Quiet quitting : Comment faire face à la « démission silencieuse » ?

Depuis la pandémie, beaucoup de salariés ont changé d’attitude vis-à-vis de leur vie professionnelle. Les témoignages et visions négatives sont désormais largement partagés sur la place publique, et particulièrement sur les réseaux sociaux. Ces salariés considèrent leur travail comme une contrainte, il se désengagent sciemment, et revendiquent un respect strict de leurs contrats et des heures de travail.

Patrickbarazzoni
Par Patrick Barazzoni Publié le 22 décembre 2022 à 5h20
Quiet Quitting Demission Salaries Management Entreprise
Quiet quitting : Comment faire face à la « démission silencieuse » ? - © Economie Matin
52%Le salaire des patrons du CAC40 a grimpé de 52% entre 2021 et 2019.

Ce phénomène de quiet quitting, qu’on pourrait traduire par « grève du zèle », semble toucher un nombre croissant de salariés et serait plus complexe encore à gérer pour les entreprises que la Grande Démission. Pour tenter d’y faire face, les employeurs doivent donc proposer une expérience RH collaborateur riche, différenciante, et qualitative.

La faute au stress et au burn-out ?

Serait-ce la fin de la lune de miel entre les Français et le travail ? Selon l’Ifop, près de 40% des salariés français se sentiraient concernés par le quiet quitting et réaliseraient leurs missions figurant sur leur contrat de travail, stricto sensu. De plus, 45% d’entre eux feraient « juste ce qu’il faut » au travail, refusant ainsi les heures supplémentaires et les tâches qui ne relèveraient pas de leur responsabilité. Notons également qu’il y a trente ans, un tiers des salariés affirmaient aller au travail uniquement pour avoir un salaire ; aujourd’hui, cette proportion a bien augmenté et ils sont à présent presque la moitié à souscrire à cette affirmation.

Afin d’expliquer la tendance croissante à la démission silencieuse, les conditions de travail des salariés sont à passer à la loupe. Premièrement, peu de salariés reconnaissent tirer un quelconque bénéfice de leur engagement pour l’entreprise qui les emploie. Ensuite, une majorité de salariés estime que le travail est avant tout une contrainte, faisant alors référence à son sens étymologique premier de « souffrance ». Les entreprises doivent alors prendre en considération les aspirations des salariés qui perdent petit à petit leurs engagements et leurs motivations, pour apporter des solutions et des améliorations.

Par ailleurs, l’altération récente de la santé mentale de nombreux collaborateurs serait un autre facteur favorisant le désengagement, la démotivation, et par conséquent la démission silencieuse. Nombreux sont les salariés à avoir déjà traversé une période de stress intense ou de burn-out récemment. Un des chantiers pour les entreprises serait par exemple de favoriser un meilleur équilibre entre la vie professionnelle et personnelle des salariés. En effet, à leur sens, ce manque d’équilibre contribuerait largement au sentiment de burn-out.

Dans ce contexte difficile, les entreprises auraient tout intérêt à identifier les leviers à utiliser pour proposer une meilleure expérience RH à leurs salariés. Les signaux d’alerte, subtils ou non, ne doivent pas être négligés.  Le bien-être de ses salariés doit être au cœur des préoccupations, au risque pour les entreprises de devoir faire face à une baisse de productivité et de créativité – ou pire à une vague de départs, qui impacteront sans équivoque les activités de l’entreprise.

Bien-être, communication et écoute des salariés : plus que des mots, des actions à mettre en place

La communication est la base de la résolution de tout problème. Sans dialogue, peu de chance pour les différentes parties de trouver un terrain. Bien souvent, il existe un fossé entre les attentes des salariés envers leur employeur et la réalité du quotidien, et ces écarts importants portent généralement sur le bien-être au travail, la communication interne, la représentation et l’écoute des collaborateurs, ou encore la qualité du management. En développant la communication entre ces différentes parties, il est possible d’instaurer un réel cercle vertueux.

