Après la manifestation du 14 juin, l’évolution probable de la loi Travail devrait alerter les entreprises de moins de 10 salariés. Selon toute vraisemblance, en effet, le gouvernement devrait lâcher des concessions qui sont celles de tous les dangers.
Quelles concessions pour la loi Travail?
La journée du 14 juin n’est ni un succès ni un véritable échec pour les syndicats. En revanche, il est évident que Philippe Martinez a besoin d’une bonne raison pour arrêter les grèves et les manifestations. Le gouvernement annoncera probablement vendredi une modification de l’article 2 du texte pour que chacun « sorte gagnant » de la confrontation. Les uns clameront avoir fait fléchir le gouvernement, les autres expliqueront qu’ils sont restés droits dans leurs bottes.
La solution devrait consister à introduire un mécanisme de veto des branches sur les accords d’entreprise. L’article 2 resterait donc en place, mais avec une possibilité d’interdire, par l’intervention des branches, la signature d’un accord d’entreprise qui serait jugé trop audacieux.
Pourquoi est-ce un danger pour les PME ?
Ce droit de veto des branches sur les accords d’entreprise constitue un danger important pour les PME. En effet, celles-ci ont peu le loisir d’être représentées dans les branches. Elle seront donc soumises à une décision extérieures à elles, sur laquelle elles pourront peu peser, et surtout qui seront téléguidées par leurs plus importants concurrents du secteur.
Les branches sont généralement « colonisées » par les plus grandes entreprises du secteur, parce que ce sont elles qui ont les moyens de déléguer des représentants pour y siéger.
Autrement dit, le nouvel article 2 donnera la possibilité à des concurrents de se censurer entre eux, ou plus simplement à une grande entreprise d’empêcher ses petits concurrents de disposer des mêmes avantages qu’elle.
Pourquoi est-ce un danger pour les TPE?
Pour les TPE, la situation sera pire, puisque seules les entreprises disposant d’institutions représentatives du personnel pourront négocier des accords dérogeant à la branche. Pour les grandes entreprises, la tentation sera forte d’étrangler les « petits » en fixant des normes sociales élevées, coûteuses, et en se réservant la possibilité de négocier un accord d’entreprise dérogeant fortement à ces normes.
L’article 2 se transformera donc en Eau de Javel pour les petites entreprises.
La loi Travail, une rupture d’égalité entre les entreprises
Le dispositif que le gouvernement s’apprête à mettre en place devrait donc introduire de profondes ruptures d’égalité et d’importantes distorsions de concurrence entre les grandes et les petites entreprises.
Cette perspective pose le problème de fond: la loi Travail est-elle contraire à la liberté d’entreprendre? Paradoxalement…
Article écrit par Eric Verhaeghe pour son blog