Pourquoi la Russie craint une intervention militaire en Syrie

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Par JOL Press Publié le 2 septembre 2013 à 14h51

Après deux ans de conflit et alors que l'Occident se prépare à lancer une opération armée en Syrie, la Russie reste plus que jamais ferme sur sa position. Le conflit syrien doit se résoudre par le dialogue et en aucun cas une force étrangère ne doit intervenir par les armes. Mais pour les Russes, tout n'est pas qu'une question de droit international, de nombreux autres intérêts sont en jeu.

La Russie aligne ses forces en Méditerranée orientale. Selon diverses sources militaires citées par l'agence de presse Interfax, jeudi 28 août, et non confirmées par le ministère de la Défense, un navire anti-sous-marins et un croiseur équipé de missiles s'apprêteraient à prendre la route du Moyen Orient.

Les deux bâtiments devraient quitter leur port d'attache dans les jours à venir puisque la situation « nécessite que nous procédions à des ajustements » des forces navales, cite encore l'agence Interfax.

Les leçons irakiennes et libyennes

La Russie semble donc s'engager sur le terrain, et se préparerait à répliquer à une éventuelle intervention armée en Syrie. Un scénario que la fédération redoute pourtant et qu'elle fera tout pour éviter.

Depuis le début de la crise syrienne et chaque fois qu'il a été question d'intervention armée menée par l'Occident, la Russie a tenu le même discours. Sergueï Lavrov, ministre des Affaires étrangères très impliqué dans la résolution politique du conflit syrien, l'a encore rappelé il y a quelques jours, la Russie n'entrera pas dans le bourbier d'une guerre en Syrie.

Car si les Russes ont retenu une leçon, voire deux, ce sont celles de l'Irak et de la Libye. Deux cas de figure différents mais qui se ressemblent en un point : le mandat accordé par l'ONU a été outrepassé par les attaquants. En Irak, le Conseil de sécurité de l'ONU, la France, la Russie et la Chine s'étaient opposés à une intervention armée. Celle-ci a finalement été lancée.

En Libye, la Russie et la Chine ont refusé une opération armée contre le régime de Mouammar Kadhafi mais n'ont pas opposé leur véto à une résolution de l'ONU visant à activer divers moyens pour protéger la population civile libyenne. Finalement, c'est le régime de Mouammar Kadhafi qui a été la cible de cette opération internationale.

Non-ingérence et dialogue politique

Désormais, Russes et Chinois, partisans du principe de non-ingérence dans les affaires internes d'un pays et du règlement des conflits en interne, ne sacrifieront pas leur volonté, quitte à faire de l'excès de jusqu'au-boutisme.

Depuis que la communauté internationale, Russes et Américains en chefs de file, ont tenté d'arbitrer le conflit syrien, Moscou a toujours mis l'accent sur un règlement politique de la crise par le dialogue. Avec difficultés, Sergueï Lavrov et John Kerry, secrétaire d'Etat américain, ont tout fait pour réunir à la table des négociations le régime syrien et l'opposition.

La conférence internationale Genève 2, qui devait conclure ce long processus et définir les termes d'une résolution du conflit dans la paix devait initialement se dérouler au mois de juin dernier. Les événements successifs ont souvent menacé la tenue de cette conférence qui voit désormais son avenir s'assombrir.

Pourtant, la Russie ne désespère pas et aujourd'hui plus que jamais, de concert avec de nombreux pays émergents du globe tels que l'Inde, l'Afrique du Sud ou le Brésil, elle appelle au dialogue raisonnable entre toutes les parties.

Qui sera l'homme fort du Moyen Orient ?

La Russie se veut maîtresse du jeu, dans le Moyen Orient en crise, car dans le conflit syrien, c'est plus qu'un partenariat économique avec la Syrie ou qu'un principe de droit international que Moscou défend.

La Syrie est le théâtre où se joue un véritable concours de puissance dans la région. Et dans ce jeu à quatre mains, les Russes ont des adversaires de choix, qu'il s'agisse de la Turquie, de l'Arabie Saoudite ou du Qatar.

Celui de ces quatre qui sera dans le camp gagnant sera fort d'une légitimité nouvelle au Moyen Orient. C'est ainsi que la Turquie tente depuis deux ans d'engager la communauté internationale à intervenir sur le terrain, et que l'Arabie Saoudite et le Qatar agissent, dans deux camps opposés et dans le silence le plus total, pour soutenir les rébellions armées et parfois islamistes qui sévissent en Syrie.

Après la Syrie, l'Iran ?

Derrière la Syrie, l'Iran veille. Cet axe triangulaire – Syrie, Iran, Hezbollah libanais - qui a si souvent été analysés depuis deux ans serait gravement touché par la chute du régime de Bachar al-Assad.

Et si le régime syrien est condamné, c'est alors l'Iran qu'il faudra désormais défendre. « La chute du régime syrien affaiblirait fortement l'Iran et renforcerait les États-Unis », explique André Filler, maître de conférence à l'université Paris 8 , interrogé par Le Nouvel Observateur.

Ces derniers jours, les président russe et iranien se sont entretenus au téléphone et ont réaffirmé la « nécessité de chercher des voies de règlement politico-diplomatique » au conflit.

La Russie et l'Iran s'accordent à l'heure de la préparation de la guerre, et là encore, les intérêts ne sont pas que diplomatiques. Russes et Iraniens sont de très grands partenaires économiques. Lukoil, le plus grand producteur de pétrole russe, a d'ailleurs récemment annoncé que 25% de sa production serait bientôt transférée en Iran. De quoi animer de nouveau l'intérêt des Russes pour la paix.

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