La multiplication des sanctions économiques américaines, dont l’équipementier chinois Huawei vient à son tour d’être la cible, n’est pas qu’une mauvaise nouvelle pour le commerce et l’économie mondiale : l’économie française en fait aussi largement les frais.
Après avoir multiplié les menaces à l’encontre de ses alliés et de ses entreprises nationales souhaitant travailler avec Huawei, l’administration américaine a franchi à la fin du mois de mai une nouvelle étape dans sa guerre commerciale contre l’équipementier chinois. En annonçant la mise en place d’ici trois mois de mesures d’embargo sur son approvisionnement en semi-conducteurs couverts par la propriété intellectuelle américaine, les Etats-Unis ont ainsi voulu sanctionner la firme chinoise, accusée d’espionnage au profit de Pékin. Derrière les discours, qui n’ont, jusqu’ici, pas fait l’objet de preuves irréfutables, cette nouvelle batterie n’est cependant pas dénuée d’arrières pensées géopolitiques. Dans un contexte de rivalité croissante entre les Etats-Unis et la Chine qui se cristallise notamment autour de la maîtrise des nouvelles technologies, Huawei fait actuellement la course en tête en nombre de brevets déposés pour la 5G. Un leadership technologique sur les réseaux mobiles nouvelle génération que l’administration Trump voit d’un très mauvais œil. Au point que le ministre de la Justice William Barr avait envisagé en février dernier une prise de contrôle directe par les une prise de contrôle directe Etats-Unis des européens Nokia et Ericsson pour contrer la firme chinoise.
1 milliard d’euros de perte pour la France
Comme dans le cas de Huawei, les sanctions économiques prises par l’administration américaine constituent une arme très politique, et l’un des marqueurs du virage protectionniste pris par Washington. Mais leur usage redoublé ne se limite pas aux seuls rivaux commerciaux des Etats-Unis, ou aux seuls pays jugés hostiles. Depuis l’automne dernier, celles-ci visent également la France, qui est pourtant un partenaire commercial de longue date et un allié traditionnel de Washington. Le relèvement des droits de douane de 7,5 milliards de dollars sur une liste de produits européens imposé le 18 octobre devrait ainsi coûter 1 milliard d’euros à la France selon une estimation de la société d’assurance-crédit Euler Hermes. Le manque à gagner sur les exportations « d’avions finis » devrait ainsi atteindre les 530 millions d’euros. Les entreprises viticoles qui exportent vers les Etats-Unis devraient, quant à elles, devraient être affectées à hauteur de 370 millions d’euros, quand les exportateurs de produits laitiers devraient voir leurs recettes amputées de 60 millions d’euros. Une facture salée qui passe mal, en cette période de récession économique. D’autant que celle-ci paraît davantage motivée par le souci de préserver la santé financière de l’avionneur Boeing et des viticulteurs californiens que de garantir l’application équitable des règles du commerce mondial.
Outre l’application de droits de douanes plus élevés, le durcissement des sanctions américaines concourt également à dégrader le climat du commerce mondial, en ralentissant les échanges entre les pays du monde. Un phénomène qui ne peut qu’aggraver la situation de crise provoquée par la pandémie de Covid-19, en fragilisant les économies les plus exposées. A cet égard, la France, dont la balance commerciale a encore accusé un déficit de 59 milliards d’euros en 2019, a tout à craindre d’un nouveau tour de vis américain.