Retraites : le mieux serait la moindre des choses

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Par Jean-Luc Ginder Modifié le 24 mars 2023 à 13h33
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@shutter - © Economie Matin
65%65% des Français estiment nécessaire d'épargner pour financer sa retraite.

J’ai très envie de vous parler de la niaque. C’est un terme utilisé pour qualifier l’état d’un individu très motivé, compétitif et combatif, qui possède un entrain supplémentaire par rapport à ses adversaires.

Quel rapport me direz-vous avec le thème des retraites ?

Si vous vous trouvez dans une situation sociale compliquée ou que vous percevez dans votre entourage des personnes fragiles qui souffrent et se résignent, vous pouvez baisser les bras et renoncer persuadé que vous n’arriverez jamais à changer l’ordre des choses. Vous risquez de devenir un résigné réclamant.

Mais vous pouvez aussi changer votre regard et vous dire que votre pensée, votre action servent à quelque chose. Aucun talent particulier n’est requis. Il s’agit juste d ‘accepter de changer sa manière de regarder et de se sentir responsable de sa vie et de l’impact que cela peut avoir sur les autres.

Au delà des croyances, au-delà des difficultés. « Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait. » nous a enseigné Mark Twain. Certains croient que réussir est hors de leur portée. S’ils croyaient enfin que leur réussite dépend de leur obstination, de leur détermination et que leur réussite n’est pas à la jauge d’un jugement extérieur mais qu’elle leur appartient pour trouver leur voie. Notre vie est unique et notre rôle est indispensable. A nous d’en trouver le chemin juste d’abord pour nous et par conséquence, pour les autres.

Nous sommes confrontés aujourd’hui à un débat social qui nous concerne puisqu’il concerne le dernier tiers de notre vie, le débat sur la retraite. Il s’agit d’une proposition de réforme à long terme qui percute une situation de demande de justice sociale à court terme illustrée par le mouvement des Gilets Jaunes. Le politique doit expliquer l’importance d’une mesure à long terme à des Français inquiets pour leur fin de mois. Cela pose un véritable problème.

Les citoyens sont passés du scepticisme à la défiance et opposent de la résistance à ceux qui proposent un progrès qui leur serait salutaire. Lequel d’entre nous s’engagerait dans un projet à long terme s’il n’a pas confiance en ses partenaires ou s’il n’est pas assuré de ses intentions ?

Est-ce que le politique va tenir sa parole sur la valeur du point ? Sera-t-il en situation de pouvoir le faire ? Nombreux sont les indicateurs de difficultés à venir et ces paramètres sont-ils intégrés dans la proposition de la réforme ? La perte de confiance dans la capacité du politique à parler loin est une menace pour nos démocraties et pour nos économies.

L’âge de la retraite a été ramenée à 60 ans, rappelons-nous en 1983 car les ouvriers mouraient quelques semaines après avoir pris leur retraite à 65 ans. Ce fut à cette époque considéré comme intolérable. Aujourd’hui comme on a gagné en France 7 ans d’espérance de vie, ce qui est un grand triomphe, il est normal statistiquement que l’âge de la retraite soit après 60 ans. A moins que l’avancement de l’âge de la retraite n’ait permis aux gens de vivre plus longtemps.

Le rapport réel entre travail et retraire n’est pas implicite comme le souhaite la réforme, pour moi le rapport juste serait 2 mois au travail 1 mois à la retraite.

Cette réforme pose une série de questions.

La réforme a-t-elle du sens ? Je répondrai oui dans son principe même si je ne soutiens sa forme actuelle. Le principe du système à points permettra de suivre ceux qui ont fait leur carrière dans plusieurs entreprises, dans plusieurs métiers. Un élément utile est celui des planchers.

