre |
---|---|---|
Gauche (PS, LFI, PCF, EELV) + RN | 145 | 0 |
Gouvernement et autres | 0 | 37 |
Le gouvernement ne veut pas taxer les entreprises
Le député Pierre Cazeneuve (membre de la majorité présidentielle) a averti que cette mesure pourrait avoir des conséquences néfastes sur l’économie française, en réduisant l'investissement des entreprises. « Les entreprises vont verser plus de dividendes pour assurer le même rendement à leurs actionnaires et du coup moins investir, produisant l’exact inverse de l’effet recherché », a-t-il affirmé.
D’autre part, le rapporteur général du budget, Charles de Courson, a mis en garde sur la compatibilité européenne de cette réforme. Il a rappelé que, dans un cas similaire en 2017, une mesure avait été annulée après un recours devant la Cour européenne de justice. « Ces amendements sont euro-incompatibles, on peut le regretter, mais si vous le votez, il se repassera la même chose », a-t-il précisé.
Une taxe qui assume la confrontation avec l’Europe
Malgré ces avertissements, les défenseurs de la taxe ont affiché leur détermination. Eric Coquerel, président LFI de la commission des Finances, a déclaré lors d’une conférence de presse : « On assume la désobéissance » vis-à-vis de l’Union européenne. Avec le risque, toutefois, d’un conflit qui s’enlise avec les instances européennes.
En parallèle, d’autres mesures ont été adoptées. Un amendement lié au crédit impôt recherche (CIR) prévoit de conditionner l’octroi de cet avantage fiscal à l’absence de délocalisation des activités pendant dix ans. Les députés ont aussi validé des incitations fiscales destinées à encourager les pratiques agricoles durables.
Liste des mesures associées à la réforme fiscale :
- Taxe sur les super-dividendes (5 % sur la portion excédant 20 % de la moyenne des cinq dernières années).
- Conditionnalité du CIR à la non-délocalisation pendant dix ans.
- Mesures incitatives pour l’agriculture durable.
La mise en œuvre de cette taxe pourrait potentiellement redéfinir le rapport entre l'État et les grandes entreprises, tout en testant la cohésion du cadre réglementaire européen et la capacité de la France à adopter des mesures fiscales de justice sociale.