Comprendre le nouveau monde de l’énergie, ses acteurs et son fonctionnement

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Par Myriam Maestroni Modifié le 29 novembre 2022 à 9h16

La décennie 2000-2010 a été pour la France et pour l'Union européenne la décennie de la transition énergétique. Durant cette période, nous sommes passés du paradigme énergétique ancien à un nouveau monde de l'énergie, celui du monde de l'« énergie 2.0 ».

Ce nouveau paradigme énergétique se caractérise par l'émergence de nouveaux acteurs, de nouvelles missions à mener à bien pour les acteurs « historiques », des consommateurs plus conscients de l'impact de leur consommation individuelle sur le plan global, plus sensibilisés que jamais à la nécessité et à l'urgence de mieux gérer l'énergie consommée –tant pour des raisons budgétaires qu'environnementales- et donc de l'économiser. Ce nouveau monde de « l'énergie 2.0 » s'articule, notamment en Europe, autour de la notion d'efficacité énergétique, c'est-à-dire de la mise en œuvre raisonnée de l'énergie et, par conséquent, donne une importance nouvelle à l'activité de conseil en énergie, qui se décline tant pour les professionnels que pour le grand public. Cette nouvelle dimension passe de la théorie à la réalité grâce aux nouvelles ressources et outils en matière d'information et de communication, fournies par le monde virtuel.

Le nouveau monde de « l'énergie 2.0 » considère et intègre tout le savoir-faire du paradigme antérieur, mais si ce savoir-faire d'experts, de techniciens et d'industriels demeure une condition nécessaire pour continuer à explorer, forer, construire oléoducs, gazoducs et autres infrastructures de stockage et à maîtriser l'approvisionnement jusqu'au client final, il est désormais devenu condition nécessaire mais certainement plus suffisante. Car, dans le nouveau monde de l'énergie, au-delà de l'ensemble de ses missions traditionnelles l'énergéticien du futur, doit désormais – quel que soit l'organisation de la filière - également répondre de la mise en œuvre efficace de cette énergie, de son utilisation intelligente, et de la sobriété énergétique. Cette position peut, dans un premier temps, interpeller, puisque cela revient à lui demander d'aider ses clients à consommer moins. Mais réflexion faite, quoi de plus normal ? N'est-il pas, en principe, celui qui semble le plus à même de jouer ce rôle? N'est-on pas entré dans l'ère de la prise en compte du cycle de vie intégral ? Et puis, le XXIème siècle se caractérise par une série de paradoxes, dit-on... et bien en voilà sans doute un supplémentaire... Celui-ci s'accompagne dans la foulée d'un nouveau paradoxe, encore fort peu appréhendé, qui est celui de voir naître une série d'innovations de nature à changer profondément le monde de l'énergie et de sa mise en œuvre, de la capacité à convaincre chaque foyer d'investir dans des travaux de rénovation efficace des logements comme c'est déjà la cas au travers de programmes comme, entre autres, celui lancé par Auchan (eco-prime énergie Auchan) jusqu'à des technologies très performantes de production ou de stockage d'électricité, en passant par des outils de mesure tels que le fameux compteur Linky.

Aujourd'hui plus aucun doute n'est permis : l'énergéticien, qui a vécu depuis plus d'un siècle en produisant, en transportant ou en distribuant pétrole, gaz ou électricité, doit désormais veiller à faire en sorte que le consommateur en fasse bon usage. Derrière cette révolution, se profile la nécessité pour les énergéticiens de faire évoluer leur modèle économique, qui ne peut naturellement plus tabler sur une croissance naturelle de la demande, compte tenu du souci d'efficacité énergétique et de l'apparition de nouvelles sources d'énergie complémentaires. Il convient donc que ces derniers ne se contentent plus de la marge réalisée entre le prix d'achat et le prix de vente, mais qu'ils s'attachent à créer de la valeur autrement en s'appropriant ce nouveau rôle dont ils ont hérité bon gré, mal gré. C'est ainsi que l'on voit, par exemple, se développer depuis quelques années ces nouvelles figures que constituent les sociétés d'énergie et de services (ESCO – Energy Service company) qui se substituent, ou s'ajoutent selon les cas, au modèle de « multi-utilities » qui préfaçait le début de la décennie passée. Il est vrai que pour un secteur assez peu innovant, en tout cas sur sa partie aval et notamment dans son offre client, il s'agit là d'un défi particulièrement intéressant à relever, dont ni les tenants ni les aboutissants n'avaient pas vraiment été pris en compte jusqu'à la deuxième partie de la décennie 2000-2010, mais qui nécessitera bien les 10 prochaines années pour être relevé. Ce défi est d'autant plus ambitieux que les investissements retenus pourraient être plus ou moins pertinents, avec le risque à la clé de ne pas faire les bons choix technologiques ou stratégiques.

La logique des « 3 x 20» du Paquet énergie-climat qui constitue le cœur du nouveau paradigme européen de l'énergie, ont promu au même niveau que la réduction des émissions de CO2, les énergies renouvelables, l'efficacité énergétique et donc les économies d'énergie. Ce dernier point, qui touche l'ensemble de la société et englobe le grand public est fondamental si l'on veut comprendre le nouveau paradigme qui est au cœur de la transition énergétique, qui en est le pilier essentiel.

Le caractère inéluctable de cette transformation, porteuse de cette dynamique d'innovations sans précédent, nous condamne à faire preuve d'un optimisme radical... nous obligeant à voir dans cette dernière également un socle de de la croissance verte et donc du développement durable de nos sociétés et de nos économies. La transition énergétique en cours passe par une redéfinition de nos modes de consommation et de production. L'enjeu consiste ni plus ni moins à passer d'une économie linéaire, qui consiste à puiser dans les ressources de la Terre (agricoles, minérales, énergétiques, sols, air, eau...) et à les transformer pour créer de nouveaux produits jetés après usage, à une économie circulaire, plus respectueuse des milieux naturels, plus efficiente, plus économe et créatrice d'emplois...

Ces défis qui touchent de façon inexorable le monde industriel ne pourront véritablement être relevés qu'en créant une vrai visibilité politique et réglementaire, que ce soit à l'échelon international, européen, national ou local.

Myriam Maestroni, "Comprendre le nouveau monde de l'énergie"

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Myriam Maestroni, ex-Directrice Générale de Primagaz est Présidente d'Economie d'Energie SAS, la plus importante société de gestion des Eco-primes.

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