Malgré la déprime du marché, les cryptopmonnaies survivent et il est improbable que leur valeur retombe à zéro.
Cet été, j’écrivais qu’il me semblait judicieux de rester à l’écart du marché des crypto-actifs. J’appuyais en particulier ma position sur le dernier rapport d’Incrementum. Avec un bitcoin à 6 770 $ au 20 juin, Demelza Kelso Hays confirmait que l’effondrement des cours n’était pas arrivé à son terme.
« Notre analyse technique du krach de janvier 2018 montre qu’une chute brutale jusqu’à 2 500 USD est tout à fait possible », écrivait-elle. L’évolution du cours ne lui a pas donné tort puisque le bitcoin ne cote désormais plus que 3889 $ (2 842 €).
Bitcoin est-il à l’agonie ?
Le 3 janvier dernier à 18h15 GTM, la cryptosphère fêtait les 10 ans du premier bloc de la toute première page du grand registre de Bitcoin. Comme le rappelait alors le Journal du Coin :
« Les 10 ans de Bitcoin, ce sont 556 826 blocs minés sur le réseau, 17 460 300 bitcoins émis [sur un total de 21 millions en 2141, dont autour de quatre millions ont déjà été perdus à jamais], 72 forks du protocole, […] six corrections de plus de la moitié de son prix ».
Dix ans, c’est aussi la durée depuis laquelle la cryptosphère s’amuse à compter le nombre de fois que la presse a annoncé la mort de Bitcoin.
Rien que pour les Etats-Unis, on en est à 345 nécrologies. The Economist, Bloomberg, Wired, CNBC, CNN, Forbes, MarketWatch, tous ont déjà annoncé que la bulle venant d’exploser, Bitcoin serait bientôt mort et enterré, ou allait au mieux rejoindre les tréfonds du dark web que cette fausse monnaie n’aurait jamais dû quitter.
Tous ont oublié que peu importe son cours, tant que de nouveaux blocs seront minés grosso modo toutes les 10 minutes, Bitcoin sera bel et bien vivant, donc susceptible de rebondir.
La raison est double. Tout d’abord, les technologies sous-jacentes à Bitcoin et à ses rejetons ne sont pas figées mais se perfectionnent au fil du temps. Comme dans toute industrie, le développement des crypto-actifs est un processus qui nécessite du temps pour arriver à maturation.
La logique est la même pour l’adoption d’une technologie par le grand public. Souvenons-nous que l’informatique moderne a émergé au milieu des années 1930, lorsque qu’Alan Turing a théorisé l’ordinateur. Or, en France, les premières générations d’« enfants du numérique » (digital natives) ne sont nées que dans les années 1990, et les plus de 50 ans ont souvent encore du mal à maîtriser l’utilisation d’un ordinateur.
Au final, certains commentateurs estiment que les crypto-actifs en sont au même stade d’évolution et d’adoption qu’Internet 1994.
A quand le prochain marché haussier ?
Bitcoin est certes devenu « grand public » mais pour que le marché redevienne haussier, il faut à mon sens que le terrain devienne praticable pour les institutionnels.
Je partage par ailleurs l’avis de Demelza Kelso Hays qui estimait au mois de juin que « nous ne débuterons un nouveau marché haussier qu’une fois que les mains faibles auront été balayées du marché. »
Cela remet-il en cause l’essor des crypto-actifs ? Je ne pense pas.
Vers la tokenisation de l’économie ?
Le cours de Bitcoin sera-t-il toujours au-dessus de 0 € le 3 janvier 2029 ? Comme vous le savez, il existe à peu près autant d’arguments permettant de soutenir que ce sera le cas que d’arguments permettant de défendre le contraire.
Quoi qu’il en soit de l’avenir de Bitcoin, il est à peu près certain que les crypto-actifs en tant que classe d’actifs, qu’il s’agisse de currency tokens, de platform tokens, d’application tokens ou encore d’asset tokens (jetons de titres), sont parties pour durer.
Prenons par exemple le secteur de l’immobilier.
Pour des raisons en particulier juridiques, les transactions réalisées en cryptomonnaies restent des phénomènes marginaux. La volatilité du bitcoin n’est cependant plus un frein pour les professionnels depuis qu’il existe des solutions leur permettant de convertir instantanément en devises à cours légal un paiement réalisé en bitcoins, neutralisant ainsi le risque de change.
L’émergence du règlement des loyers en cryptomonnaies est un phénomène plus tangible. Un site comme cryptocribs.com propose par exemple depuis août 2017 aux bailleurs de tous les pays de mettre leurs biens en location avec un règlement possible dans cinq devises et dans quatre crypto-monnaies.
Le blogger H16 fait le commentaire suivant au sujet de ce Airbnb branché cryptomonnaies :
« Même s’il est évidemment fortement recommandé de bien remplir les obligations fiscales liées à ces locations, on se demande comment, si le principe remporte du succès, l’État va bien pouvoir contrôler tout ceci tant les transactions basées sur les cryptomonnaies peuvent se faire évasives. »
Enfin, sans attendre que les gouvernements passent la deuxième vitesse pour enregistrer les transactions immobilières sur leur registre foncier ou cadastre au moyen de la blockchain, des startups comme LAToken travaillent à révolutionner la façon d’investir et de posséder les actifs patrimoniaux, y compris immobiliers, en tokenisant la finance.
Nous n’en sommes bien sûr encore qu’à l’émergence des security tokens, mais ces jetons liés à des actifs réels (actions, obligations, immobilier, or… tout est envisageable) et qui permettent d’en garantir l’authenticité et la traçabilité, ainsi que le respect des droits afférents (intérêts, dividendes…), tout cela sans intermédiaire, semblent parfaitement taillés pour l’ère numérique.
Ledger elle-même surfe sur cette tendance depuis 2018, avec la signature en octobre d’un contrat avec Engie sur la tokenisation de l’énergie verte.
Comme l’explique La Tribune, il s’agira « d’équiper de boîtiers les compteurs d’éoliennes ou de barrages pour qu’ils produisent un token certifiant l’origine de cette énergie renouvelable, token pouvant ensuite être vendu sur les marchés. » Une nouvelle activité qui devrait « représenter une part très importante » du chiffre d’affaires de la société « d’ici trois-cinq ans ».
Autant dire que nous n’avons pas fini de parler des crypto-actifs.
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