En France, pour l’année 2021, l’INSEE estime qu’il y a eu 10,9 naissances vivantes et 9,7 décès par millier d’habitants. Ces chiffres vont dans le sens d’une légère croissance de la population de notre pays ; ils peuvent donc apparaître réconfortants aux personnes qui s’inquiètent de sa démographie. La comparaison avec notre voisine l’Italie, qui depuis 2015 perd chaque année entre 100 000 et 175 000 habitants, nous est favorable, puisque la France enregistre plus de naissances que de décès.
Une croissance démographique due pour une bonne part à l’immigration
Néanmoins, cet excédent « naturel » a beaucoup décliné depuis quelques décennies : en 1982 le nombre des naissances dépassait celui des décès de plus de 40 %, alors qu’en 2020 et 2021, sa supériorité est réduite à 11 %. La croissance de la population de la France tient actuellement surtout à l’immigration nette, dite « solde migratoire » : tandis que le solde naturel (nombre de naissances vivantes moins nombre de décès) a diminué de 163 000 en 2017 à 81 000 en 2021, le solde migratoire, bien qu’en net recul par rapport à ses 201 000 de l’année 2018, s’établit (chiffre provisoire) à 140 000 par an en 2020.
Des chiffres à manier avec prudence
Compter des habitants peut sembler être une opération simple dans son principe, même si elle comporte des difficultés pratiques. Mais en réalité ce comptage dépend de la méthode utilisée, et il n’existe pas de méthode parfaite. Comment, par exemple, éviter de compter deux fois des personnes qui, ayant deux domiciles, vont figurer sur deux listes différentes ?
Pour essayer de résoudre ce genre de problème, l’INSEE travaille à l’amélioration de ses méthodes d’enquête, et notamment de ses questionnaires. Par exemple, pour le recensement 2019, le chiffre retenu tient compte d’un changement de questionnaire : celui-ci a modifié le résultat, estime l’INSEE, à hauteur de 83 625 habitants. Autrement dit, le nombre d’habitants à une date donnée que retiennent nos statisticiens dépend de toute une « cuisine » méthodologique ; il serait naïf de considérer comme une vérité absolue, ce qui est une estimation dépendant de la technique d’enquête statistique à laquelle l’INSEE a eu recours. Ainsi le chiffrement des mouvements migratoires est-il délicat ; il est susceptible de fournir des résultats différents selon les méthodes d’enquête utilisées.
Une fécondité plutôt réconfortante
Les bilans démographiques 2020 et 2021 qu’a livré l’INSEE(1) ne sont pas mirobolants, mais ils ne sont pas catastrophiques, ce qui est déjà un bon point. Certes, le taux de natalité baisse régulièrement depuis 2013, si bien que l’excédent des naissances sur les décès diminue ; mais 2021 enregistre encore un léger excédent : environ 1,2 pour mille habitants, contre 5 en 1982. Plus précisément, la natalité pour 1000 habitants, qui dépassait 14 pour 1000 en 1982, est tombée aux environs de 11, tandis que la mortalité, après être descendue assez bas au début du troisième millénaire, a remonté un peu, retrouvant son niveau des années 1980.
Des mesures à prendre
Le déclin de la natalité amorcé en 2009 est la cause principale de la détérioration de la situation démographique française. Ce déclin ne s’est guère réduit durant le premier quinquennat d’Emmanuel Macron, si bien que nous ne sommes plus très éloignés du moment où, sauf changement de tendance, la mortalité égalera puis dépassera les naissances. Il serait grand temps de réagir. Cela requiert évidemment un effort budgétaire : trop de ménages restreignent leur projet procréatif parce qu’ils trouvent leurs fins de mois vraiment difficiles. Mais il conviendrait aussi et peut-être surtout d’innover, en changeant radicalement la façon d’attribuer les pensions de retraite.
Du point de vue de l’analyse économique, c’est clair : comme Alfred Sauvy l’a expliqué en son temps, nous préparons nos retraites, au niveau du pays tout entier, en accueillant des bébés en nombre suffisant. Mais quand il s’agit de la législation des retraites, cette lucidité est totalement abandonnée. Nos parlementaires ne semblent pas avoir réalisé qu’il est à la fois injuste et stupide d’attribuer les droits à pension au prorata des cotisations vieillesse. Cotiser pour que les « anciens » aient une vieillesse à l’abri du besoin, c’est la moindre des choses : ils nous ont élevés, entretenus, instruits, nous leur devons bien des pensions correctes. Mais seul un législateur ignorant le B. A. BA du fonctionnement réel des retraites peut adhérer à la fable selon laquelle les cotisations des actifs au profit des retraités préparent les pensions de ceux qui les versent.
Des monstruosités à supprimer
La loi, en la matière, est une monstruosité économique, une monstruosité qui débouche sur la pire des injustices : quand les actifs s’acquittent de ce qu’ils doivent à leurs aînés parce que ceux-ci les ont procréés puis formés, ils remboursent simplement leur dette, mais voilà-t-il pas qu’un législateur ignare a décidé que cela prépare leur future pension ! La France, pays de Descartes, de la rationalité, devrait prendre la tête d’un mouvement de réforme fondamentale des retraites dites « par répartition », qui doivent impérativement être reconnues pour ce qu’elles sont : des retraites par capitalisation humaine, attribuant les droits à pension au prorata de ce que les citoyens font pour préparer réellement l’avenir, à savoir mettre des enfants au monde et les préparer à être de bons travailleurs – des travailleurs qui, le moment venu, prendront en charge leurs retraites.
Le jour où un législateur avisé supprimera les absurdes dispositions qui attribuent les droits à pension en raison du règlement de ce qui est dû aux aînés, et instaurera en leur lieu et place une règle de juste prise en compte de ce qui est fait pour mettre au monde et préparer les futurs travailleurs, l’humanité fera un immense pas en avant !