Mais cette réforme proposée est incohérente dans l’esprit du mieux. Il serait souhaitable de clarifier les intentions. La défiance vient de l’idée qu’aujourd’hui en France les riches s’enrichissent et que les pauvres s’appauvrissent. Comment comprendre qu’on envisage de reculer l’âge de la retraite quand dans un même temps le chômage des seniors bat des records ? Comment accepter l’idée qu’il faudra peut-être contracter des assurances pour une retraite complémentaire ? Peut-on épargner avec 1 000 euros par mois ?

Il y a incohérences dans le mélange entre l’équilibre financier qui pose la question de savoir s’il faut rallonger ou repousser l’âge de la retraite qui n’a rien avoir avec la question du système de retraite. On a oublié qu’il faut revaloriser les retraites et les statuts des femmes et des professeurs entre autre. Et donc le système ne se présente cohérent ni financièrement ni intellectuellement.

Donc évidemment comme cela s’inscrit dans un contexte ou tout le monde se rend compte que le système de retraite ne tient pas la route tel qu’il est présenté, il est nécessaire de séparer les problèmes. Mettre d’un côté la durabilité du système des retraites actuel et le problème du système dans son ensemble.

La raison de l’embrasement social actuel a été le sujet des régimes dits spéciaux tout comme la surtaxe des carburants a été celui de la naissance du mouvement des Gilets Jaunes. On doit comprendre qu’il est impératif de recréer la justice sociale.

L’économiste que je suis ne peut pas concevoir l’idée de supprimer des contrats établis. C’est une histoire de respect de la parole donnée.
Un travailleur qui a signé un contrat est en mesure de revendiquer qu’il soit respecté. La conséquence est qu’il faut donner du temps à toute réforme et nous devons nous engager dans un véritable débat de société pour les générations futures.

Nous sommes engagés dans une bataille d’opinion, voire dans un débat qui dépasse le thème des retraites et qui demande à chacun de réfléchir à la société dans laquelle nous voulons vivre. Les gens n’ont pas envie de se sentir menacés par des raisons économiques, les ruptures génèrent de la peur, surtout si elles se présentent dans un contexte économique compliqué pour eux. Les politiques doivent expliquer leur vision du monde, démontrer leurs actions, nommer clairement les gagnants et les perdants, afin de rendre une négociation possible.

Aujourd’hui toute négociation est perdue et la réforme est perdue dans sa forme actuelle.

Avec mon regard d’économiste, j’enrage de voir ce projet si mal préparé et expliqué dans la confusion et surtout si mal équilibré, j’enrage et il est nécessaire de faire une réforme. Rien n’est plus important pour les générations futures qu’un nouveau système de retraite permettant de financer leur avenir. Est-ce un problème de pédagogie ? J’enrage de par ma compétence et je vois qu’en France des milliers de gens sont en colère et en même temps des gens sont en situation de précarité, des gens ont faim et la confiance se perd au fil des déclarations floues, contradictoires, culpabilisantes. La défiance se conjugue avec la résistance dans un climat où on cherche à comprendre qui sera la prochaine victime et où se trouve le leurre.

Nous avons tous besoin de retrouver la confiance.

Dans les pays d’Europe du nord, on peut réformer car les citoyens ont une confiance en leur classe politique que nous en France n’avons pas aujourd’hui. Pourquoi ne pas nous servir de ce qui marche ailleurs, analyser ce qui n’a pas marché et en tirer des conséquences pour nos propres choix ?

On devrait être capable en France de préparer des réformes pour les retraites des futures générations, on devrait donc toujours se demander si la politique que l’on mène sera favorable aux futures générations. On a bien besoin, et tout le monde en est conscient, de rééquilibrer la logique de nos systèmes de retraites.

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Jean-Luc Ginder est économiste et essayiste spécialiste de la macro économie ainsi que de l'économie de l'Energie. Il est l'auteur du livre « Phobiamanagement » mettant en avant les effets de la peur en économie et du livre « Réflexions Economiques » (Éditions Corps et Ame, février 2018).

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