SPÉCIAL Ukraine : montée des tensions, ultimatum et déploiements de force… ! Comprendre les enjeux

Cropped Favicon Economi Matin.jpg
Par Charles Sannat Modifié le 29 novembre 2022 à 10h11

À chaque bruit de bottes où la situation risquerait de dégénérer, l’or augmente. Évidemment, pour nous autres, investisseurs long terme dans le métal, c’est une bonne nouvelle d’autant plus que grâce à la crise ukrainienne – qui est partie pour durer au moins quelques jours dans sa phase de montée des tensions, puisque nous n’avons pas encore atteint le stade dit « paroxystique » de toute crise géopolitique, et quelques semaines au mieux avant que soit trouvée une résolution entre les différents belligérants –, l’or vient de dépasser sa résistance graphique à la hausse libérant ainsi au métal jaune un fort potentiel de hausse (jusqu’à 1 780 dollars environ l’once pour la prochaine résistance graphique d’ampleur). L’or explose donc ce soir de plus de 2 % et la Bourse de Paris perd, elle, 2,66 % dans le sillage de l’ensemble des Bourses mondiales. En Russie, c’est le krach avec plus de -10 % à la Bourse de Moscou.

Hélas, il est difficile comme d’habitude de se réjouir d’une augmentation de l’or parce que, évidemment, l’or depuis 6 000 ans montre et démontre systématiquement qu’il est un baromètre de la gravité d’une situation qu’elle soit monétaire, économique ou géopolitique. Sa forte augmentation nous rappelle, s’il en était encore besoin, que la situation peut déraper à tout instant.

Contrairement à ce que l’on peut croire, ou vouloir nous faire croire, les relations internationales répondent à des mécanismes particulièrement précis et les guerres ne sont jamais le fruit du hasard mais bien les conséquences d’un enchaînement d’actes mûrement réfléchis de part et d’autre et elles répondent, comme toutes les crises, à une logique bien spécifique.

Loin de tomber dans le manichéisme de bon aloi de nos médias plutôt largement atlantistes et aimant dépeindre Vladimir Poutine comme un dictateur sanguinaire mangeur d’enfants à chaque petit déjeuner, je pense qu’il était important de vous proposer cette synthèse sur les événements en cours en Ukraine en rétablissant d’abord quelques vérités, en remettant l’ensemble dans une perspective historique et en cernant les enjeux de fond de cette histoire qui risque encore une fois de nous occuper un petit bout de temps.

La palme de la désinformation pour un article d’Arrêt sur Image !

C’est un article assez surprenant d’Arrêt sur Image. En effet, dans un article intitulé « Poutine dans un autre monde », Daniel Schneidermann y décrit un Vladimir Poutine aussi saint d’esprit que le dernier des dictateurs nord-coréen complètement fou mais dont la folie n’a jamais été aussi forte au point de déclencher un holocauste nucléaire… Voici quelques extraits.

« Poutine est dans un autre monde : c’est Merkel – elle lui a parlé trois fois au téléphone – qui a ainsi décrit à Obama l’état d’esprit du président russe, selon des confidences de l’entourage d’Obama, rapportées par le New York Times… »

C’est sûr qu’Obama et Poutine ne peuvent pas être dans le même monde dans la mesure où, tout simplement, leurs intérêts sont par nature divergents. Nous avons affaire ici à une lutte acharnée entre grandes nations autour de sujets stratégiques comme la domination mondiale, l’ordre économique, la lutte pour l’accès aux matières premières et en particulier énergétiques, ou encore la sanctuarisation des territoires nationaux.

« Ce que l’on sait, c’est que les télés russes, depuis des semaines, décrivent aux Russes une Ukraine dans laquelle les « fascistes », qui ont pris le pouvoir à Kiev, menacent les Russes en Crimée. Des mercenaires venus de Kiev seraient prêts à s’envoler vers Sebastopol, pour massacrer ces Russes de Crimée. Ainsi s’expliquerait, par exemple, l’étrange occupation des aéroports criméens, devant les caméras, à la fin de la semaine dernière, par des soldats en armes, sans signe national distinctif : il s’agissait de rassurer les Russes de Crimée.

