2020, l’année de la licorne télémédecine

Guillaume Lesdos Medaviz
Par Guillaume Lesdos Publié le 16 décembre 2020 à 5h00
Telemedicine Perspectives Analyse
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60.000Un an après son introduction dans le parcours de soins français en septembre 2018, seulement 60.000 actes de téléconsultation sont recensés par l'Assurance Maladie.

Frappée par un contexte sanitaire et économique défiant toute prévision, l’année 2020 est profondément marquée par la réponse sociétale à une crise sans précédent. La santé, première préoccupation pour 81% Français, devient une urgence absolue et son écosystème se réinvente, recourant de manière inédite au digital pour assurer le suivi des patients. Conçue pour faciliter l’accès aux soins des patients, la télémédecine prend une toute autre dimension en assurant leur suivi régulier.

De ses prémices internationales dans les années 1920 avec la radio comme solution de soin à distance pour les marins, à sa définition dans la loi HPST de 2009 comme « une forme de pratique médicale à distance utilisant les TIC », la télémédecine, qui ne porte pas encore son nom, évolue essentiellement au gré de la technique. Au début des années 2010, les nouveaux enjeux de la santé conduisent les pouvoirs publics à engager une réforme structurelle, afin de répondre, entre autres, à la désertification médicale grâce aux outils numériques. Neuf ans après sa définition législative, la télémédecine entre dans le droit commun, et la téléconsultation connaît sa première révolution. En 2020, le choc de la Covid-19 conduit l’écosystème de la santé à capitaliser sur la télémédecine, dont la valeur ajoutée est in fine reconnue.

Le choc en mars 2020

En janvier 2020, les acteurs de la santé et les prévisionnistes misent encore sur un développement à très long terme de la télémédecine. Les chiffres sont à seuls évocateurs d’un service peinant à trouver, non son modèle économique défini par la législation, mais son appropriation. Un an après son introduction dans le parcours de soins français en septembre 2018, seulement 60.000 actes de téléconsultation sont recensés par l’Assurance Maladie. Ils représentent 0,0005 % des 190 millions de consultations médicales réalisées chaque année. Le marché de l’e-santé est alors un oligopole, qui doit encore rassurer ses principaux utilisateurs.

La pandémie de la Covid-19 déclenche une crise globale, remettant en question notre modèle économique, social et mettant en lumière les fragilités de notre système de santé. Par principe perfectible, notre modèle de soins vacille. Et pour la première fois depuis 2009, les acteurs de l’e-santé ne sont plus perçus comme les membres d’une sombre confrérie industrielle. Ils sont considérés comme la solution permettant d’assurer l’accès aux soins pour tous, le désengorgement des urgences et le respect des gestes barrières. Bien évidemment, chacun de ces prestataires défend son propre business model, calqué ou non sur les préconisations réglementaires. Tous participent cependant à la gestion de cette première phase de confinement, avec 4,6 millions d’actes de télémédecine recensés à l’aube de l’été.

La nouvelle donne en septembre 2020

L'Histoire prouve que toute crise est porteuse d'innovation et celle-ci ne saurait faire exception. Le premier confinement porte le recours à la téléconsultation à 30% des actes médicaux, et la fin de cette période est marquée par deux tendances contradictoires : le retour dans les cabinets médicaux et le renoncement aux soins. Alors que certains patients sollicitent la consultation physique dès le mois de mai 2020, d’autres renoncent complètement à leur suivi médical. Début novembre 2020, une tribune signée par les sept ordres des professions de santé appelle les Français à se soigner. Les praticiens redoutent en effet une seconde crise sanitaire post-coronavirus, aussi grave et imprévisible que la première. Ils encouragent le recours à la téléconsultation, au télésoin (consultation à distance avec un professionnel paramédical), voire une visite à domicile.

Secteur novateur et nouveau, la télémédecine recense désormais 150 acteurs, selon les sources de l’Agence Numérique en Santé (ANS). Sa légitimité est confortée par un sondage réalisé en octobre dernier pour l’ANS et Le Mag de la santé, précisant que « 64 % des médecins ayant déjà effectué une téléconsultation estiment que cet acte est désormais inscrit dans leurs pratiques ». L’avenir de la télémédecine se dessine au-delà du spectre de la téléconsultation.

Alors que l’INSEE dénombre plus de 220.000 médecins, 660.000 infirmiers ou encore 75.000 pharmaciens, le prochain défi de l'e-santé est de permettre l’organisation des praticiens à l’échelle locale. Rester au plus proche des patients grâce au numérique est un projet porté par le plan national MaSanté 2022. Il préconise le déploiement de 1.000 Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS), pour répondre via la télémédecine, à la demande croissante de soins sans rendez-vous et désengorger les urgences.

Innovante, concurrentielle et agile, la licorne télémédecine œuvre dans le secteur économique le plus sensible : celui de la santé. Si elle ne veut pas se brûler les ailes, elle doit poursuivre son développement sur la voie de l’éthique, pour s’inscrire pleinement dans le système de santé français.

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Guillaume Lesdos Medaviz

Guillaume Lesdos est co-fondateur et président de Medaviz, la société à l'origine de l'outil de téléconsultation éponyme, qui met en relation les médecins et leurs patients à distannce.