L’audit souligne aussi l’importance des contraintes traditionnelles liées à la hiérarchie. Les membres d’équipage, particulièrement sur les Boeing 744 et 777 et sur les Airbus A330, sont supposés développer leur relationnel avec le commandant de bord lors des pauses. Cela inclut l’obligation de consommer de l’alcool avec lui, même s’ils n’en ont pas envie, ainsi que l’achat et la préparation de repas et l’achat, sur sollicitation, de "cadeaux" pour lui.
Cela provoque un ressentiment considérable de la part des membres d’équipage. Le ressentiment est un facteur substantiel de rupture de la communication à bord et est évidemment un obstacle à toute forme de développement de la synergie dans le cockpit. Toute protestation contre de telles exigences a un effet destructeur sur la carrière des membres d’équipage.
L’audit avait aussi relevé l’impossibilité d’exprimer des suggestions au sein de l’organisation, les condamnations systématiques en cas d’erreur, les carrières fondées sur les relations et non le mérite, enfin le cloisonnement des activités dans le cockpit, notamment l’absence de contrôles croisés (cross-checking) et de suivis en arrière-plan du pilote aux commandes par le ou les autres membres de l’équipage (monitoring).
Des facteurs culturels et organisationnels tels que la tradition asiatique, l’origine militaire du personnel et la nature patriarcale de l’entreprise expliquent tous ces dysfonctionnements. Au début des années 2000, Korean Air, traumatisée, a pris un virage à 180°. Sous l’impulsion du fils du fondateur, formé aux États-Unis, et d’un directeur général des opérations américain, elle a modernisé radicalement son fonctionnement humain sur la base des standards des meilleures compagnies aériennes mondiales : formation aux facteurs humains, promotion au mérite, priorité aux communications, principe de nonpunition des erreurs, corrections systématiques des déviations par rapport aux procédures.
Aujourd’hui, Korean Air est classée dans le groupe des compagnies aériennes les plus sûres par l’organisme indépendant de notation Securvol. Elle compte parmi les membres fondateurs, en 2000, de l’alliance Skyteam.