L’art subtil de l’évaluation de la gouvernance

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Par Sarah Merlino Modifié le 6 octobre 2021 à 15h17
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@shutter - © Economie Matin

Depuis le 10 mars 2021 et l’entrée en vigueur du texte européen connu sous l’acronyme de SFDR, les acteurs financiers se sont vu imposer de nouvelles règles de transparence, au profit des investisseurs soucieux des critères « Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance. »

Mais, s’il est vrai que calculer l’impact environnemental d’une entreprise est compliqué, mesurer la qualité de sa « gouvernance » est un art subtil, et dont les agences de notations, notamment américaines, se sont emparées. Elles ont été les premières à connaitre les exigences des politiques ESG et, si les Européens s’activent désormais sur le sujet, c’est que leur impact va grandissant sur les politiques d’investissement et les cours de Bourses.

En quelques années, principalement avec la prise de conscience climatique, « l’ ESG » est devenu un enjeu stratégique.

Faire à tout prix bonne figure auprès des agences, pousse certains à pratiquer une écologie de façade, connue sous le nom de green-washing, repeindre en vert ce qui ne l’est pas. Les mêmes causes produisant souvent les mêmes effets, les considérations de bonne gouvernance, et l’évaluation des risques liés pour les entreprises sont également devenues pour les dirigeants eux-mêmes d’une cruciale importance. En effet, le risque de mauvaise gouvernance inclut notamment la corruption et l’abus de bien sociaux : des infractions pénales qui ont démontré qu’elles pouvaient provoquer la chute de managers installés et puissants. Et la crise sanitaire qui secoue le monde depuis si longtemps a rappelé à tous que si le pire n’est jamais certain, il est bon de chercher à s’en prémunir.

Plus de risques de nouvelle nature : l’imprévisible change constamment de visages. D’après Shanil Williams directeur mondial des lignes financières d’AGCS, on « observe une augmentation des actions en justice à l'encontre des mandataires sociaux en raison de « mauvaises nouvelles » qui ne sont pas nécessairement liées aux résultats financiers ». Et qui dit « augmentation des actions judiciaires », dit augmentation des indemnités versées.

Si l’activisme actionnarial, notamment américain, a apporté plus de transparence aux investisseurs, son développement en Europe amène les entreprises à faire face à des questions de gouvernance jusque-à réservées au feutré.

Sur le grill des réseaux sociaux, des mouvements comme #Metoo ou #balancetastartup ont démontré leur puissance, parfois salvatrice, toujours déstabilisante, y compris sur les cours. Le « Bad buzz » et son effet boule de neige sont devenus des impondérables qui peuvent ruiner, au sens propre, toutes entreprises qui n’accordent pas une attention constante à la qualité de la gouvernance. Pourtant, cet aspect des stratégies ESG est toujours l’angle mort des évaluations.

Comment mesurer, aussi objectivement que possible, ce qu’est une « bonne politique » ? Bien sûr, fraudes et abus divers rentrent évidemment dans la classification, mais aucun standard - permettant cohérence dans le temps et comparaisons - ne s’est imposé mondialement. Par exemple, l’initiative de l’AMF a pour objectif d’éviter « l’ISG washing ». Elle classifie la gestion ISR des fonds en trois types : significativement engagée, non significativement engageante et en dehors des standards. Elle impose qu’au moins 90% des émetteurs constitutifs du portefeuille soient notés de façon ESG et que le taux de sélectivité soit, a minima, de 20%.

Parallèlement, la directive européenne dite « Disclosure » va commencer à être appliquée à compter du 10 mars prochain. Elle vise à établir des règles harmonisées pour les acteurs des marchés financiers en termes de durabilité et à introduire « la nouvelle notion de « double matérialité » : le risque de durabilité, soit un évènement ESG qui a une incidence négative sur la valeur financière de l’investissement et les incidences négatives des décisions d’investissement sur les facteurs de durabilité ».

Mais, à mesure que s’imposent de nouvelles règles ESG plus drastiques, de nouvelles revendications apparaissent qui challengent les gouvernances : place accordée aux femmes ou aux minorités. La recherche de l’harmonisation des critères d’évaluation « sonne comme une bonne affaire, mais mesurer les performances dans ce domaine demeure très délicat, d’après Steve Waygood Chef investisseur chez Aviva Investors.

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Journaliste Grand reporter