Par ailleurs, ces besoins spécifiques pourraient trouver une réponse dans la construction ou le renforcement d’une culture d’entreprise inclusive et centrée sur l’individu. Si de nombreux dirigeants et managers sous-estiment son pouvoir de cohésion, la culture d’entreprise est devenue une nécessité à la fois pour les salariés et l’entreprise elle-même. En effet, elle permet le partage de valeurs fortes - comme la loyauté, sans lesquelles se creuse un écart entre les différentes parties, tout particulièrement lorsque les environnements de travail sont hybrides et que les employés ont moins d'interactions directes physique ou d'occasions de se retrouver. Au-delà du fait que les collaborateurs doivent pouvoir se sentir connectés humainement, écoutés et pris en considération, le bien-être et l’adoption d’une gestion d’équipe transparente sont essentiels pour établir un cadre de travail plus sain, collaboratif et épanouissant.

Bien que les employeurs doivent répondre aux besoins fondamentaux de sécurité de l’emploi, de bonnes conditions de travail, de rémunération, et d’avantages sociaux, ils doivent également se concentrer activement sur la culture d’entreprise pour fidéliser leurs meilleurs éléments. Dans un contexte où les salariés ne craignent plus de changer d’emploi, d’entreprise, voire de vie, les stratégies de rétention de talents sont cruciales pour la stabilité des activités.

2023 ou comment les DRH vont lutter contre la « démission silencieuse »

Le quiet quitting doit faire l’objet d’une attention particulière, et les dirigeants semblent en avoir conscience. Pour susciter de nouveau l’engagement de leurs salariés, il faudra construire un plan stratégique basé sur l’inclusion : il s’agit-là de l’axe de travail prioritaire des DRH en 2023.

Tout d’abord, ils devront améliorer la cohésion en interne, notamment grâce à l’amélioration de l’ambiance de travail. Si pour certains employés le « quiet quitting » est une réponse à la surcharge de travail et au déséquilibre entre vie professionnelle et vie privée, les conditions de travail et de management sont à revoir. Une plus grande flexibilité peut être une piste d’amélioration – et attire de nouveaux talents, remonte le moral des employés, augmente la productivité et fidélise les salariés, mais le rappel de certaines limites à respecter n’est pas à négliger.

La motivation et le sens accordé du travail sont d’autres éléments à adresser par les DRH. Certains salariés peuvent en effet parfois avoir du mal à appréhender l’évolution du monde professionnel et avoir besoin d'un soutien plus important pour s’engager à nouveau auprès de l'entreprise. Associer les salariés à la définition de leurs missions, les faire participer à de nouveaux projets ou plus ambitieux, ou soutenir leurs initiatives sont des exemples d’approches qui pourraient s’avérer bénéfiques pour les salariés comme les entreprises dans cette reconquête de sens.

Enfin, le travail des équipes RH peut porter sur la reconnaissance au travail et l’engagement des collaborateurs. Dans ce contexte, il s’agit d’apporter un soutien aussi bien aux collaborateurs qu’à leurs managers. Tous les salariés sont en effet susceptibles d’être touchés par le « quiet quitting ». Par conséquent, un manque de soutien et de reconnaissance peut ajouter un poids supplémentaire au mal-être du salarié, en plus de la surcharge de travail. Ainsi, en réfléchissant à des programmes de valorisation du travail, d’évènements ponctuels de reconnaissances, ou encore des actions nominatives de mérite partagées, il est possible de travailler sur cet aspect élémentaire.

Quels que soient les chantiers que les entreprises mettront en œuvre ou poursuivront, l’important sera de rester à l’écoute à la fois des signaux faibles à l’origine de la démission silencieuse, et du ressenti des salariés face aux actions RH visant à la limiter. La création d’une culture d’entreprise forte aidera définitivement les entreprises à cultiver un environnement de travail sain. Les équipes RH ont un important rôle à jouer dans l’atteinte de cet objectif, aussi bien du point de vue de la mise en place des actions nécessaires que du contrôle de leur pertinence et de leur efficacité. Même si les ressources humaines sont une science pas tout à fait exacte, nul doute que l’année 2023 sera sous le signe de l’expérience RH des collaborateurs.

Une réaction ? Laissez un commentaire

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre Newsletter gratuite pour des articles captivants, du contenu exclusif et les dernières actualités.

Patrickbarazzoni

Directeur Général de SD Worx France

Aucun commentaire à «Quiet quitting : Comment faire face à la « démission silencieuse » ?»

Laisser un commentaire

* Champs requis