Après la reconnaissance par l’Amérique de la souveraineté marocaine sur le Sahara Occidental le 10 décembre dernier, le Maroc de Mohammed VI fait feu de tout bois afin de se positionner en pays « Pivot » de l’axe Euro-Africain. Bien que la décision prise par un Donald Trump en fin de mandat ait été condamnée par le Front Polisario et son soutien algérien, le Royaume Chérifien ambitionne de pousser son avantage et de devenir une base industrielle écologique incontournable en Afrique du nord, ainsi qu’une place financière et commerciale importante dans la foulée de la reprise de ses relations diplomatiques avec Israël, pays qui compte une très importante communauté juive originaire du Maroc.
Souvent cité en exemple pour sa réaction rapide face à la première vague du coronavirus, et notamment sa capacité à mobiliser très rapidement un fond de relance de 3 milliards d’euros ainsi que de fabriquer des millions de masques en quelques semaines, le Royaume Chérifien affronte depuis la rentrée une deuxième vague de l’épidémie qui l’a contraint à multiplier les restrictions de déplacements, notamment autour de la mégapole de Casablanca, poumon économique du pays.
Cette « deuxième vague » a suscité plusieurs craintes au niveau de la capacité du pays à résister au choc macro-économique induit par le très fort ralentissement de l’activité, ainsi que sur les conséquences au niveau social, au vu du nombre important de travailleurs évoluant dans le secteur informel. Autre source d’inquiétude, la capacité du secteur hospitalier marocain à résister à une flambée des admissions en réanimation depuis que le pays a dépassé les 4000 nouveaux cas par jour à partir d’Octobre 2020.
Le plus vaste plan de relance économique de l’Afrique
Au milieu de l’été, lors de son traditionnel discours annuel du trône, le souverain marocain, avait annoncé le 30 Juillet la création prochaine d’un « Fonds d’Investissement stratégique Mohammed VI », dont les contours ont été précisés en octobre 2020 par le chef de l’Etat. Ce fond doté à terme de près de 4,5 Milliards de Dollars US a pour vocation de participer au vaste plan de relance économique post-Covid19 initié par le Royaume Chérifien, qui est en tête du podium africain de par son ampleur, soit plus de 10% du PIB marocain (environ 12 Milliards de Dollars US). Le pays retenait alors son souffle, alors même que les mesures de restrictions faisaient planer le spectre de faillites en série dans l’industrie du tourisme ou le secteur de l’évènementiels, sinistrés depuis le printemps.
Une fin d’année décisive : alliance américaine, levée de fonds et vaccin
La séquence entamée la semaine du 4 décembre s’est avérée décisive pour le Maroc, avec d’abord l’annonce par le chef de l’Etat de la généralisation et la gratuité de la campagne de vaccination, vraisemblablement avec le laboratoire chinois partenaire du Royaume Chérifien, Sinopharm. Dans la journée du 9 décembre, L’agence Reuters confirmait que le Maroc avait levé avec succès près de 3 milliards de Dollars US à travers un Eurobond, une opération souscrite près de trois fois, confirmant la confiance des marchés. Enfin, Jeudi 10 Décembre, l’annonce par le Président Américain Donald Trump de la reconnaissance par les États-Unis de la souveraineté du Maroc sur le territoire contesté du Sahara Occidental, avec à la clé des investissements américains de près de 3 milliards de Dollars US dans la zone, ainsi qu’un rétablissement des relations avec Israël a achevé de repositionner le Maroc comme pays « Pivot » de la zone. Négocié dans le plus grand secret par Mohammed VI lui-même ainsi que le Président américain depuis trois ans, ce « deal » a été accueilli globalement par une grande satisfaction dans le pays, qui s’est exprimée notamment sur les réseaux sociaux.
Dans la foulée, une délégation Américano-Israélienne de Haut niveau composée de Jared Kushner, conseiller spécial du Président américain et de Meir Ben-Shabbat, conseiller à la sécurité Nationale d’Israël a été reçue à Rabat le 22 décembre par le Roi du Maroc. Lors de cette visite, un programme d’investissement américain de plus de 3 milliards de dollars a été annoncé, ainsi que la mise en place d’une base régionale de l’agence « Prosper Africa », confirmant ainsi la vocation de « Hub » Africain du Royaume Chérifien.
Renouvelable, automobile, tourisme et aéronautique au menu
Depuis, le Maroc met en avant son statut de pionnier du renouvelable, abritant la plus grande station solaire d’Afrique, ou encore son avance dans l’industrie automobile et aéronautique qui en fait l’un des maillions importants d’une chaîne de valeur euro-africaine en pleine recomposition après la pandémie. Reste à savoir comment le pays valorisera cette situation avantageuse dans les mois qui viennent, alors que des élections législatives doivent se tenir à l’automne prochain. De manière globale, le soutien américain à la fois sur le plan politique et économique devrait se traduire par un renforcement de la position régionale du Maroc, alors même que le pays est considéré comme stable sur les plans institutionnels et macro-économique dans une région qui a connu de nombreuses turbulences au cours de la décennie passée.