Et encore 20 milliards, c'est pour que le titre soit court, car le rapport de la Cour des Comptes qui révèle l'explosion du phénomène parle même de "20 à 25 milliards d'euros". En cause ? La crise bien entendu, qui n'en finit pas de ne pas finir, mais aussi le matraquage fiscal et le poids des charges de cotisations sociales pesant sur les entreprises. Curieusement, la "phobie administrative" n'est pas prise en compte, mais il doit bien y avoir aussi un peu de "négligence" dans le lot.
En attendant, 20 à 25 milliards d'euros représentent plus de 5 % du total des cotisations sociales prélevées en France sur le travail. Un montant astronomique qui a plus que doublé depuis 2007, signant la double responsabilité de la crise et de la hausse des charges. En tête des fraudeurs, on retrouve sans grand étonnement des secteurs qui souffrent de la crise et de la concurrence de la main d'oeuvre à bas coût : bien évidemment le secteur du batiment, suivi par celui du commerce. Il manquerait près de 4 milliards d'euros de cotisation dans le batiment, eu égard à l'activité constatée du secteur, et 3,3 milliards dans le commerce en général.
Difficile pour autant de les blamer, quand on sait par exemple que le nombre de travailleurs détachés provenant d'autres pays de l'Union Européenne, où les salaires sont beaucoup moins élevés est passé de 8000 au début des années 2000 à.... 170 000 en 2012. De même, le statut d'auto-entrepreneur, réguliérement critiqué, abriterait un certain nombre d'anciens salariés travaillant pour leur ancien employeur ou un employeur unique, en lieu et place d'un contrat de travail soumis à cotisations sociales. Autre fraude difficile à sanctionner, la non-déclaration de tout ou partie des heures de services à la personne : aide-ménagère, femme de ménage. A tout cela s'ajoute la sous-traitance, et le travail "dissimulé" ou non déclaré des proches dans les entreprises familiales. Et bien entendu, le vrai travail au noir, assumé, non déclaré par choix. L'ensemble représenterait plus d'un point de PIB. Pourtant, le calcul du PIB a justement été révisé dernièrement, pour en tenir compte...
La Cour des Comptes, dont le rapport sera rendu public mercredi 17 septembre mais dont des pans entiers ont fuité dans les médias la veille au soir, déplore l'absence de "police fiscale"pour lutter contre la fraude aux cotisations sociales. Les URSSAF régionales disposent bien d'équipes d'enquêteurs, habilitées à procéder à des contrôles in situ et sur pièces, mais à l'échelle d'une région comme la région PACA, ils ne sont qu'une petite dizaine... Résultat, les redressements et recouvrement forcés se sont élevés à moins d'1 milliard d'euros en 2013, soit moins de 5 % du montant éstimé des fraudes.