Comment j’ai été viré de la BNP

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Par Gaspard Koenig Modifié le 24 avril 2014 à 7h05

Non, je ne remplirai pas la fiche de “mise à jour des informations personnelles et professionnelles”.

Cela fait quinze ans que je possède, comme sept millions de Français, un compte à la BNP, pourvu d’une somme désespérément stagnante. Il y a quelques mois, une dame se présentant comme “conseillère” a manifesté le désir de “faire ma connaissance”. A la bonne heure, il reste donc de vrais humains derrière le télébanking ! Mais cette nouvelle amie a vite franchi les bornes d’une conversation courtoise en me demandant si j’étais marié. “Vous allez un peu vite en besogne…” me suis-je défendu. Loin de se décourager, elle a égrené sa liste de questions : quelle est mon activité ? mon salaire ? mon loyer ? mon patrimoine ? mes autres comptes éventuels, en France et à l’étranger ? et les prénoms de mes enfants ? Je lui ai poliment fait remarquer que cela ne la regardait pas. N’ayant contracté aucun emprunt, ni ouvert aucun compte d’épargne, je souhaite seulement que ma banque conserve mon argent dans une sécurité d’ailleurs toute relative, et payée fort chère en frais divers.

“C’est la loi”, m’a-t-elle rétorqué. Je devenais soudain suspect. Mais précisément parce que je n’ai rien à me reprocher et que mes transactions bancaires sont tristement quelconques, j’ai décidé de ne pas céder. Non, je ne remplirai pas la fiche de “mise à jour des informations personnelles et professionnelles”. S’en sont suivis l’escalade bureaucratique et les échanges acrimonieux que le lecteur imaginera sans peine, et qui prennent aujourd’hui le chemin d’une “décision de clôture par la banque”.

Hélas, mon interlocutrice ne fait que se conformer aux “obligations de vigilance à l’égard de la clientèle” introduites en 2009 dans le Code monétaire et financier. L’article L561 prévoit bien que, “avant d'entrer en relation d'affaires avec un client, [les banquiers] recueillent les informations relatives à l'objet et à la nature de cette relation et tout autre élément d'information”. Ces dispositions sont dans la logique du Fichier des comptes bancaires et assimilés (Ficoba), qui recense l’ensemble des comptes ouverts et fermés en France, ou de Tracinfo, système par lequel les banques signalent à l’administration fiscale toute activité inhabituelle. Le secret bancaire est aujourd’hui une plaisanterie et les banques sont devenues des administrations para-publiques au service de l’Etat plus que de leurs clients. Nous entrons dans l’ère de la transparence totalitaire, fondée sur le principe vicieux que les citoyens en règle n’ont rien à cacher. Permettez-moi de préférer un fraudeur en liberté à mille innocents fichés.

C’est donc avec soulagement que j’ai appris l’apparition récente de Nickel Banque, qui permet aux exclus du système bancaire traditionnel d’ouvrir un compte “low-cost” en trois minutes dans les bureaux de tabac agréés. Pas de crédit, pas de découverts ; en échange, peu de frais, et aucune question inquisitrice. Je vais y transférer sans état d’âme mes humbles économies, et je vous invite, cher lecteur, à en faire autant. Résistons !

Paru sur lopinion.fr et repris avec l'aimable autorisation de l'auteur.

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Ancien élève de l'Ecole Normale Supérieure, agrégé de philosophie, Gaspard Koenig est Président du think-tank GenerationLibre. Il est également l'ancienne plume de Christine Lagarde.

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