Guerre commerciale sur l’automobile : avantage Chine

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Par Simone Wapler Publié le 4 janvier 2019 à 6h14
Chine
@shutter - © Economie Matin
-3%La CAAM (China Association of Automobile Manufacturers) estime la chute de vente d?automobiles en Chine sur 2018 à -3%.

En faisant un geste concernant les droits d’importation sur les automobiles, la Chine s’apprête à verrouiller à son profit le marché des véhicules électriques.

La Chine a proposé de revenir sur les droits de douanes frappant les importations automobiles américaines. Serait-ce une nouvelle grande victoire de l’administration Trump ?

La guerre commerciale, c’est la multiplication des accords contraints, gagnant-perdant. Au lieu de laisser les gens tranquillement échanger ce qui leur convient au prix qui leur convient, les gouvernements leur mettent des bâtons dans les roues. Evidemment, ce n’est pas bon pour la prospérité dans le monde.

Selon Bloomberg (*), plus tôt l’année dernière, la Chine avait abaissé ses droits de douanes sur les voitures à 15% (au lieu de 25%). Puis elle avait ajouté 25% pour les automobiles américaines en représailles de l’administration Trump qui avait elle-même ajouté 25% pour les automobiles et camions chinois à ses 2,5% de taxe normale.

Avec les importations automobiles en Chine, nous parlons d’un marché minuscule car la plupart des constructeurs fabriquent en Chine pour les Chinois. Le plus gros exportateur est l’Allemagne avec l’équivalent de 11 Mds$. Tesla est le seul constructeur américain à exporter substantiellement mais il vient de signer pour la construction d’une unité de production en Chine.

Un recul des ventes domestiques pour la première fois depuis 30 ans

Selon la CAAM (China Association of Automobile Manufacturers) les chiffres sur 12 mois glissants sont les suivants :

· Juillet : -4,00%

· Août : -3.8%

· Septembre : -11,6%

· Octobre : -11,7%

· Novembre : -13,9%

La CAAM estime la chute sur l’année 2018 à -3%. Les chiffres de vente d’automobiles en Chine déclinent en rythme annuel pour la première fois depuis 30 ans.

L’industrie automobile avait été largement subventionnée par les camarades-capitalistes chinois jusqu’en 2016 mais les aides ont été réduites.

Le contrôle de la production des véhicules électriques

Les chiffres montrent que ce sont les ventes aux particuliers qui baissent le plus. En revanche, les ventes de véhicules hybrides ou électriques continuent de progresser vigoureusement avec +68% de hausse en rythme annuel. Ce secteur – qui ne pèse que 4% du marché – continue à être fortement subventionné et le gouvernement a fixé pour objectif deux millions de voitures vendues d’ici à 2020, le double d’aujourd’hui. Le gouvernement a aussi prévu que dès 2019, tous les constructeurs automobiles étrangers devraient produire leurs véhicules électriques en Chine.

En réalité, c’est sur le segment du véhicule électrique que le vrai affrontement se produit et là, les Américains sont perdants.

Ce retour en arrière sur les droits d’importation est par conséquent un geste symbolique sans véritable portée financière. Il va permettre à Trump d’émettre un tweet victorieux et la Chine va verrouiller la technologie de ce qui l’intéresse : celle des véhicules électriques.

Pour un investisseur particulier, que retenir de tout cela ?

Entre les affaires Renault-Nissan et Carlos Ghosn, les histoires de manipulation des résultats de test anti-pollution, la guerre commerciale, l’automobile – toujours sous emprise des gouvernements – n’est pas un secteur sain. La concurrence est rude mais faussée, le trafic d’influence pèse et sauf à travailler dans ce secteur et le connaître intimement, les opportunités de plus-values sont maigres.

Du point de vue économique, la chute des ventes automobiles en Chine envoie un mauvais signe sur la croissance chinoise et donc la croissance mondiale. Dans un pays encore sous-équipé, si le niveau de vie progresse, les ventes de voitures devraient augmenter. C’est l’inverse qui se produit.

La croissance des camarades-capitalistes chinois serait-elle tout aussi bidon que la nôtre puisqu’elle ne se traduit pas par un véritable gain de pouvoir d’achat ?

Oui, sauf à croire que l’économie administrée est supérieure à l’économie concurrentielle, que le bonheur est en Corée du Nord et non pas en Corée du Sud.

L’argent factice, le protectionnisme, le pilotage à coup de plans ne remplacent pas les accords gagnant-gagnant, ils les sapent. Mais il n’y aura probablement pas d’émeutes de gilets jaunes en Chine, là-bas, on sait comment les contenir.

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  1. https://www.bloomberg.com/opinion/articles/2018-12-12/china-s-auto-tariff-reversal-looks-like-a-lemon?srnd=premium-africa

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Simone Wapler est directrice éditoriale des publications Agora, spécialisées dans les analyses et conseils financiers. Ingénieur de formation, elle a quitté les laboratoires pour les marchés financiers et vécu l'éclatement de la bulle internet. Grâce à son expertise, elle sert aujourd'hui, non pas la cause des multinationales ou des banquiers, mais celle des particuliers. Elle a publié "Pourquoi la France va faire faillite" (2012), "Comment l'État va faire main basse sur votre argent" (2013), "Pouvez-vous faire confiance à votre banque ?" (2014) et “La fabrique de pauvres” (2015) aux Éditions Ixelles.