Loi travail : les articles dont personne ne parle

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Par Patrick Crasnier Publié le 25 mars 2016 à 5h00

Alors que cette semaine est encore une fois endeuillée par de terribles attentats chez nos voisins et amis belges. Pendant que nos ministres en appellent a un renforcement de la surveillance policière et militaire faisant monter l’état d’urgence à niveau supérieur (je croyais qu’il était au maximum).

Aujourd’hui jeudi 24 Mars, dans toutes les villes de France on autorise les manifestations de lycéens et d’étudiants contre la loi sur le travail. Nos policiers on sans aucun doute autre chose à faire que de faire garderie scolaire, mais le gouvernement a très peur d’interdire ces manifestations de gauche.

La loi appelée peut être a tord loi « El Khomri » sera présentée au conseil des ministres de ce jour, nous connaissons depuis plusieurs semaine les articles principaux de ce texte, mais qu’en est-il des articles passés sous silence ou presque par les syndicats. Il s’agit en particulier de l’article six du chapitre premier dans sa section 1 qui dit :

La liberté du salarié de manifester ses convictions, y compris religieuses, ne peut connaître de restrictions que si elles sont justifiées par l’exercice d’autres libertés et droits fondamentaux ou par les nécessités du bon fonctionnement de l’entreprise et si elles sont proportionnées au but recherché.

Analysons tout d’abord cet article, il existait déjà dans l’ancien code du travail, les seules choses ajoutées, c’est énorme, ce sont les termes « y compris religieuse » qui n’y figuraient pas auparavant. Une grande habitude des textes législatifs ou administratifs de changer un seul mot d’un article pour en changer totalement le sens. Ici nous avons à faire ni plus ni moins qu’à une atteinte directe a la laïcité dans l’entreprise. Plusieurs députés ont posé la question sur ce sujet à l’assemblée, des sénateurs aussi lors de leurs réunions, la ministre du travail a toujours répondu en changeant de sujet ou en « bottant en touche » comme on dit dans notre ovalie.

Ce texte a ému beaucoup de monde, sauf les syndicats, on pourrait se demander pourquoi ? La raison en est simple, les atteintes à la laïcité sont légion dans nos entreprises depuis longtemps, aujourd’hui personne ne sait par quel bout les prendre, il n’est pas de bon ton d’en parler. Si les réactions sont fermes de la part de l’encadrement on traite l’entreprise de fasciste, d’extrême droite et de tous les noms réservés à ceux qui voudraient être vigilants. Les insultes ne se comptent plus et même les plaintes pour « islamophobie » car nous sommes toujours confrontés aux même communautés pour ce sujet. Alors l’état dans sa grande sagesse casse le thermomètre avec cet article plutôt que de soigner la température qui ne fait que monter. Après on nous expliquera que les Belges sont laxistes et communautaristes !

Autre texte passé sous silence ou presque : Dans la section 5 du même chapitre 5 articles modifiant totalement le fonctionnement de la médecine du travail.

En ce qui concerne ce chapitre sur la médecine du travail, le texte de la nouvelle loi est grave, il met en danger la santé au travail et même plus largement la santé tout court. La médecine du travail a été inventée pour être une prévention des maladies, professionnelles bien sur, mais aussi au-delà. Nombre de personnes à l’époque qui n’allaient pas chez un médecin étalent vues régulièrement par cette « visite médicale au travail » Aujourd’hui beaucoup de personnes, en particulier des jeunes, ne voient plus le médecin pour de multiples raisons. La visite médicale d’embauche au travail et les visites régulières dans les centres de médecine du travail palliaient à cette absence de contrôle médical des populations.

Les articles du texte de loi El Khomri sur ce sujet sont clairs, plus de visite médicale d’embauche, plus de suivi médical sauf pour les populations considérées comme « à risque professionnel » Une mise à l’arrêt de ce système de prévention médicale irremplaçable. Ce projet de loi ne permettra plus aux médecins du travail de témoigner de ce qui se passe sur les lieux de travail. Là encore les médecins sont considérés par le patronat comme des gêneurs, des empêcheurs de travailler, des « pointilleux » toujours tournés vers le salarié. Alors s’en est terminé, encore un thermomètre de cassé !

Pire ce texte de loi crée des catégories dans le personnel, l’encadrement et le tertiaire ne bénéficieront plus de la médecine du travail. Eux qui, aux dires des patrons, étaient toujours à se plaindre de burn-out, de harcèlement, et qui n’avaient que les médecins pour les écouter. L’ensemble des actions organisées pour détecter et empêcher les « risque psycho-sociaux » se voit annulée par ce texte de loi.

La mise en place d’un système de suivi organisé sous l’emprise des directions patronales, les seules dans ce texte, habilitées à organiser un contact entre le médecin et le salariés tous les 5 ans, comme le prévoit le rapport Issindou (rapport sur lequel s’appuie le gouvernement pour cette loi) Un moyen d’empêcher les salariés d’accéder à la médecine du travail, un moyen de ne plus détecter les risques psychosociaux, pour lesquels depuis plus de 10 ans les médecins se battent, un moyen de ne plus prendre en compte les nouvelles substance toxiques et leurs effets nocifs (nanomatériaux, pesticides, rayonnements etc.)

L’explication donnée par la ministre, quand on la questionne sur ce sujet (rarement) : la médecine du travail est en grande difficulté du fait du manque de médecins, les moyens sont limités, alors on limite la médecine. Une façon de résoudre un problème par l’absurde du style « il n’y a pas assez de médecins alors supprimons la médecine » Parallèlement l’état fait participer le ministère de la santé publique en limitant les formations de médecins du travail (il n’y en a pas assez alors on en forme moins !) Par exemple 94 médecins avaient postulés sur Paris pour devenir médecins du travail, seuls 21 ont été retenus avec de très mauvais prétextes.

Ces deux articles du projet de loi présenté aujourd’hui aux ministres ne seront pas commentés dans les manifestations, ou très peu. Il est quand même important de souligner leur dangerosité, en espérant que les députés seront vigilants sur ces sujets.

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Patrick Crasnier est diplômé en sciences humaines 3eme cycle en psychopathologie, après de longues années passées en cabinet libéral comme psychanalyste, blessé lors d’un attentat terroriste cesse cette activité en 1995. Continue comme photojournaliste, journaliste radiophonique (activités menées conjointement avec celle de psychanalyste depuis 1983) puis comme journaliste rédacteur au journal Toulousain et à l’écho des entreprises. Actuellement photojournaliste correspondant pour l’agence de presse panoramic et rédacteur dans plusieurs revues.

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