Est-ce dans ce monde-là, dans une Russie cernée par le danger fasciste, que vit Poutine ? Jusqu’à quel point lui-même n’est-il pas intoxiqué par la propagande qu’il a déchaînée, et qu’il contrôle ? Ce ne serait pas la première fois. »

Pourtant, et il est essentiel de rappeler ces quelques vérités, le parti Svoboda en Ukraine, qui était le fer de lance de la contestation sur la place Maidan, est bien un parti néonazi. Si certains chez nous s’interrogent encore doctement sur le sens antisémite d’une gestuelle dont le nom correspond à un célèbre plat, en Ukraine il n’y a aucune ambiguïté puisque les membres de ce parti, organisé en milice, manifestent en faisant un salut nazi sans équivoque, ce qui n’a pas semblé gêner notre philosophe des beaux quartiers BHL lorsqu’il fanfaronnait sur la tribune à Kiev… sous les saluts de jeunes nazillons aussi sympathiques et charmants que leurs aînés.

Nous avons contribué et largement à la déstabilisation de l’Ukraine. Nous en sommes une cause réelle, nous autres occidentaux, que cela nous plaise ou non, que l’histoire officielle ou les médias en parlent ou pas. Et cela a été vertement rappelé par le ministre des Affaires étrangères russe.

Nous, l’Occident et l’Europe, avons aidé, financé, et attisé la braise jusqu’à ce que toute la mayonnaise prenne afin de déstabiliser un pouvoir déjà largement affaibli par une corruption endémique.

L’objectif des Occidentaux et des Européens est évidemment de repousser la Russie au plus loin et de saper progressivement, comme c’est le cas depuis la chute du mur de Berlin, ce que l’on appelle la zone d’influence de la Russie post-soviétique. Le KBG et son ancêtre la Tcheka, les purges, la répression de 70 années de communisme n’ont pas laissé aux populations des pays de l’est des souvenirs impérissables, et nombre d’entres elles voient d’un très bon œil et souhaitent leur passage sous le pavillon de l’OTAN. C’est par exemple le cas de la Pologne qui illustre parfaitement ce phénomène. Les Russes loin d’être les fous décrits, ne sont pas allés faire la guerre pour Varsovie. Mais y voir des installations de missiles de l’OTAN qui menacent directement le territoire russe, diminuent sa capacités de dissuasion est un torchon rouge que les forces occidentales agitent trop fort et depuis trop longtemps.

L’Ukraine est l’un des plus grands greniers à blé de l’Europe continentale et ses ressources énergétiques en mer sont importantes, sans compter sa proximité immédiate avec la Russie. Une Ukraine européenne et « Otanisée », c’est repousser la Russie dans ses ultimes retranchements… Inacceptable pour la Russie et ses dirigeants.

« Poutine avait tout écrit, assurait sur le plateau une de nos invitées de la semaine, Nathalie Pasternak, une Ukrainienne de Paris. Plus se déroulent les événements, moins cette préméditation machiavélique du Russe semble vraisemblable. Menaces d’exclusion du G8, et surtout effondrement, ce lundi matin, de la Bourse de Moscou, inquiète des bruits de guerre : s’il avait prévu tout ça, il est vraiment très fort. Ce n’est pas la seule approximation proférée cette semaine dans l’émission, où les affirmations sans preuves ont volé en escadrille, à propos de questions aussi différentes que la famine en Ukraine sous Staline, la présence clandestine de Russes parmi les membres des forces spéciales ukrainiennes, ou encore du nombre de députés d’extrême-droite au Parlement ukrainien. »

Vladimir Poutine, n’en déplaise à notre analyste d’Arrêt sur Image, a effectivement parfaitement conscience des conséquences de sa politique en Ukraine… qu’elles soient politiques ou économiques, mais il a aussi parfaitement conscience des conséquences géopolitiques à terme d’une éventuelle absence de réaction. Si la Russie se laisse faire, cela reviendrait à abdiquer toute idée de puissance nationale et d’indépendance de la Russie face à l’Empire américain. Nous sommes dans des enjeux quasi-vitaux pour l’existence de la Russie. Obama le sait très bien, de même que la totalité des dirigeants européens. Tenir ou croire au discours du « dans quel monde vit Poutine » est au mieux une preuve d’une incroyable naïveté géopolitique et une méconnaissance crasse des enjeux géostratégiques de base… ou au pire une belle tentative de « désinformation », le méchant devant être très méchant et le gentil décidemment bien gentil afin de susciter l’adhésion des peuples occidentaux à des objectifs politiques moralement plus que contestables.

Le précédent de la guerre en Géorgie en 2008 et la médiation « Sarkozy » !

