Santé: vous payez des honoraires sans le savoir

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Par Patrick Crasnier Publié le 2 mars 2016 à 5h00
Pharmacies Honoraires Dispensation Janvier 2016
@shutter - © Economie Matin
22 %Les honoraires de dispensation ont augmenté de 22% au 1er janvier dernier.

Ce titre doit vous paraître bien étrange, et pourtant, vous payez ces honoraires sans le savoir régulièrement. Il s’agit d’une disposition prise par le ministère de la santé en faveur des pharmaciens, lors de la signature de leur convention de décembre 2014.

Les pharmaciens sont autorisés depuis le premier janvier 2015 à facturer lors de la délivrance de médicament, des honoraires de dispensation. A savoir, pour une boite de médicament la somme de 0,82 euros et de 2,21 euros pour une délivrance de traitement trimestriel. Ces sommes seront bien sur augmentées (c’est déjà fait) au premier Janvier 2016 pour passer à 1,02 euros et 2,76 euros.

De bien étranges honoraires justifiés par les vérifications des ordonnances, des posologies, et les conseils à donner aux patients. Je croyais que ce travail était celui du pharmacien qui, nous disait on, n’est pas un épicier mais un professionnel de santé. Le conseil était, avant cette mesure la base du métier de pharmacien, maintenant c’est « en plus ». Depuis cette nouvelle convention on nous apprend donc que le pharmacien intervient d’abord comme un épicier puis ensuite, s’il le fait vraiment, un professionnel de santé payé en sus de sa vente pour son savoir. Ajoutons pour être complet que des honoraires supplémentaires sont aussi payés si l’ordonnance est « complexe » c’est à dire comporte cinq ou plus de médicaments.

Notons tout d’abord que cette disposition a été passée sous silence, même les médecins qui se sont battus en 2015 contre la loi santé n’y ont vu que du feu. Il serait légitime de se poser la question de ce qui a motivé les pharmaciens et leur principal syndicat à effectuer cette demande, il serait légitime aussi de savoir ce qui a motivé le ministère à l’accepter. Il n’est pas inutile non plus de rappeler à tous ceux qui lisent ces lignes qu’en plus du médicament ils payaient déjà la franchise, maintenant ils payent aussi des honoraires aux pharmaciens. Ces honoraires sont pris en charge par la sécurité sociale et les mutuelles, pour les CMU et les AME c’est comme d’habitude, tout gratuit.

Dans ce grand n’importe quoi de la santé en France, qui consiste à payer le moins cher possible ceux qui consultent, établissent le diagnostic, rédigent l’ordonnance, on constate maintenant que pour délivrer le médicament il faut payer des honoraires. Honoraires dans son sens littéral c’est honorer celui qui a pratiqué son art !!!! Alors honorons les pharmaciens, mais exigeons à chaque passage dans une officine tout d’abord que ce soit celui qui est honoré qui nous serve et pas une vendeuse non diplômée ni une préparatrice qui ne doit pas toucher d’honoraires. Pour les pharmaciens diplômés (seuls à être honorés) vérifions si ceux qui sont les salariés de l’officine touchent ces honoraires sur leur bulletin de salaire.

L’absence de toute information à ce sujet est le résultat du tiers payant, tout gratuit tout le monde s’en fiche. C’est grave car ces sommes obtenues par les pharmaciens s’ajoutent aux nombreux coûts élevés mettant en danger la sécurité sociale. Il apparaît que ces honoraires seraient là pour compenser des « marges diminuées » sur la vente de médicaments. En fait si je comprends bien l’état a eu besoin des pharmaciens pour imposer les génériques (souvent moins efficaces) mais cela a diminué leur chiffre d’affaire. Les génériques étant les moins chers des spécialités (théoriquement mais ce n’est pas toujours vrai) L’ascenseur a été renvoyé en donnant ces « honoraires de dispensation » que l’on pourrait appeler des honoraires de compensation, un retour d’ascenseur du ministère de la santé aux pharmaciens.

Nous patients (nous le sommes tous) connaissant maintenant ces dispositions nous sommes en droit d’exiger dans une pharmacie d’être pris en charge par un pharmacien diplômé, sans quoi pas d’honoraires de dispensation. Nous sommes en droit de vérifier si toutes les conditions sont bien remplies, les conseils sur la posologie, écrire le nom du médicament remplacé par un générique, expliquer pourquoi c’est le même. Du côté des pharmaciens salariés, ils doivent demander avec leurs syndicats, que leurs soient payés ces honoraires sans quoi ils doivent renvoyer vers le propriétaire de la pharmacie (s’il est là) pour les conseils « éclairés »

Pour terminer cet article, il est aussi nécessaire d’aborder le sujet de l’auto médication. Quand un client achète lui-même un médicament sans ordonnance, qui n’est bien sur pas remboursé, il est en droit d’exiger que ces honoraires ne soient as perçus. Pourtant même si le texte de la convention ne parle que des médicaments remboursés, les pharmaciens dans leur ensemble font payer ces « honoraires de dispensation » pour toutes leurs ventes de médicaments. C’est comme cela que si vous achetez une boite de doliprane vous allez la payer selon l’endroit environ 2 euros alors que sans ces honoraires elle ne vaut qu’un euro. Et pour les para pharmacies style Leclerc (on marche sur la tête) que font ils payer ?

Le tout gratuit de Marisol Touraine permet beaucoup d’arnaques, quand ce mois ci les médecins se battent pour essayer d’avoir un prix de consultation décent, on découvre ce système mis en place depuis un an. Pendant que l’état hier nous fait croire que les frais de notaire diminuent grâce à Emmanuel Macron, nous payons des honoraires de dispensation dont l’augmentation au 1er Janvier 2016 a été de 22%.
Dormez braves gens, l’état veille sur vous !

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Patrick Crasnier est diplômé en sciences humaines 3eme cycle en psychopathologie, après de longues années passées en cabinet libéral comme psychanalyste, blessé lors d’un attentat terroriste cesse cette activité en 1995. Continue comme photojournaliste, journaliste radiophonique (activités menées conjointement avec celle de psychanalyste depuis 1983) puis comme journaliste rédacteur au journal Toulousain et à l’écho des entreprises. Actuellement photojournaliste correspondant pour l’agence de presse panoramic et rédacteur dans plusieurs revues.

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