Vers un nouveau régime d’inflation et de croissance, favorable aux actifs dits « risqués »

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Par Christophe Morel Publié le 8 décembre 2021 à 5h40
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7%L'épargne forcée représenterait près de 7% du PIB de la zone euro.

Face à la crise sanitaire, les réponses économiques ont été inédites et surtout, auront un impact durablement reflationniste sur la conjoncture. En effet, un « choc de demande » positif devrait conduire à un changement de régime d’inflation et de croissance. Ce scénario milite en faveur des classes d’actifs dites risquées ou particulièrement exposées aux tendances reflationnistes.

La première réponse à la crise sanitaire a consisté en un quasi-arrêt, pendant plusieurs semaines et dans le monde entier, de l’activité économique. « Le rattrapage de ce retard prendra beaucoup de temps, ce qui prolongera durablement la reprise » observe Christophe Morel, Chef-économiste. Ensuite, pour faire face à l’urgence, les gouvernements dans les pays développés ont injecté des revenus se traduisant par une hausse des endettements publics entre 10 à 30 points de PIB selon les pays. En résumé, c’est un ‘choc de demande positif’ conduisant à un changement de régime sur la croissance et l’inflation.

Trois leviers de croissance : retard de stocks, de consommation et d’investissement

Les ménages et les entreprises vont simultanément participer à cette reprise exceptionnelle via trois canaux de transmission. D’une part, le besoin de reconstituer des stocks qui sont historiquement bas. Mécaniquement, cette reconstitution va se traduire par de la production, et donc, de la croissance.

D’autre part, avec les mesures de restrictions sanitaires récentes, les ménages ont accumulé une épargne « forcée ». Ce « réservoir » d’épargne représenterait respectivement 11% et 7% du PIB aux États-Unis et en Zone euro. Même avec des hypothèses prudentes sur la façon dont les ménages peuvent utiliser cette épargne, la consommation sera forcément soutenue.

Enfin, notons une prise de conscience quant aux besoins d’investissement, considérables dans la santé, dans l’éducation, dans les infrastructures et dans la transition environnementale.Cela supposera à nouveau une impulsion publique, qui va entraîner les entreprises à investir. L’horizon se rallonge enfin.

Un régime d’inflation durablement plus élevé

Ainsi, les forces désinflationnistes observées ces dernières années sont contrebalancées par l’apparition de forces inflationnistes qui sont à la fois conjoncturelles et structurelles. Conjoncturelles, car il existe une inflation cyclique liée à une demande supérieure à l’offre. Avec d’un côté un « boom » de consommation financé par l’excès d’épargne, et de l’autre, des stocks encore insuffisamment reconstitués. Cet écart se résorbera en partie par un ajustement à la hausse sur les prix.

D’un point de vue structurel, la transition environnementale encourage aussi la reflation. Le prix des énergies polluantes doit augmenter pour inciter à la substitution. Cela se traduit par un risque haussier sur les matières premières énergétiques (pétrole, charbon, gaz et même l’électricité). Tant que les énergies renouvelables ne sont pas suffisamment disponibles, la transition énergétique alimentera l’inflation. Tout comme la nouvelle donne géopolitique, à savoir l’objectif des principaux pays à retrouver de l’indépendance stratégique. Cette tendance va progressivement provoquer la relocalisation « régionale » des chaînes de valeur, provoquant une hausse des coûts salariaux.

Pour toutes ces raisons, nous envisageons un régime d’inflation durablement plus élevé, au-dessus des cibles des banques centrales, obligeant ces dernières à des exercices de ‘contorsion’ pour ne pas accélérer le resserrement monétaire qui serait préjudiciable à la stabilité des marchés financiers.

