Depuis que la retraite par répartition existe et la difficulté de plus en plus évidente de boucler les fins d’année, l’idée de la retraite par capitalisation refait surface. Même François Bayrou a annoncé que tout pouvait être envisagé sans aucun tabou, pas même l’âge de la retraite.
Un vent souffle pour modifier le régime des retraites vers celle de la capitalisation. Bonne, mauvaise idée ?
Malgré l’augmentation de tous les prélèvements sur salaires, (Avec création de la CSG-RDS) qui sont passés de moins 7% à plus de 23%, il devient très difficile de trouver l’équilibre des retraites et de la Sécurité Sociale. (Sans oublier la cotisation retraite employeur de 8.55% + 1.90% déplafonnée)
Il existe trois causes de ces déficits :
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L’augmentation constante de la durée de vie : 60 ans en 1945, 84 ans aujourd’hui, soit 7h de +/jour
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La durée de travail et d’activité qui a sans cesse régressé pour devenir l’une des plus faibles du monde
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Une natalité qui a longtemps résisté, mais « flanchée fortement » depuis le Covid.
En France en 2024, c’est 663.000 enfants qui sont nés, soit 2,2% de moins que l’année dernière. Celle-ci avait déjà fortement baissé de 6,6% par rapport à 2022. Cette baisse semble inéluctable compte tenu du contexte tant international incertain que celui d’une France appauvrie, ingouvernable.
Ces trois très mauvais critères remettent en cause durablement les perspectives des retraites par répartition, dans lesquelles les pensions distribuées aux retraités proviennent chaque année des cotisations des actifs et employeurs.
En 1945, il y avait 6 cotisants pour 1 retraité, alors qu’en 2024, il n’en reste plus que 1,5 pour 1, soit moins 400% !
Actuellement les cotisations des actifs ne couvrent qu’à peine les deux tiers des pensions. Le solde est pris en charge par les contribuables, à raison d’une contribution légitime de l’état de 20Md€ au Fond de solidarité vieillesse (FSV), en faveur des personnes ayant une faible pension de retraite. Mais surtout 110 Mds€ provenant d’exonération des retraités du service public et divers services spéciaux parapublics. Le total se monte donc à 130 Mds€, soit presque l’équivalent du déficit public annuel.
Ce déficit ne peut que s’aggraver compte tenu d’un manque de rentrées et des 3 causes évoquées ci-dessus. Même la retraite en passe d’aller à 64 ans, ne modifiera que peu le déficit. Il est même appelé à croître jusqu’à 0,8% du PIB, soit 25Mds d’euros au-delà de 2030.
Les cotisations représentent en France un taux de remplacement de 77,3%, contre 93,20% aux Pays-Bas. En France les dépenses publiques et privées des systèmes de retraite représentent près de 14% du PIB soit 3,5% de plus qu’aux Pays-Bas ou Danemark, qui de plus offrent des pensions 30% supérieures.
Retraite par répartition. Que faudrait-il pour qu’elle soit pérenne ?
Pour continuer avec le même système et ne pas mettre les comptes en danger, il serait nécessaire d’augmenter très rapidement le PIB de 25%, c’est-à-dire passer le temps de travail à 40 heures/semaine (hors fonction publique) au départ, pour ne pas aggraver le déficit national et une base de 65 ans de départ en retraite révisable en fonction de la durée de vie des retraités.
Il sera aussi nécessaire de soutenir la natalité pour revenir rapidement à 2,2 enfants par femme. La première condition : Revenir à une situation financière, économique favorable, non déficitaire. Une France ayant retrouvée un environnement propice pour les entreprises, pour les investissements étrangers, mais aussi au ressenti des français, un pays où ils se sentent bien pour leur famille, dans leur emploi, avec un lustre national et international attirant. Puis mettre des incitations en place plus ciblées, pour obtenir au minimum 2 enfants par famille. A définir.
Retraite par répartition, point de l’existant avant un éventuel changement
Premier point à tenir compte avant de se lancer dans ce changement de régime, la période de transition qui devra être très longue. Alors qu’il y a urgence.
Actuellement pour le régime général :
La cotisation retraite de base salariée est de 6,90% sous plafond de 3.666€ brut.
La retraite complémentaire avec un taux de 3,15% dans la même limite de salaire et 8,64% au-delà, jusqu’à 29.328€. A cela s’ajoute la CEG de 0,86% jusqu’au plafond de 3.666€/mois, puis 1,08% même tranche que ci-dessus, auquel vient se greffer la CET de 0,14% jusqu’à 29.328€/mois.
Soit pour un salarié du régime général ayant un salaire de moins de 3.666€ brut, une cotisation retraite de 11,05% sur son salaire brut.
A cela s’ajoute les cotisations des retraités et même des chômeurs. (Avec des variations en fonction du montant perçu)
Retraite par capitalisation : avantages, inconvénients
Actuellement la question du financement de notre système des retraites est au cœur des débats qui s’engagent pour les mois à venir dans le cadre de la négociation entre partenaires sociaux, pour faire évoluer la réforme des retraites de 2023.
Le Medef, par la voix de son président, Patrick Martin, tente d’avancer la piste de la retraite par capitalisation comme réponse aux problèmes de financement de nos régimes de retraite.
D’après les experts, le passage d’un système par répartition est pour ainsi dire impossible à mettre en place à court terme ou même à moyen terme.