Cette crise en Ukraine avec un point particulièrement chaud en Crimée n’est qu’une nouvelle répétition de l’intervention russe en Géorgie en 2008, appelée également deuxième guerre d’Ossétie du Sud, qui a opposé en août 2008 la Géorgie à sa province séparatiste d’Ossétie du Sud et à la Russie. Le conflit s’est étendu à une autre province géorgienne séparatiste, l’Abkhazie. Je vous conseille l’excellente lecture de la chronologie des événements sur le site Wikipédia (lien en bas de page). Voilà pour l’essentiel de cet épisode que tout le monde semble avoir oublié… volontairement. Une avancée de l’OTAN dans le « glacis » russe avait provoqué une réaction armée du Kremlin, occupé à l’époque par Medvedev.

« Après plusieurs jours d’accrochages frontaliers entre la milice des séparatistes sud-ossètes, soutenue et formée par la Russie, et l’armée géorgienne, les hostilités commencent dans la nuit du 7 au 8 août 2008 par un assaut des troupes géorgiennes qui fait 12 morts dans les forces de maintien de la paix de la CEI (à prépondérance russe) et 162 victimes sud-ossètes selon le bilan officiel de la Justice russe donné en fin d’année 2008. De plus, le ministère russe des affaires étrangères avait annoncé, le lundi 11 août 2008, environ 1 600 victimes civiles).

La Russie applique le plan militaire de guerre contre la Géorgie dont la planification avait été ordonnée en 2006 par le président russe Poutine.

Se fondant sur le fait que la grande majorité des Ossètes du Sud ont un passeport de la Fédération de Russie, le président russe, Dmitri Medvedev, ordonna à ses troupes d’intervenir afin de protéger la population de l’Ossétie du Sud et de contraindre la Géorgie à la paix. Après quatre jours d’avancée rapide des forces russes et de bombardements sur plusieurs villes géorgiennes, Medvedev annonce que ces objectifs sont atteints et que les troupes russes resteront sur les positions définies par l’accord de 1992 pour garantir la paix dans la région.

Le 16 août est signé un cessez-le-feu qui met, au moins temporairement, fin au conflit, sans régler pour autant les questions ossètes et abkhazes.

Le 26 août, la Fédération de Russie reconnaît officiellement l’indépendance de l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie et se dit prête « à assurer la sécurité de ces deux États ».

La Fédération de Russie a arrêté son avancée en Géorgie, sur ordre de son président, lequel déclare que son armée a atteint tous ses objectifs. Mais pour protéger l’Ossétie du sud et l’Abkhazie (toujours selon le président russe), les troupes resteront où elles sont jusqu’à la stabilisation de la situation, tandis que la médiation du président français Sarkozy pour un plan de paix de l’UE est acceptée par les deux parties.
Sarkozy et Medvedev arrivent à formuler un plan de paix en 6 points :

le non-recours à la force armée ;

la cessation des opérations militaires ;

le libre accès à l’aide humanitaire ;

le retour des troupes géorgiennes dans leur lieu de cantonnement habituel ;

le retrait des troupes russes sur les lignes antérieures au déclenchement des hostilités ; dans l’attente d’un mécanisme international, les forces de paix russes mettront en œuvre des mesures additionnelles de sécurité ;
le lancement de discussions internationales sur le statut de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie et leur sécurité. »


Le retour de l’Allemagne sur la scène internationale !

Il est important de constater que, contrairement à la crise de 2008 où c’est le Président français qui était allé négocier pour le compte des Américains avec la Russie, cette fois c’est l’Allemagne de Merkel qui est positionnée comme leader diplomatique, ce qui en dit long sur la réalité des rapports de forces au sein même de l’Union Européenne, où l’Allemagne, évidemment, est en pôle position.

C’est la première fois depuis la chute du mur de Berlin que la grande Allemagne réunifiée s’impose sur la scène internationale de cette façon-là. Or c’est exactement la doctrine Merkel qui consiste à dire et affirmer que l’Allemagne n’a plus à rougir de son passé. Désormais, l’Allemagne elle aussi rêve de puissance et d’une forme de domination douce via sa force économique, et c’est d’ailleurs l’un des problèmes majeurs de la zone euro, avec une monnaie profondément allemande… alors que la zone euro est en réalité profondément… latine ! Cette incompatibilité devra trouver un jour ou l’autre une solution économique et monétaire adaptée.

L’aspect triplement stratégique de l’Ukraine pour la Russie

Après cette digression sur l’Allemagne, revenons donc à l’Ukraine. Ce pays est, pour la Russie, triplement stratégique. Nous pouvons le nier, nous pouvons mentir, nous pouvons désinformer… la réalité c’est que les Russes sont prêts à la guerre pour l’Ukraine et la raison est assez simple à comprendre. Cela tient en 4 points essentiels.

