Aujourd’hui si vous voulez investir en bourse, le premier paramètre à prendre en compte est la politique. L’automobile est un cas exemplaire en Europe.
Aujourd’hui, je voudrais vous parler de l’automobile et de l’écologie.
L’appareil politique a poussé les gens à acheter des moteurs diesel à partir des années 1980 à coup de taxation. Les véhicules légers représentaient alors seulement 4% du parc automobile. Mais le diesel était meilleur marché que l’essence.
Citroën, Peugeot et Renault se mettent alors au travail pour offrir des moteurs diesel performants et développent une technologie à injection. Ils font un argument commercial de l’économie de carburant ainsi réalisée par leurs clients.
Pour soutenir ses constructeurs nationaux, l’État français en remet une couche par une politique de subventions : déduction de TVA, baisse de la TIPP (taxe sur les importations de produits pétrolier), système de bonus-malus écologique.
Au début des années 2000, 33% des véhicules légers roulent au gazole et en 2011, cette proportion passe à 73%. Le diesel – qui émet des particules fines – est considéré comme propre car les moteurs thermiques émettent moins de CO2.
Retour de manivelle du moteur politique taxation-subvention
En 2013, le vent tourne. La Cour des comptes calcule qu’en 2011 la faible taxation du diesel a conduit à une « perte fiscale » de 7 Mds€. En outre, la concurrence s’est elle aussi mise au diesel et les constructeurs français ne sont plus les rois de la jungle dans ce domaine. Les particules fines des moteurs diesel sont classées « cancérogènes certains » par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), antenne de organe de l’OMS et connu pour son fiasco dans l’évaluation des risques des pesticides :
« Etant donnés les impacts additionnels pour la santé des particules diesel, l’exposition à ce mélange chimique doit être réduite dans le monde entier. »
Dr Christophe Pontier, président de la commission d’étude du CIRC.
Désormais, le balancier reprend vivement sa course dans le sens inverse. Le diesel, c’est mal et ses adeptes seront punis. Le CO2 et l’essence, c’est mal, les particules fines et le diesel, c’est mal aussi. Les taxations seront donc alignées par le haut.
En novembre 2018, les ronds-points s’emplissent de gilets jaunes en révolte fiscale. Les actions du secteur automobile accusent le coup.
Au salon de l’automobile de Genève, début mars, Carlos Tavares (*), président du directoire de PSA, jette un pavé dans la mare.Le lobby écologique européen a réussi à faire imposer par le parlement de Strasbourg un objectif de réduction d’émission de CO2 de 40% là où le lobby des constructeurs automobiles préférait 20% avec amendes à la clé pour ceux qui ne respecteraient pas le seuil.
« Depuis deux mois, l’industrie automobile européenne a annoncé la suppression de plus de 20 000 postes. La volonté d’imposer la correction de trajectoire de l’industrie a parfaitement réussi ! Veut-on aller plus loin encore? Très bien ! Les entreprises s’adapteront. Mais cela met en risque les 13 millions de personnes qui travaillent dans notre industrie et cela déstabilisera très certainement nos sociétés européennes.
La Commission européenne n’a jamais donné le moindre signe de vouloir engager une discussion constructive. L’Union européenne nous a totalement ignorés. Elle était elle-même ulcérée par l’affront de la tricherie d’un constructeur, ce qui l’a conduite à faire l’amalgame avec tout le secteur. Le vote du Parlement européen est un vote contre l’industrie européenne. C’est une revanche. […]
Nous vivons un moment où personne n’écoute personne, où personne n’a confiance en personne. Les citoyens se méfient des politiques, les politiques se méfient des entreprises, les entreprises se méfient des politiques… Cette méfiance de tous, c’est le fondement de la décadence de l’Europe. »
Comment rattraper la bavure, réfléchit l’appareil politique … Une solution interventionniste lumineuse s’impose : créons un champion, un Airbus des batteries !
« De grands acteurs comme Bosch ont regardé le dossier et considéré que ce n’était pas rentable. Nous avons étudié le sujet. Le capital initial nécessaire est colossal. »
En effet, s’il faut moins de particules fines et moins de CO2, l’avenir est au moteur électrique. Problème, c’est l’Asie le champion des batteries, et c’est la batterie l’élément à valeur ajoutée d’un véhicule électrique.
Comment être cinq fois perdant
Récapitulons à ce stade notre petite histoire du jour.
En tant que contribuable vous êtes perdant à cinq titres.
- Vous avez été taxé pour rouler à l’essence quand il fallait du diesel.
- Puis, passé au diesel, vous êtes taxé car les fiscalités du gazole et de l’essence sont alignées par le haut.
- Vous regardez d’un œil songeur votre facture d’électricité qui s’envole elle aussi sous l’effet de multiples taxes et de la promotion des énergies vertes. Dans ce contexte, acheter un véhicule électrique très coûteux et dont l’autonomie reste encore faible paraît peu alléchant. Car les 414 Mds€ de recettes fiscales sur les carburants encaissés par les Etats européens devront être compensés par quelque chose.
- Du fait de la « casse sociale » prévisible, les charges et impôts liés au chômage vont augmenter.
- La constitution de l’Airbus des batteries devrait se faire à grand renfort d’argent public, donc le nôtre.
En tant qu’investisseur, vous devez considérer que le secteur automobile européen va probablement être sinistré par cet interventionnisme et ce constructivisme. Au passage, remarquons que les constructeurs vendent leurs véhicules neufs majoritairement à crédit, les employés n’ayant pas les moyens de s’acheter comptant ce qu’ils produisent.
Quelle déchéance par rapport au capitalisme de Ford qui voulait que ses ouvriers puissent acheter son mythique Model T !
(*) citations extraites d’un interview du Figaro
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