Saga Italia

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Par Stéphane Déo Modifié le 18 septembre 2018 à 9h58
Italie Gouvernement Charlatans Elections
@shutter - © Economie Matin
1,6%Le ministre des Finances italien, Tria, viserait un déficit 2019 de 1,6% du PIB.

L'Etat italien a une dette très importante, mais cet emprunt a été essentiellement financé en domestique, contrairement à la dette espagnole ou grecque qui a été beaucoup financée par l'emprunt extérieur. Et le marché traite l'Italie comme si elle était notée en « high yield ». Explications.

Point de marché : la prime de risque sur l’Italie se normalise, mais n’est pas normale

L’écart de taux des pays de la Zone Euro dépend, bien évidemment de leur notation. Le graphique ci-dessous montre (cf. les points bleus foncés) que la relation est même très étroite.

Sauf, pour l’Italie ! Avec une note de BBB, l’Italie devrait avoir un écart de taux de 140 points de base à l’Allemagne. Elle en a 238, ce qui correspond à un écart de taux pour un BB+ ou un BB. Le marché traite donc l’Italie comme si elle était notée en « high yield ».

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Ce qu’on ne voit pas dans ce graphique c’est qu’il y a quelques semaines, l’écart de taux était tel qu’il correspondait à une note approchant BB-, ce qui était vraiment très préoccupant. A l’heure actuelle, on se rapproche à grand pas de BB+.

On est loin du compte, et des 140 points de base d’un vrai BBB, mais la défiance extrême, et donc l’énorme prime de risque demandée par les marchés, semble se tasser.

Italie (bis) : un budget raisonnable ?

Le ministre des Finances italien, Tria, viserait un déficit 2019 de 1,6% du PIB après 2,3% en 2017 et un chiffre probablement proche de 2,0% pour 2018. Le déficit resterait donc sur sa tendance baissière.

En économie nous disposons de « la théorie des préférences révélées » : au lieu d’écouter ce que disent les intervenants économiques, il faut regarder ce qu’ils font. C’est beaucoup plus pertinent. Nous avons fait une découverte extraordinaire : cette théorie s’applique bien aux politiciens italiens, nous nous sommes rendus compte, à notre extrême surprise, que leurs propos ne correspondent pas toujours à leurs actes.

Oublions les déclarations. Qu’a fait le gouvernement depuis sa prise de pouvoir ?

Les faits : on connait le déficit mensuel de l’Etat Italien en 2017 et en 2018 jusqu’en août (pour être précis : il s’agit du « solde général d’exécution du budget des administrations centrales »). Il y a une petite amélioration du déficit sur les 8 premiers mois de l’année : 2,52 milliards de moins que l’année dernière.

L’interprétation : depuis que le gouvernement actuel a pris le pouvoir il n’y a absolument aucun glissement du déficit. Les comptes sont très bien tenus. On peut avoir ce résultat si et seulement si une volonté politique ferme a été affichée au plus haut niveau. Dit autrement, il y a les propos et déclarations politiques que l’on connait tous, les chiffres eux racontent une histoire beaucoup plus sage.

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La question évidemment : peut-on faire copier-coller pour l’annonce du budget 2019 ? Réponse le 27 septembre.

Italie (suite et fin) : un point positif trop souvent oublié

Les chiffres du commerce extérieur italien publiés hier sont l’occasion de rappeler un aspect souvent oublié : les comptes extérieurs sont robustes. La balance commerciale a dégagé un excédent de 2,7% du PIB sur les 12 derniers mois, la balance courante un excédent de 2,8%.

Bref, après la crise de 2011, l’Italie a rétabli ses comptes extérieurs de manière très agressive.

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Résultat, la position extérieure nette de l’Italie (ce que les italiens doivent au reste du monde moins ce que le reste du monde doit aux italiens) est de seulement -8,5% du PIB. Soit presque rien. En comparaison la France est à -20,9%, l’Espagne à -81,3% et la Grèce … à -139,8%.

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Dit autrement, l’Etat italien a une dette très importante, mais cet emprunt a été essentiellement financé en domestique, contrairement à la dette espagnole ou grecque qui a été beaucoup financée par l’emprunt extérieur.

C’est important pour deux raisons :

  • La dépendance extérieure durant une crise est un facteur majeur de stress. Il est quasi-inexistant en Italie.
  • Si l’Italie venait à faire défaut, le coût serait principalement supporté par l’économie italienne (banques, épargne des retraités, etc…). Ce serait donc totalement contre-productif.

Tutto bene ? Certainement pas ! Mais l’endettement colossal de l’Etat ne doit pas faire oublier d’autres points plus positifs.

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Stéphane Déo est stratégiste chez La Banque Postale Asset Management. Il est diplômé d'HEC, a un DEA en économie à l'Ehess (Ecole des hautes études en sciences sociales) et un doctorat en finances à HEC. Il a effectué des études post-doctorales à l'université de Berkeley (Californie). Après l’OCDE et Goldman Sachs, il travaille chez UBS en 2001 comme économiste puis stratégiste jusqu’en 2015. Il poursuit son expérience chez Empirical Research Partners comme stratégiste actions globales.