L’Ukraine un glacis de protection.

Géographiquement, deux pays protègent la « mère patrie » russe (expression profondément ancrée dans l’inconscient collectif russe). Au nord la Biélorussie. Au sud l’Ukraine. Ces deux pays représentent une zone tampon laissant aux forces armées russes le temps de réagir à une éventuelle agression venant de l’ouest. Vous retrouvez ce même concept de glacis au sud… avec le Caucase et la Géorgie (au hasard). Enfin, à l’est, ce glacis russe est avant tout constitué par les étendues désertiques de la Sibérie. Au milieu de ces écrans naturels se trouvent la « mère partie », c’est-à-dire Moscou et le cœur même de la Russie.

Les Russes ne peuvent pas se permettre d’abandonner d’un point de vue stratégique leur « glacis » et chaque grande nation raisonne depuis la nuit des temps exactement de la même façon. C’est le cas pour la Chine, c’est évidemment le cas pour les États-Unis. Souvenez-vous de la crise des missiles de Cuba. Il n’était pas acceptable pour les Américains d’être sous la menace directe de missiles soviétiques trop proches, beaucoup trop proches du territoire américain. Un missile lancé de Cuba ne laissait même pas le temps matériel d’évacuer le Président américain ! Les États-Unis étaient donc prêts à la guerre plutôt que d’accepter une menace permanente et directe concernant l’intégrité même de leur sol.

La Russie d’aujourd’hui applique ni plus ni moins ce raisonnement. Un missile américain lancé d’Ukraine… ne laisserait que quelques minutes au pouvoir russe pour réagir et ne permettrait même pas d’évacuer leurs dirigeants. C’est pour les Russes tout aussi inacceptable que pour les Américains lors de l’épisode de la crise de Cuba. Tout le monde le sait pertinemment mais nous tentons par tous les moyens nous autres, Occidentaux, de repousser les Russes dans leurs derniers retranchements. Sous notre menace directe, ils seraient plus dociles, ils seraient politiquement marginalisés, réduits au rang de puissance de second rang comme l’est maintenant notre pays la France sous protectorat américain.

L’avancée de l’OTAN.

Depuis le début des années 90 et la chute du mur de Berlin, les Russes sont passés par de nombreux stades, à commencer par la grande crise des années 90 où Boris Elstine, le premier président de la Russie sous la forme que nous lui connaissons aujourd’hui, était en réalité une marionnette aux mains du FMI et des Américains. La Russie a été humiliée, la Russie a été pillée par des oligarques dont une partie croupit encore dans les geôles moscovites. La Russie a vécu une période de pénurie, de grande misère, d’immense corruption et d’humiliation. C’est, que cela nous plaise ou non et en réalité cela ne nous plaît pas, Vladimir Poutine aussi imparfait soit-il qui a su mettre fin à cette période de chaos en Russie et redresser de façon considérable ce grand pays. Ce redressement et cette reprise en main ont été effectués au détriment des intérêts des grandes entreprises occidentales et en particulier américaine. La Russie nous a échappé. C’est ce qui explique cette méfiance et ce rejet de la Russie de Poutine par les pouvoirs politiques occidentaux.

Or depuis 1989, l’OTAN pousse ses pions avec une régularité de métronome dans un seul objectif : amener dans le giron de l’Otan l’ensemble des pays entourant géographiquement la Russie. Hier la Géorgie, aujourd’hui l’Ukraine et, si cela fonctionne, ce sera, demain, le tour de la Biélorussie à qui vous en conviendrez il est urgent d’apporter la démocratie américaine, les privatisations, la baisse des salaires, le libre-échange, et nos missiles pointés directement sur le Kremlin.

L’Otan s’est donc progressivement étendu vers l’Est et jusqu’à la Pologne. Pour le pouvoir russe actuel comme futur car cela fait consensus dans les élites russes, l’Otan ne doit pas pouvoir aller plus loin. L’Otan sera donc stoppée même au prix d’une guerre qui pourrait s’avérer une catastrophe planétaire.

