Le moteur économique de l’Europe connaît des ratés : pour la deuxième année consécutive, l’Allemagne enregistre une récession. Derrière cette contraction économique se cache une crise industrielle et politique d’une ampleur inédite.
Récession en Allemagne : pourquoi le moteur européen s’arrête
Le 15 janvier 2025, l'Allemagne a confirmé une contraction de 0,2 % de son produit intérieur brut (PIB) en 2024, selon les données de l'institut Destatis. Cette récession, la deuxième consécutive après une baisse de 0,3 % en 2023, met en lumière les faiblesses structurelles de la première économie européenne.
Les causes de la récession allemande
L'économie allemande repose historiquement sur son industrie exportatrice. Cependant, plusieurs facteurs expliquent sa contraction. La crise industrielle joue un rôle majeur, avec une baisse des exportations malgré une augmentation globale du commerce mondial en 2024. Les industries phares, comme l'automobile, subissent la concurrence croissante des fabricants chinois, tandis que le coût de l'énergie, particulièrement élevé depuis 2022 en raison de la guerre en Ukraine, aggrave la situation.
Parallèlement, la consommation intérieure est affectée par la méfiance des ménages, qui hésitent à dépenser malgré une augmentation de leurs revenus. Enfin, l'Allemagne lutte pour maintenir sa compétitivité internationale dans un contexte économique de plus en plus difficile.
Les impacts économiques et sociaux pour les consommateurs
En Allemagne, la consommation domestique est fortement ralentie par l'incertitude économique, freinant les achats et limitant la demande intérieure. Les coûts élevés de l'énergie continuent de peser sur le pouvoir d'achat des ménages, alors que la multiplication des faillites contribue à une hausse notable du chômage.
En France, les conséquences de cette crise allemande se font ressentir à travers la baisse des exportations françaises vers leur principal partenaire commercial. Les entreprises françaises opérant dans des secteurs similaires à ceux touchés en Allemagne, comme l'automobile, risquent de subir des répercussions indirectes, en particulier sur leur compétitivité et leur croissance.
Une troisième année de récession en vue
Les perspectives pour 2025 sont préoccupantes. Plusieurs économistes, comme Jens-Oliver Niklasch de la banque LBBW, estiment qu’une troisième année consécutive de récession est probable. Les tensions politiques en Allemagne n’arrangent rien. Avec la dissolution du Parlement et des élections législatives prévues en février 2025, l’incertitude demeure forte.
Olaf Scholz, actuel chancelier, plaide pour un assouplissement des règles budgétaires afin de relancer les investissements, tandis que l’opposition conservatrice s’accroche au respect du frein à la dette inscrit dans la Constitution allemande. La récession allemande met en lumière les fragilités économiques et politiques du pays, tout en jetant une ombre sur l’économie européenne dans son ensemble. Bien que la France semble moins touchée pour le moment, les liens étroits entre les deux économies pourraient ralentir son redressement.
France-Allemagne : une comparaison subtile
En 2024, le PIB allemand a reculé de 0,2 %, après une contraction de 0,3 % en 2023. À l'inverse, la France a enregistré une progression de 0,5 % sur la même période. Cette différence s'explique en partie par la structure économique des deux pays. L'Allemagne dépend fortement de ses exportations industrielles, notamment dans l'automobile et la mécanique de précision, des secteurs particulièrement touchés par la concurrence chinoise et les coûts énergétiques élevés.
La France, quant à elle, bénéficie d'une économie plus diversifiée, avec un secteur des services plus développé et moins vulnérable aux chocs industriels. Mais surtout, la France est dans une situation bien moins florissante que l'Allemagne. Il lui est donc plus facile d'afficher une croissance, même infime.
En Allemagne, une succession d'indicateurs inquiétants
Le marché de l'emploi illustre également les écarts entre les deux pays. En Allemagne, le taux de chômage est passé de 5,4 % en 2023 à 6,1 % en 2024, en raison de l'augmentation des faillites d'entreprises et de la baisse de l'activité industrielle. En France, bien que le chômage reste plus élevé, à 7,8 %, il a connu une légère stabilisation grâce à des secteurs tels que le tourisme et l'agroalimentaire, qui ont mieux résisté à la conjoncture internationale.
Enfin, les finances publiques montrent une gestion contrastée des déficits. En 2024, le déficit public allemand représentait 2,6 % du PIB, un chiffre inférieur à la moyenne européenne de 3,1 %. À titre de comparaison, la France a enregistré un déficit de 6,1 % du PIB, témoignant de sa dépendance accrue aux dépenses publiques pour soutenir l'économie. Si l'Allemagne privilégie une stricte discipline budgétaire, la France adopte une approche plus interventionniste, favorisant les investissements pour stimuler la demande intérieure.
Cette opposition dans les choix politiques et économiques reflète des modèles de développement différents. L'Allemagne doit repenser son modèle industriel pour s'adapter aux nouveaux enjeux de compétitivité mondiale, tandis que la France pourrait être contrainte de mieux maîtriser ses finances publiques pour éviter un creusement trop important de sa dette.
Indicateur | Allemagne 2023 | Allemagne 2024 | France 2024 |
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PIB (variation annuelle) | -0,3 % | -0,2 % | +0,5 % |
Taux de chômage | 5,4 % | 6,1 % | 7,8 % |
Déficit public (% du PIB) | 2,4 % | 2,6 % | 6,1 % |
Exportations (variation) | -1,8 % | -2,5 % | +0,8 % |
Ces divergences entre la France et l'Allemagne soulèvent des questions quant à la cohésion économique de l'Union européenne. L'Allemagne, autrefois un pilier de stabilité, montre aujourd'hui des signes de fragilité structurelle. Cela pourrait ralentir les ambitions européennes, en particulier dans des domaines clés comme la transition énergétique et l'innovation industrielle. La France, bien qu'elle présente une dette publique plus importante, peut se positionner comme un moteur alternatif pour l'Europe, à condition de consolider ses finances et d'éviter de tomber dans les mêmes pièges que son voisin.