L’intelligence artificielle va plus créer des emplois qu’en détruire

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Par Anton Grashion Publié le 26 septembre 2018 à 5h00
Intelligence Artificielle Secteur Emplois
@shutter - © Economie Matin
1950L'intelligence artificielle est théorisée en 1950 par Alan Turing.

L’intelligence artificielle n’a pas vocation à remplacer les salariés. Elle sert à démultiplier l’efficacité d’une entreprise, notamment en facilitant le travail de ses collaborateurs.

En matière de cybersécurité, par exemple, les antivirus et firewall que chacun utilisait jusque-là ne savaient pas bien distinguer les fausses alertes des vraies attaques. Si bien qu’un récent rapport du cabinet ESG estime que plus de la moitié des équipes de sécurité informatique a pris pour habitude d’ignorer certaines alertes, alors qu’au moins un tiers de celles-ci sont véritablement importantes. En conséquence, ils laissent leurs systèmes d’information à la merci de malwares que personne ne détectera avant des mois si ce n’est des années.

L’intelligence artificielle, en revanche, met dans les solutions de sécurité informatique des modèles prédictifs, qui éliminent les bruits de fond et n’alertent les équipes de sécurité que sur les problèmes qui risquent véritablement de compromettre leurs systèmes d’information. Il n’y a alors plus de raison d’ignorer certaines informations et moins d’attaques passeront inaperçues. Les équipes de sécurité deviennent plus efficaces.

Cet exemple concernant la cybersécurité n’est pas anodin : ce milieu souffre justement d’une pénurie de professionnels avec un œil suffisamment aguerri pour discerner les fausses alertes des vrais dangers. En baissant le niveau de qualification exigée, l’intelligence artificielle contribue donc à trouver plus facilement de la main d’œuvre.

Les cas d’usage de l’intelligence artificielle en entreprise sont bien d’augmenter les bénéfices en réduisant les frais. Mais il ne s’agit pas de réduire la masse salariale, il s’agit d’améliorer les services pour les rendre plus rentables. Toute entreprise est aujourd’hui susceptible d’utiliser l’intelligence artificielle pour gagner en rentabilité dans ses activités ; certaines s’en servent déjà pour détecter le moment le plus opportun pour lancer une campagne marketing, d’autres pour économiser leurs dépenses énergétiques, etc.

C’est la capacité de l’intelligence artificielle à donner du sens à de grandes quantités de données qui est la clé de sa capacité à adresser des problématiques métier très diverses. Les premières entreprises à en avoir bénéficié ont d’ailleurs été celles des secteurs de la grande distribution et de la finance, car celles-ci ont accès au plus grand nombre de données transactionnelles et ont un intérêt économique direct à les analyser pour les exploiter.

En tout état de cause, la composante économique est liée à l’amélioration des services. En cybersécurité, l’enjeu de l’intelligence artificielle est bien au final de réduire le coût d’une faille de sécurité, lequel s’élève en moyenne à 3,62 millions de dollars, selon l’institut américain Ponémon. Et encore, ce chiffre ne prend pas en compte les frais de mise en conformité, ceux de justice, ni ceux liés à l’impact sur l’image de marque. Souvenons-nous par exemple que Verizon a réduit son offre de rachat de Yahoo de 350 M$ en 2017, après avoir découvert que ce dernier avait été victime de deux failles de sécurité un an plus tôt.

A ce titre, nous observons que la cybersécurité pourvue d’intelligence artificielle est de plus en plus souvent considérée par les grands comptes comme une composante de leurs programmes de gestion du risque.

Les chefs d’entreprises qui misent sur l’intelligence artificielle ou tout autre technologie d’automatisation pour réduire leur masse salariale seront probablement déçus. Il faudrait d’ailleurs évaluer sérieusement en amont les bénéfices opérationnels et les économies auxquelles mènent de telles stratégies. Elles sont parfois contreproductives. Par exemple, dans une usine, un opérateur expérimenté gère aussi les stocks et forme les nouveaux collègues. Ce sont deux tâches que n’accomplira pas l’ordinateur censé le remplacer sur la chaîne de montage. C’est notamment parce qu’il existe de nombreux exemples de ce type que L’OCDE a conclu dans un récent rapport que la quantité de métiers que l’intelligence artificielle est susceptible de faire disparaître est largement surévaluée.

Quoiqu’il en soit, il appartient aux entreprises de limiter les effets négatifs de leurs investissements en nouvelles technologies et d’être honnêtes avec leurs salariés sur les conséquences que cela implique. A contrario, l’intelligence artificielle est susceptible de créer des emplois, comme c’est le cas avec toutes les ruptures technologiques. Dans une étude parue en 2017, Accenture prédisait l’arrivée de trois métiers inédits dans le giron de l’intelligence artificielle : les entraineurs, les vulgarisateurs et les soutiens.

Les entraîneurs formeront les systèmes de Machine learning pour améliorer leurs performances et leur manière de communiquer des résultats aux utilisateurs. Les vulgarisateurs réconcilieront les experts des données et les métiers en expliquant comment et pourquoi une intelligence artificielle fait telle ou telle recommandation. Les soutiens, enfin, auditeront les systèmes d’intelligence artificielle pour s’assurer qu’ils fonctionnent selon les réglementations que suit une entreprise. Tout un cortège de nouveaux métiers se met donc en place pour maximiser les bénéfices de l’intelligence artificielle. Avec quels ordres de grandeur ? On ne le sait pas encore. Il y a dix ans, personne ne pouvait prédire que l’intelligence artificielle transformerait aussi rapidement la cybersécurité. Aujourd’hui, elle est considérée comme une technologie clé de la protection des données, des réseaux et des ressources informatiques.

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Anton Grashion, Directeur Senior Marketing Produits EMEA chez l’éditeur de cybersécurité Cylance.