La Crimée, l’un des seuls accès à la mer pour la marine russe

La Russie a très peu de débouchés maritimes dans des eaux accessibles… c’est-à-dire pas bloquées par les glaces plus de la moitié de l’année. C’est la raison pour laquelle des accords avaient été conclus avec l’Ukraine afin que la nouvelle Russie puisse continuer à maintenir l’une de ses plus grandes bases navales en Crimée. Ce port est évidemment stratégique pour le déploiement des navires russes et la capacité de dissuasion du Kremlin. En Crimée… il y a aussi quelques beaux sous-marins nucléaires lanceurs d’engins. Il ne faut pas s’imaginer encore une fois que la Russie tire un trait pour nous être sympathique sur sa capacité de dissuasion nucléaire.

Un sous-sol marin riche en ressources énergétiques

Voici le titre d’un article datant de 2012 afin d’illustrer, encore une fois, le combat que se livrent les États et leurs entreprises pour l’accès et l’exploitation des ressources énergétiques.

« Exxon Mobil : sélectionné pour développer le champ pétrolier et gazier de Skifska en Ukraine

(Boursier.com) — Un consortium dirigé par Exxon Mobil et Shell a été sélectionné par l’Ukraine pour développer le champ pétrolier et gazier de Skifska, en mer Noire. Le coût total de ce projet a été estimé entre 10 et 12 milliards de dollars par le gouvernement ukrainien. Le projet s’inscrit dans le cadre du plan de l’ex-république soviétique visant à alléger sa dépendance au gaz importé de Russie, qui représentait près des deux tiers de la consommation du pays. »

On parle de plus de 10 milliards de contrat ! On parle de ressource gazière et partout où l’on parle d’énergie on parle aussi souvent d’arme et de guerre.

Il y a un enjeu énergétique mais aussi un enjeu de passage des pipe-lines et gazoducs russes qui approvisionnent l’Europe. Or, un gazoduc lorsqu’il passe sur votre territoire, c’est également des revenus assurés. La Russie peut couper le gaz aussi bien à l’Ukraine qu’à l’Europe… mais l’Ukraine aussi peut empêcher la livraison du gaz russe à l’Europe. Dans ces histoires-là, les jeux de pouvoirs, de puissance et de chantage… sont très complexes. La Russie peut-elle tolérer de perdre des relations très privilégiées avec un pouvoir ?

Des rétorsions économiques déjà en œuvre

Il n’y a pas à vrai dire grand-chose de nouveau depuis vendredi dernier sur le front Ukrainien… or vendredi les marchés étaient plutôt calmes ! Et aujourd’hui lundi c’est la panique… ou presque. Pourquoi ? Simplement parce que les rétorsions économiques sont à l’œuvre et que Washington a lâché ses chiens de garde financiers. Ventes massives à la Bourse de Moscou, attaque en règle du rouble, la monnaie russe, augmentation en catastrophe par la Banque centrale de Russie de ses taux intérêts pour contrer la baisse de sa monnaie.

D’ailleurs, le rouble est sous pression depuis presque un an en réalité, une pression que nous les Occidentaux nous maintenons. Les rétorsions économiques à l’égard de la Russie ont donc commencé et elles sont reçues telles qu’elles le doivent à savoir comme une guerre… par d’autres moyens, une guerre économique mais par certains aspects aussi usants qu’une guerre tout court.


Menaces américaines et sanctions occidentales

Ce soir nous en sommes aux menaces, aux ultimatums, et aux contre-menaces. C’est un jeu où seul le plus motivé et celui qui est prêt à aller le plus loin peut gagner.
Voici l’une des dernières dépêches du jour tout en sachant que la flotte russe a sommé les forces ukrainiennes en Crimée de se rendre avant 3h00 GMT…

Ukraine : la Russie juge les menaces de Kerry inadmissibles (Dépêche AFP)

« MOSCOU – La Russie a jugé lundi inadmissibles les menaces du secrétaire d’État américain John Kerry, qui a dénoncé l’invasion de l’Ukraine par la Russie et évoqué de possibles sanctions internationales contre Moscou.

Nous estimons inadmissibles les menaces à l’égard de la Russie exprimées par le secrétaire d’État américain John Kerry concernant les derniers événements en Ukraine et en Crimée, a déclaré le ministère russe des Affaires étrangères dans un communiqué.

Il a accusé M. Kerry de revenir à des clichés de la guerre froide et ne pas avoir cherché à comprendre le processus complexe en cours dans la société ukrainienne.

Le ministère accuse Washington d’avoir fermé les yeux sur la russophobie rampante et l’antisémitisme chez les manifestants de l’opposition, dont les représentants ont pris le pouvoir à Kiev.

Les Occidentaux sont maintenant des alliés de véritables néonazis qui détruisent des églises orthodoxes et des synagogues, selon le ministère.

