Face à l’uberisation des métiers, les nouvelles plateformes d’intérim digital se présentent en chevaliers blancs du droit du travail. Elles assurent vouloir apporter humanité et protection dans un secteur peu réputé pour ces qualités. Afin de porter leurs idéaux, un nouveau syndicat a vu le jour mi-avril : l’UPNE (Union des Plateformes Numériques de l’Emploi).
Elles ont à peine cinq ans et veulent déjà révolutionner le monde du travail. Avec la création de l’UPNE, trois start-up de l’intérim digital (Gojob, Side, MisterTemp) et une plateforme de freelances (Comet) veulent « porter la voix des pure players du marché du travail pour un travail socialement responsable » explique Gaspard Schmitt, co-fondateur de Side, au travers d’un dialogue avec le gouvernement et les parlementaires. Un dialogue déjà commencé notamment avec la Direction Générale du Travail (DGT) avec laquelle « les relations sont excellentes » affirme Pascal Lorne, président de l’UPNE et fondateur de Gojob : « Avec la DGT, nous prônons un recours à des contrats de travail prenant en compte la mutuelle, la retraite, la maladie et le chômage. Nous luttons contre l’esclavagisme moderne d’ultra précarisation ». Apporter un statut de salarié flexible, tel est l’objectif de ces nouveaux acteurs de l’intérim.
Un discours relayé par des méthodes mélangeant digital et humain : « Nous mettons les souhaits des candidats au cœur de la relation avec nous. Les autres sont dans l’abattage. Nous sommes dans le sur-mesure » assure M. Schmitt. « Nous réinvestissons les charges économisées dans l’humain pour être proche de nos Gojobeurs » relaye Pascal Lorne, dont le partenariat avec l’école polytechnique a fait naître Aglaë, intelligence artificielle au service des salariés. En gommant les biais humains, la machine permet aux recruteurs de trouver en quelques secondes des listes de profils de manière objective assure-t-on en interne. Et pour les candidats, l’IA « apporte la garantie qu’ils seront traités de manière équitable », sans mettre de côté l’aspect humain : « J’ai tiré de mon expérience professionnelle certaines leçons. Il faut bien s’entourer et rester proche du terrain. Chez Gojob, chaque semaine, nous appelons tous nos intérimaires pour prendre des nouvelles. Nous regardons leurs projets et nous mettons leurs souhaits au cœur de notre relation ». Pas de boutique, pas de rendez-vous physique, mais le dirigeant l’assure : « On est plus proche de nos clients que ceux qui les reçoivent à la va-vite en face-face ». Chez Side, même discours : « Par rapport à l’intérim traditionnel, nous donnons de l’autonomie aux entreprises et aux candidats grâce à la plateforme en ligne et l’application mobile permettant de réaliser toutes les actions administratives 7 j/7 et 24h/24. Quant à l’aspect humain, on a toujours un recruteur qui s’occupe d’une mission et d’un intérimaire ». Pas question de laisser ses ouailles errer en terre inconnue. L’accompagnement, l’encadrement et la protection sont les maîtres mots.
« C’est un marché de 25 milliards d’euros en France. Nous ferons 100 millions cette année. On pèse 0,04% du marché, on est des microbes. Notre ambition n’est pas de devenir numéro un en Europe. Nous souhaitons réduire le chômage, faire bouger les choses » souligne le patron de Gojob. « Je me suis donné une mission : donner de la fraternité au travers du travail. Il y a 12% de chômeurs en France et plus d’un million de postes à pourvoir. Le problème vient du manque de confiance des entreprises envers les salariés et du manque de confiance des candidats vis-à-vis d’eux-mêmes ».
L’UPNE souhaite donc assainir un marché parfois qualifié de « far-west ». Si ce syndicat ne compte que quatre membres à ce jour, il veut s’ouvrir à tous ceux partageant les mêmes valeurs, avec l’appui de Prism’Emploi, l’organisation professionnelle regroupant plus de 600 entreprises de travail temporaire et leurs agences d'emploi : « Nous sommes vigilants aux dérives de certaines plateformes qui ont développé un système d’intermédiation « sans filet » en s’adressant à des micro-entrepreneurs et leur proposant des missions qui devraient relever du statut de salarié. Ce système repose sur le dumping social et économique ainsi que sur le dévoiement du statut de micro-entrepreneur, avec un manque de protection sociale et des risques en termes de sécurité et de santé pour les travailleurs ».
Pas de doute, la révolution du travail est en marche.