Indexées inflation, obligations convertibles et valeurs de croissance

Ce scénario milite en faveur des classes d’actifs dites risquées ou particulièrement exposées aux tendances reflationnistes. C’est le cas des obligations indexées sur l’inflation, des titres dont les performances sont directement « sensibles » aux sources de l’inflation. « Ce segment obligataire profite mécaniquement de l’évolution de l’indice des prix à la consommation (IPC). Les investisseurs peuvent ainsi bénéficier d’une indexation à l’inflation réalisée » affirme Julien Moutier, Responsable de la gestion directionnelle et aggregate chez Groupama Asset Management.

Groupama Asset Management juge ces titres attrayants, notamment pour la protection qu’ils peuvent apporter dans le cadre de portefeuilles obligataires souverains ou crédit investment-grade. « Les indexées inflation représentent de solides remparts contre l’érosion des rendements des classes d’actifs monétaires et obligataires traditionnelles. Nous privilégions les titres de maturité 1 à 5 ans, avec une forte diversification à l’international » illustre Julien Moutier.

Du fait de leurs propriétés intrinsèques, les obligations convertibles affichent également quelques atouts dans un régime d’inflation durable. « Historiquement, les obligations convertibles ont tendance à performer en période de hausse des taux. L’évolution de ces titres est corrélée à celle des actions ou du crédit high yield, en revanche, très peu aux marchés de taux » observe Jean Fauconnier, Responsable de la gestion convertibles.

Ici encore, les obligations convertibles peuvent apporter une bonne protection aux portefeuilles en raison non seulement de leur convexité − historiquement ces titres sont moins sensibles aux cycles baissiers qu’aux cycles haussiers − mais aussi de leur maturité : « les convertibles les plus longues sont d’environ 7 ans, ce qui laisse peu de place au risque de pentification » explique Jean Fauconnier. « Nous apprécions notamment les émetteurs de l’économie verte et du secteur technologique. Ces gisements récents sont en pleine croissance et offrent de nouvelles opportunités d’investissement » ajoute-t-il.

Enfin, Groupama Asset Management maintient ses convictions sur certains thèmes boursiers. Avec une inflation élevée mais sans dérapage, les tendances de long terme de l’innovation dans la santé, de l’économie digitale, de la transition énergétique, de la raréfaction des ressources et des nouveaux modes de consommation devraient continuer d’être à l’oeuvre à l’échelle globale et de stimuler la croissance des sociétés les mieux positionnées. « Nous identifions des entreprises dont la faculté à créer de la valeur est ‘protégée’ par leur capacité à réinventer leur positionnement, à bouleverser leur industrie ou, plus largement encore, à révolutionner la société. Elles parviennent ainsi à imposer leur pricing power » détaille Philippe Vialle, Gérant actions internationales.

En somme, la sélection de valeurs de croissance demeure un axe d’investissement structurel comme l’indique en conclusion Stéphane Fraenkel, Directeur associé gestions actions & convertibles : « sur le moyen et long terme, nous sommes convaincus du potentiel de croissance bénéficiaire des sociétés dans lesquelles nous investissons. Leur statut de leader sur leur segment ainsi que la forte croissance que nous anticipons leur offre un important levier pour imposer leurs prix et améliorer leur rentabilité ! ».

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Christophe Morel est titulaire d'un DEA Finance (1994), et d'un Doctorat en Gestion (spécialisation finance) de l'Université Paris IX-Dauphine (1997-2000). Il débute sa carrière en 1998 comme Economiste au Ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie. Il était en charge des secteurs banques et assurances. Entre 2000 et 2004, il a rejoint les équipes d'Ixis Asset Management comme Stratégiste de marché " Asie et pays émergents " puis stratégiste " global ". De 2004 à 2006, il fut responsable des départements " Allocation stratégique " et " gestion Overlay " au Fonds de Réserve pour les Retraites. Entre 2006 et 2008, il était Directeur de la gestion " Allocation tactique " chez Natixis Asset Management. Depuis 2008, il avait rejoint Lombard Odier Investment Managers en tant que Deputy CIO du groupe " Asset Allocation ". Début 2013, Christophe Morel rejoint le pôle d'analyse économique de Groupama AM en tant que Chef Economiste.

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