Ce serait aussi le fait qu’il battrait en brèche la logique de solidarité de protection sociale française issue du programme du Conseil de la résistance. Et même en passant outre, ce serait rompre également avec le principe constitutionnel de République sociale.
Ce système peut s’avérer rapidement générateur d’inégalités, les plus modestes épargnant peu ou pas, les plus favorisés épargnant beaucoup. Ce sont les plus riches ou ceux qui travaillent dans les "grandes et bonnes" entreprises, qui peuvent mettre de l’argent de côté. La solidarité entre petits et gros salaires est en partie rompue, car les plus hauts salaires disposant d’une capacité d’épargne seraient favorisés par rapport aux salariés « de base » peu capables de fournir des cotisations supplémentaires.
C’est ce qu’avait choisi l’Allemagne entre 1990 et 2000, conséquence : Le taux de pauvreté des plus de 65 ans est passé à 16% contre 10% en France.
Si l’on passait vers ce régime de capitalisation, il faudrait, soit que les actifs cotisent à la fois pour payer les pensions des actuels retraités, et également payer en parallèle pour provisionner les sommes servant à financer leurs futures rentes de retraite par capitalisation. Ce serait un surcoût de retenues sur salaire important tant pour les salariés que pour les employeurs.
Autre piste possible : Supprimer brutalement le versement des pensions financées par le régime par répartition. Il faudrait donc dans ce cas, trouver d’autres ressources pour financer les pensions des personnes déjà retraitées.
Certains pays l’on mis en place tel la Pologne à la fin du XXème siècle en vendant les biens publics.
Le Chili aussi en émettant de grosses quantités d’obligations d’état.
Si la France s’engage dans cette voie, il serait nécessaire que l’Etat vende ses biens où s’endette pour payer les retraites, qui ne seraient plus financées par les salariés et le patronat (pour le privé). Pour les fonctionnaires, ce serait le même principe.
Les deux hypothèses apparaissent peu réalistes au regard de nos contraintes budgétaires. Elles entraineraient une forte diminution des pensions.
Autre possibilité envisagée :
La création d’une retraite supplémentaire par capitalisation en complément des deux existantes.
Conséquences ; Des cotisations en plus pour les salariés et entreprises. Cette solution semble morte née par un refus total du Medef de toute augmentation des cotisations.
C’est pourtant ce qu’a mis en place la Suède, ce qui n’a pas chez eux évité la paupérisation du système des retraites.
Même s’il était engagé partiellement, il s’avèrerait générateur de fortes inégalités, avec une baisse des pensions et porteur de menaces pour nos entreprises.
Ce système peut s’avérer rapidement générateur d’inégalités, les plus modestes épargnant peu ou pas, les plus favorisés épargnant beaucoup. Ce sont les plus riches ou ceux qui travaillent dans les "grandes et bonnes" entreprises, qui peuvent mettre de l’argent de côté. La solidarité entre petits et gros salaires est en partie rompue, car les plus hauts salaires disposant d’une capacité d’épargne seraient favorisés par rapport aux salariés « de base » peu capables de fournir des cotisations supplémentaires.
C’est ce qu’avait choisi l’Allemagne entre 1990 et 2000, conséquence : Le taux de pauvreté des plus de 65 ans est passé à 16% contre 10% en France.
Dès l’idée lancée, les reproches pour l’un ou l’autre régimes de retraites ont sitôt émergés :
Retraite par répartition : Les économistes libéraux accusent ce système de trop peser sur les actifs et de menacer la productivité.
Retraite par capitalisation : Elle ouvrira la route aux fonds de pensions, ce qui entraînera des conséquences beaucoup plus néfastes pour les emplois et la pérennité des entreprises.
L’expérience des pays ayant choisi cette option le prouve. Ce système provoque des inégalités accrues entre retraités. C’est aussi une absence de sécurité à moyen ou long terme pour les salariés. Ce sont en général, des pensions plus faibles. Ce peut-être également une menace d’une main mise sur les entreprises par les fonds de pension pour dégager toujours plus de profits.
L’autre système préconisé par Emmanuel Macron et pris en main par Jean Paul Delevoye en 2019, c’est le système par point. Il prévoyait à partir de 2025, le remplacement des 42 régimes de retraite existants par un régime unique qui s’appliquerait aussi bien aux fonctionnaires qu’aux salariés du privé.
Chaque actif, qu’il travaille dans le secteur privé ou public, se verrait attribuer un nombre de points correspondant au montant de ses cotisations retraites. Dix euros cotisés donneraient droit à 1 point. La valeur du point serait fixée à 0,55€ brut de retraite par an à taux plein.
Un taux unique de cotisation retraite de 28,12% serait partagé entre l’employeur (60%) et le salarié (40%). La valeur du point serait garantie et invariable dans le temps.
Ce système par point bouleverserait beaucoup moins le fonctionnement actuel. Son défaut principal serait son coût de cotisation qui se monte aux environs de 14% dans les pays l’ayant adopté, soit bien au-dessus des cotisations de la retraite par répartition actuelle en France.
Il est nécessaire toutefois de rappeler que le taux actuel de 11,05% n’arrive pas à rémunérer les pensions sans dette.
Dans la situation d’endettement que le pays connaît, aucun des systèmes envisagés ne semblent pouvoir sortir le système des retraites de son enlisement sans de très importants efforts financiers apportant de fortes inégalités sociales.
Alors chercher l’erreur ! Le travailler plus pour gagner plus de Nicolas Sarkozy, rejeté, nous aurait certainement, enlevé une forte épine du pied.