Une semaine de 6 jours que la troïka essaie d'instaurer chez nos amis grecs serait-elle envisageable en France ? En apparence non.
Les propositions de la troïka, chargée d’inspecter l’économie grecque, paraissent inapplicables en France : possibilité d’une semaine de six jours dans tous les secteurs, réduction du temps de repos minimum à onze heures. Ces mesures sont proposées pour pratiquer une réduction effective des salaires : les Grecs travailleront plus sans augmentation de salaires.
La troïka propose donc aux Grecs de revenir au droit international du travail, en mettant entre parenthèses le droit national. Autrement dit, la troïka propose une application immédiate et directe non seulement de la convention du Bureau International du Travail de 1919, qui fixe à 48 heures la durée maximal du travail hebdomadaire, mais aussi de la directive communautaire de 2003 fixant la durée maximale hebdomadaire à 48 heures, et le repos quotidien minimal à onze heures.
Cette mesure est-elle imaginable, à défaut d’être acceptable ou acceptée, en France ? Curieusement, oui, depuis vendredi 7 septembre !
Le document d’orientation envoyé aux partenaires sociaux par le gouvernement, qui doit encadrer la nouvelle négociation sur la sécurisation de l’emploi, ouvre une étrange porte sur cette possibilité. Au chapitre relatif aux accords dits de flexibilité, le gouvernement souhaite en effet que les partenaires sociaux fixent des garanties pour les salariés et ajoute : "Ces garanties devront porter notamment sur les conditions de conclusion de ces accords, sur la loyauté de leur application, sur les droits individuels du salarié dans le respect de nos engagements internationaux".
Autrement dit, le gouvernement prévoit bien que, lorsque des accords de flexibilité seront conclus dans une entreprise, ces accords pourront prévoir une mise entre parenthèses du droit français, pour se référer directement à la directive communautaire qui inspire la troïka.
Dans ce contexte, rien n’exclut que, au moins pour une durée limitée, une entreprise ne puisse appliquer la semaine de 6 jours avec un repos quotidien limité à onze heures, soit une amplitude horaire de 13 heures par jour. On notera avec intérêt que le gouvernement, qui avait initialement fixé la conclusion d’un accord entre partenaires sociaux sur ce sujet à la fin mars 2013, les prie aujourd’hui de conclure avant la fin de l’année.
Cet empressement augure mal d’un accord des syndicats les plus durs à des innovations aussi audacieuses.