Taxe Nutella : de peur de rater des contrats industriels, la France renonce

Paolo Garoscio
Par Paolo Garoscio Modifié le 23 juin 2016 à 7h18
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cc/pixabay - © Economie Matin
98%Malaisie et Indonésie produisent 98 % de l'huile de palme dans le monde.

La taxe Nutella avait provoqué une micro-affaire d'Etat entre la France, qui voulait la mettre en place pour lutter contre l'obésité et contre la déforestation, et les deux pays principaux producteurs d'huile de palme, l'Indonésie et la Malaisie. Votée le 17 mars 2016, elle était quasiment adoptée. Sauf que tout a été chamboulé...

90 euros la tonne ? 900 euros la tonne ? Au final la Taxe Nutella sera de 0 euro

L'Assemblée Nationale avait proposé une taxe "Nutella", appelée ainsi car elle vise l'huile de palme que la pâte à tartiner italienne utilise massivement, de 90 euros la tonne. Un montant raisonnable qui avait déjà créé la polémique en Malaisie et en Indonésie. Le Sénat, lors du passage de la loi sur la Biodiversité, avait augmenté cette taxe à 900 euros la tonne.

Un tel montant n'a pas aidé à calmer les tensions, bien au contraire. Malaisie et Indonésie ont usé de tous leurs moyens de pression et notamment d'une pression sur le plan économique : si la France adoptait la taxe, les deux pays auraient pu aller voir ailleurs concernant des gros contrats. Il faut dire que pour les deux pays, qui représentent à eux seuls 98 % de la production mondiale d'huile de palme, le coût de la taxe Nutella aurait été énorme.

La menace "tu me fais payer, je te ferai payer aussi" semble avoir fonctionné.

L'économie avant l'écologie et la santé

Les arguments et menaces économiques de l'Indonésie et de la Malaisie ont eu raison des arguments liés à l'écologie et à la santé : la production intensive d'huile de palme, censée être multipliée par deux en 2030, a conduit à une déforestation massive dans les deux pays producteurs tandis que l'obésité, liée à la consommation d'aliments sucrés contenant de l'huile de palme, continue d'avancer en France comme dans l'ensemble du monde occidental.

Mais il est évident que face à la perte de contrats industriels, ces arguments ne font pas le poids : "nous légiférons avec le couteau sous la gorge. Le Parlement français fait l'objet d'un chantage" a regretté Delphine Batho, députée socialiste et ancienne ministre de l'Ecologie le 22 juin 2016 après le vote. Un regret d'autant plus fort que le Parlement a cédé purement et simplement.

Les députés ont en effet annulé l'amendement de la taxe Nutella mais on tout de même voté pour un autre amendement. Celui-ci dit que d'ici six mois, soit avant la fin de l'année, les députés devront revoir "le dispositif actuel de taxation des huiles alimentaires, afin notamment de le simplifier et de favoriser les productions dont la durabilité fait l'objet de critères objectif".

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Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint Après son Master de Philosophie, s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio