Emmanuel Macron a-t-il été et est-il encore le président du pouvoir d’achat ?

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Par Daniel Moinier Publié le 16 août 2022 à 6h05
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@shutter - © Economie Matin
6,8%Les produits alimentaires ont connu une inflation de 6,8% en juillet 2022 sur un an.

Les sondages de ces dernières années ont placé régulièrement le pouvoir d’achat en tête de liste. C’est certainement l’une des premières préoccupations des Français. Et depuis l’arrivée de l’inflation c’est encore pire, elle arrivée au summum.

Selon un rapport du Trésor, économique, financier et social, qui a pris en compte l’évolution du nombre et de la composition des ménages, le pouvoir d’achat sous le premier quinquennat aurait progressé de 4 à 6%.

L’OFCE confirme en indiquant que la hausse aurait été de 1% par année soit un gain moyen annuel de 334 euros pour une personne seule.

Le président actuel aurait donc fait mieux que François Hollande avec 76 euros et surtout que Nicolas Sarkozy avec moins 15 euros.

C’est toujours compliqué de comparer des périodes très différentes. Ces chiffres en disent peu sur l’effet des politiques économiques développées. Il est difficile pour un gouvernement d’avoir la main sur un pouvoir d’achat qui dépend à la fois des prix et des revenus.

On le voit aujourd’hui avec la crise de l’énergie, les aléas climatiques et la guerre en Ukraine.

En 2008, la crise financière avait développé le chômage partout dans le monde, d’où un affaiblissement des revenus du travail et par ricochet de la baisse du pouvoir d’achat.

Le début du premier mandat de l’actuel président avait commencé par une période de haut cycle avec un pique de croissance un peu général dans le monde, mais aussi des actions menées par lui sous le mandat précédent au poste de financier.

Avec l’arrivée de la crise Covid, la prise rapide de décision à recourir à l’activité partielle, au télétravail à domicile, a permis de maintenir en partie le pouvoir d’achat.

Pour comparer, les économistes et statisticiens sont capables de mesurer les effets des baisses et des hausses des prestations sociales et de taxes sur le niveau de vie. Le Trésor ayant analysé ces mouvements, il en ressort que les 10% les plus pauvres seraient les grands gagnants, avec 4% de niveau de vie sur cinq ans et de 2% pour les plus riches. Tout le monde y gagne, ce n’est pas souvent. Cependant, il est constaté qu’à l’inverse, les impôts des entreprises ont baissé, ce qui signifie que ces gains sont payés par de la dette.

Le nouveau programme mis en place devrait permettre de rembourser la dette par de la croissance et des réformes, notamment celle des retraites.

Qui a profité le plus de cette manne financière ? Selon les calculs d’économistes, les Français les plus modestes auraient gagné 346 euros sur cinq ans, alors que les 10% des plus aisés aurait perçu 1170 euros.

Différents organismes, instituts se sont penchés sur cette question de pouvoir d’achat et chacun conclu à des résultats différents, comme quoi il est très difficile de partir sur de bonnes bases.

Une autre question se pose pour rattraper la perte de pouvoir d’achat, faut-il augmenter les salaires ?

Première réflexion immédiate, tous les économistes le diront : La première incidence presque immédiate, serait l’entretien de la hausse de l’inflation. C’est aussi le cas lorsque les gouvernements compensent par des aides, puisque c’est du pouvoir d’achat supplémentaire qui ne vient pas du salaire mais de prêts donc avec aggravation de l’endettement. A ce sujet, beaucoup de Français, vu les milliards qui sont sortis « du chapeau » pendant la pandémie, pensent qu’il serait possible de continuer ainsi puisqu’il semble qu’il n’y ait plus de limite et plus besoin de rembourser. Il serait donc possible de fabriquer des billets à n’en plus finir, pourquoi se gêner !!!

Ces cinq dernières années, les salaires ont augmenté plus vite que la productivité du travail. Et même si l’on remonte à dix ans, il n’y a pas eu de décrochage général des salaires. Le pouvoir d’achat a globalement augmenté, sauf pour certaines tranches de la population notamment en bas de l’échelle, mais aussi les retraités dont les pensions ont été peu ou même pas revalorisées.

En 2017, il existait un peu plus de deux millions de salariés qui ont vécu en dessous du seuil de pauvreté (soit 60% du revenu médian selon l’observatoire des inégalités) avec des salaires qui ne suffisent pas à sortir de la misère, alors qu’une partie des ménages étant au RSA perçoivent une indemnité nette bien au-delà du Smic, notamment ceux qui ont trois enfants et plus.

La reprise rapide de l’économie d’après Covid, a poussé beaucoup de patrons à vouloir recruter en même temps, ce qui a engendré une forte difficulté à trouver des candidatures. Pourquoi ? Au moins deux raisons : Beaucoup de salariés ayant été à l’arrêt et bénéficiant d’indemnités se sont détachés des contraintes du travail et ont du mal à reprendre le collier. Pour d’autres, en analysant leur situation, ils ne souhaitent plus reprendre un poste avec autant de contraintes notamment dans la restauration et l’hôtellerie mais aussi dans certaines industries.

C’est ainsi que le rapport de force est devenu plus favorable aux demandeurs d’emploi. Les employeurs sont de plus en plus contraints à négocier les salaires à la hausse ou trouver des compensations salariales, primes, indemnités.

Mais le regard s’est tourné aussi et de plus en plus, vers l’état. Même s’il n’a pas directement la main sur les salaires, il dispose de nombreux moyens et leviers pour agir par lois et décrets notamment le « bouton » Smic.

Une solution existe, augmenter le pouvoir d’achat par la hausse du Smic. Avant les élections, on a tout vu, tout entendu. Le plus « exorbitant » Jean-Luc Mélenchon l’annonçait à 1500 euros net. A ce niveau, combien de catégories salariales vont-elles rassembler. Comment vont résister les entreprises employant beaucoup de main d’œuvre dans des branches très concurrentielles ? Car qui dit salaires plus élevés dit charges beaucoup plus lourdes, à moins que le gouvernement n’augmente pas les charges, ce qu’il fait déjà pour les bas salaires en pénalisant lourdement les comptes de la sécurité sociale.

Pour résoudre les conséquences de l’inflation mais aussi celles de la guerre en Ukraine, le gouvernement a prévu des mesures d’urgence pour revaloriser le pouvoir d’achat.

  • Revalorisation des retraites

  • Hausse des minima sociaux

  • Augmentation des salaires des fonctionnaires

  • Remise plus importante sur les carburants

  • Prime de rentrée scolaire

  • Fin de la redevance Télé

  • La monétisation des jours de RTT

Après trois semaines de débats acharnés, le parlement a enfin adopté en première semaine d’août ce paquet législatif avec beaucoup de concessions et de renoncements.

Ces mesures devraient permettre une légère hausse du pouvoir d’achat lors du deuxième semestre 2022 et plus.

Ces « cadeaux » représenteront tout de même 500 millions d’euros.

A la suite de cela, 60 sénateurs ont saisi le Conseil Constitutionnel sur les articles 39, 40 et 41 du projet de loi pouvoir d’achat, qui porte atteinte de façon conjointe au droit de l’Union européenne, à la liberté d’entreprendre et aux exigences constitutionnelles en matière de loi de validation. Il a un mois pour répondre.

Hors ce paquage, les prestations familiales et minima sociaux seront revalorisés (RSA, AAH, ASPA) ainsi que les bourses étudiantes à caractères sociaux.

Autre changement ; la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat Macron exonérée de charges et d’impôts sera triplée passant à 3000 euros, jusqu’à 6000 euros pour les entreprises ayant un dispositif d’intéressement et de participation.

Les fonctionnaires ne sont pas restés à part puisqu’ils bénéficieront d’une augmentation générale de 3,5% de la valeur du point d’indice même si les syndicats voulaient 5%. Coût : 3,7 milliards d’euros.

En plus il ne faut pas oublier la prime de rentrée scolaire de 100 euros par foyer, + 50 euros par enfant à charge.

Pour ceux percevant la prime d’activité, un versement complémentaire sera versé à la rentrée s’ajoutant à la hausse de 4% du 1er juillet.

Par ailleurs 40 millions d’euros ont été votés pour l’aide alimentaire.

Même le ticket restaurant va passer de 19 à 25 euros.

Un soutient également aux ménages modestes par une enveloppe de 230 millions d’euros pour ceux qui sont chauffés au fioul.

Comme prévu, la remise carburant sera portée à 30 centimes en septembre-octobre et – 10 centimes en novembre-décembre.

Le plafond des frais de carburant payés par les entreprises pour leurs salariés sera doublé passant à 400 euros.

Mesure d’exonération fiscale pour la prise en charge des abonnements transports des salariés jusqu’à 50 % du montant.

Collectivités locales, départements, intercommunalités bénéficieront d’aides financières pour compenser les différentes hausses non intégrées. (Prix de l’énergie, point d’indice fonctionnaires, RSA).

Le montant de toutes ces largesses se situerait aux alentour de 55 milliards d’euros !

Il est à remarquer que le gouvernement est devenu très généreux depuis la pandémie et « le quoi qu’il en coûte », comme si l’argent n’avait plus de valeur et que les remboursements n’étaient plus d’actualité !

Personnellement, je reviens encore à une possibilité qui n’est même pas envisagé, c’est l’augmentation des temps travaillés qui n’auraient rien coûté à l’état et au contraire remis en ordre de marche tous les comptes publics.

Une seule loi suffirait : 40 heures pour les salariés du privé représenteraient 14,28% de pouvoir d’achat en plus dès le mois suivant, sans parler des 65 ans qui seront nécessaires. Alors que beaucoup d’aides votées ne sont que ponctuelles engendrant pour beaucoup des déficits, de la dette. Une dette qui va devenir insupportable ayant dépassée allégrement les 100 % faisant de la France l’un des pays les plus endettés d’Europe !!!

www.danielmoinier.com

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Daniel Moinier a travaillé 11 années chez Pechiney International, 16 années en recrutement chez BIS en France et Belgique, puis 28 ans comme chasseur de têtes, dont 17 années à son compte, au sein de son Cabinet D.M.C. Il est aussi l'auteur de six ouvrages, dont "En finir avec ce chômage", "La Crise, une Chance pour la Croissance et le Pouvoir d'achat", "L'Europe et surtout la France, malades de leurs "Vieux"". Et le dernier “Pourquoi la France est en déficit depuis 1975, Analyse-Solutions” chez Edilivre.