M. Kerry, attendu à Kiev mardi, avait lancé samedi une très ferme mise en garde contre Moscou dans un communiqué fustigeant l’invasion et l’occupation de l’Ukraine par la Russie qui mettent en péril la paix et la sécurité dans la région.

Il avait dénoncé la violation par Moscou de la souveraineté, de l’intégrité territoriale de l’Ukraine et des conventions internationales, notamment celles des Nations unies.

Dans un communiqué séparé, le porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Alexandre Loukachevitch, a estimé lundi que la décision prise par certains pays du G8 de suspendre les travaux préparatoires au sommet de Sotchi en juin n’était motivée par rien.

Elle n’est pas seulement dommageable sur le plan politique mais contrevient aux principes de coopération constructive dans ce format, a estimé M. Loukachevitch.

Les dirigeants de sept pays membres du G8 (Allemagne, Canada, États-Unis, France, Italie, Japon et Royaume-Uni) avaient annoncé dimanche la suspension de leurs préparatifs en vue du G8 prévu en juin à Sotchi, ville du sud de la Russie qui a accueilli les jeux Olympiques d’hiver. »

Il faut comprendre que le fait que les JO paralympiques soient boycottés… franchement Poutine s’en fiche comme d’une guigne. Sa place et son fauteuil au G8 ? Ils sont la conséquence logique d’une puissance russe retrouvée. La perte du fauteuil au G8 ne peut donc être que transitoire… Il s’en fiche comme d’une guigne.

Nous avons joué aux apprentis sorcier en pleine conscience des conséquences de nos actes. Nous avons provoqué la Russie et pas Vladimir Poutine. Nous avons créé cette situation de chaos et de quasi guerre civile.

Cela fait quelques jours maintenant que l’horrible armée russe dirigée par l’horrible dictateur despote mangeur d’enfants Poutine se déploie en Crimée et que l’armée russe est en alerte sur le front ouest… et pourtant malgré toute cette méchanceté russe… à ce jour (et espérons que cela puisse durer de cette façon-là), aucun coup de feu n’a été tiré. Aucun mort imputable aux forces russes d’occupation… Surprenant car pour moi un méchant a la gâchette facile. Vladimir Poutine n’est peut-être pas sympathique, mais il n’est ni fou, ni ne vit « dans un monde parallèle ». C’est un véritable dirigeant, pleinement responsable de ses actes et sachant ce qu’il fait, à savoir mettre un coup d’arrêt à l’expansion vers l’est des forces de l’Otan.

La réalité est assez simple. La Russie est prête à cette guerre, car sinon elle aura lieu la prochaine fois pour la Biélorussie. Alors autant la faire maintenant. Mais nous, nous Français, Américains, Allemands, Polonais, sommes-nous prêts à mourir pour Sébastopol ? (Franchement ce sera sans moi.) Sommes-nous prêts à risquer la Troisième Guerre mondiale pour le pétrole ukrainien ? Sommes-nous suffisamment motivés pour mourir pour voir l’Otan installer une base de missile pointé sur Moscou à Kiev ? Je pense que non, mais ce qu’il faut comprendre c’est que c’est nous, les Occidentaux et en particulier les Américains, qui ont la solution à cette crise. Soit nous laissons l’Ukraine dans le giron russe, soit nous l’en arrachons et ce sera la guerre. Ce n’est pas Poutine fort mesuré pour le moment quoi qu’en dise la propagande officielle (encore une fois aucun coup de feu tiré) qui va décider de la guerre et de la paix. C’est Obama. Ce sont les Américains. Et c’est sans doute ce qu’il y a de plus inquiétant… que la guerre ou la paix soit une décision aux mains… des banquiers de Wall Street !

Pour le moment, il semble que tout le monde ait intérêt à la montée des tensions avec, comme objectif, la partition de l’Ukraine en deux. Américains comme Russes ont lancé l’Ukraine sur le chemin de la guerre civile et rien ne dit encore une fois que la sagesse et la modération prévaudront. Pour le plus grand malheur des peuples.

Restez à l’écoute.

À demain… si vous le voulez bien !!

Au coffre Le Contrarien Charles Sannat

Laissez un commentaire
Cropped Favicon Economi Matin.jpg

Charles SANNAT est diplômé de l'Ecole Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d'Etudes Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information-(secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Economique d'AuCoffre.com en 2011. Il rédige quotidiennement Insolentiae, son nouveau blog disponible à l'adresse http://insolentiae.com Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.