Le déficit de la Sécurité sociale continue d’inquiéter. Alors qu’en 2023 il avait été réduit à 10,8 milliards d’euros, les prévisions pour 2024 sont alarmantes, avec une hausse prévue à 18,5 milliards d’euros.
Sécurité Sociale : près de 30 milliards de déficit dès 2025 ?
Toutefois, la situation risque de s’aggraver encore plus en 2025, où le déficit de la Sécurité sociale, selon un rapport de la Commission des Comptes de la Sécurité sociale (CCSS) pourrait atteindre 28,4 milliards d’euros si aucune mesure corrective n'est adoptée par le gouvernement… soit le montant record de 0,9% du PIB
Le déficit de la Sécurité sociale : une spirale inquiétante
Le déficit de la Sécurité sociale n’est pas un phénomène nouveau, mais il s’est considérablement accéléré ces dernières années, notamment en raison de la pandémie de Covid-19. En 2020, le déficit avait atteint un niveau sans précédent de 39,7 milliards d’euros, reflétant l'impact de la crise sanitaire. Depuis, la situation s'est partiellement redressée avec un retour à 10,8 milliards d'euros de déficit en 2023. Cependant, cette embellie n’aura été que de courte durée, les projections pour 2024 et 2025 étant nettement plus sombres.
Le rapport de la Commission des comptes de la Sécurité sociale, publié le 14 octobre 2024, souligne que le déficit pourrait atteindre 18,5 milliards d’euros en 2024, un chiffre bien supérieur aux 16 milliards estimés en juin 2024. Ce gouffre budgétaire s’expliquerait par une augmentation continue des charges de la Sécurité sociale, principalement dans les branches vieillesse et maladie du régime général, et par la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL).
En 2025, la situation devrait empirer, avec un déficit potentiel de 28,4 milliards d’euros, soit près de 10 milliards de plus qu’en 2024. Cette détérioration massive résulterait d'une hausse continue des dépenses, estimées à +3,8 %, alors que les recettes ne progresseraient que de 2,3%.
Quelles sont les causes du déficit ?
Le déficit de la Sécurité sociale en France est principalement lié à deux facteurs majeurs : la branche maladie et la branche vieillesse. Ces deux piliers du système de protection sociale concentrent l’essentiel des charges et peinent à trouver un équilibre durable.
1. La branche maladie : En 2024, les dépenses liées à la branche maladie devraient croître de 4,1%, avant de ralentir légèrement à 3,8% en 2025. Cela reste néanmoins bien au-dessus de la capacité de financement du système. L’Objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM), qui encadre l’évolution des dépenses de santé, atteindra 256,1 milliards d’euros en 2024, selon la Loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS). En raison des hausses de tarifs dans les établissements de santé, des revalorisations salariales et des indemnités journalières en augmentation, les dépenses de santé continuent de croître plus rapidement que les recettes.
2. La branche vieillesse : Le vieillissement de la population française exerce une pression croissante sur la branche vieillesse. En 2025, le déficit des régimes de retraite de base et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) pourrait atteindre 10,3 milliards d’euros. La Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), qui gère les pensions des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers, affiche un déficit structurel croissant qui pourrait atteindre 4,8 milliards d'euros en 2025. Cette branche souffre d’un déséquilibre entre les départs en retraite, qui augmentent, et les cotisants, dont le nombre stagne voire diminue. Le rapport estime que sans mesures correctrices, ce déficit pourrait dépasser les 11 milliards d’euros d’ici 2030.
Pourquoi le déficit de la Sécu est-il si inquiétant ?
La détérioration rapide du déficit de la Sécurité sociale est d'autant plus préoccupante qu'elle s'inscrit dans un contexte économique déjà tendu. En effet, la croissance économique française devrait ralentir, avec une prévision de 1,1 % pour 2025, contre 2,5 % en 2022. Dans le même temps, les dépenses de santé et les prestations vieillesse continuent d’augmenter à un rythme plus rapide que celui de la croissance économique.
De plus, les recettes de la Sécurité sociale, en grande partie dépendantes de la Contribution sociale généralisée (CSG) et des cotisations sociales, ne suivent pas la même cadence que les dépenses. En 2025, les recettes des régimes de base et du FSV devraient progresser de seulement 2,3 %, contre 4,2 % en 2024. La cause ? une stagnation des cotisations sociales et une faible progression des revenus du capital, ce qui alimente la pression sur le budget de la Sécurité sociale.
Un autre élément inquiétant réside dans l’indexation des prestations sur l’inflation. Alors que l'inflation avait atteint des niveaux élevés en 2023 (+5,3 %), elle devrait se normaliser en 2024 et 2025 à des niveaux plus modestes (2% en 2024, 1,8% en 2025).
Les mesures envisagées pour 2025 : un budget sous contrainte
Face à cette situation, le gouvernement a élaboré un Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale (PLFSS) pour 2025 avec des objectifs clairs de réduction du déficit. Parmi les mesures envisagées, on note :
• Une limitation de l’augmentation des dépenses de santé à 2,8% en 2025, contre 3,3% en 2024.
• Une réforme des retraites pour allonger la durée de cotisation nécessaire et freiner les départs anticipés à la retraite.
• La hausse des cotisations employeurs dans certains secteurs pour accroître les recettes.
• Des efforts pour contrôler les dépenses liées aux indemnités journalières et aux soins de ville, où les dépassements sont fréquents .
Cependant, ces mesures pourraient s’avérer insuffisantes pour contenir la ha usse du déficit à un niveau soutenable. Le Haut Conseil des finances publiques, dans son avis relatif au PLFSS 2025, estime que la prévision de croissance de 1,1% pour 2025 est optimiste. Il met en garde contre un risque de surestimation des recettes fiscales, en particulier celles issues de la TVA, qui sont très dépendantes de la consommation des ménages.
Sécurité sociale : quels risques pour l'avenir ?
Sans une action rapide et déterminée, le déficit de la Sécurité sociale pourrait atteindre des niveaux difficilement soutenables pour l’économie française. Un creusement du déficit au-delà des 28,4 milliards d’euros pourrait forcer l'État à adopter des mesures drastiques, comme des réductions plus sévères des prestations ou des hausses significatives des prélèvements sociaux.
Le déficit de la Sécurité sociale constitue l’un des défis économiques majeurs pour la France dans les années à venir. Avec des prévisions de déficit atteignant 28,4 milliards d’euros en 2025, le gouvernement est confronté à l’urgence de réformer le système afin de garantir sa pérennité. Sans mesures correctives significatives, la Sécurité sociale risque de s’enliser dans une spirale déficitaire, avec des conséquences potentiellement graves pour les finances publiques et pour les citoyens.
Pour l’instant, le gouvernement table sur une gestion plus rigoureuse des dépenses de santé, une réforme des retraites et une augmentation des cotisations employeurs pour contenir ce déficit. Toutefois, ces mesures, si elles sont adoptées, devront être suffisantes pour inverser la tendance. Dans le cas contraire, la France pourrait se retrouver face à un problème budgétaire d’une ampleur encore jamais vue.