Soumis aux aléas de la crise sanitaire début 2020, le marché mondial des fusions-acquisitions a repris du poil de la bête depuis. À tel point que des niveaux records ont été enregistrés en 2021. En dépit d’une économie mondiale chahutée par les perturbations des chaînes d’approvisionnement et par la guerre en Ukraine, 2022 devrait connaître la même dynamique, affirment la plupart des experts.
2021 a été l’année de tous les records en termes de fusions-acquisitions. Alors que le monde était encore secoué par la crise sanitaire, les transactions d’entreprises ont progressé de 57 % en valeur par rapport à 2020, frôlant la barre des 6.000 milliards de dollars, selon la société de plateforme financière Dealogic. Pour sa part, PWC relève dans une étude rétrospective 62 000 fusions-acquisitions. Parmi celles-ci, le cabinet d’audit dénombre 130 « mega deals » – dans tous les secteurs –, c’est-à-dire des opérations dont le montant est supérieur ou égal à cinq milliards de dollars. PWC explique ces niveaux sans précédent de transactions par le niveau exceptionnellement haut des liquidités détenues par les sociétés, estimées à 2.300 milliards de dollars.
Sans surprise, le marché français n’a pas dérogé à la règle générale. Il était « en ébullition en 2021 », d’après les confidences faites en janvier 2022, au journal Le Monde, par Augustin d’Angerville, responsable des fusions-acquisitions chez JP Morgan France.
En règle générale, les observateurs du marché prédisent la même tendance pour l’année 2022, en dépit de certains freins potentiels aux transactions. Parmi ces derniers, PWC évoque les possibles blocages liés soit aux ajustements réglementaires – hausse des taux d’intérêt, fiscalité accrue, etc. –, soit à l’évolution négative de l’économie mondiale déjà entrevue au premier trimestre, en raison notamment de l’inflation et de la perturbation des chaînes d’approvisionnement. En dépit de cela, l’optimisme est effectivement de mise. Une enquête menée à l’échelle mondiale par Bain & Company, auprès de plus de 280 dirigeants, affirme que 89 % d’entre eux « s’attendent pour 2022 à un nombre de transactions similaire voire en augmentation ». Élément notable parmi les conclusions prospectives faites par le cabinet de conseil américain : le secteur de l’assurance enregistrera, dans les années à venir, « une suite de transactions qui conduiront à des transformations significatives ».
Des fusions-acquisitions en nombre dans l’assurance et la réassurance
Les fusions-acquisitions réalisées dans le secteur de l’assurance et de la réassurance, durant le premier semestre de l’année 2022, ne démentent pas les prédictions de Bain & Company. Début février, le leader italien du secteur, Generali, a racheté le spécialiste français de l’assurance des professionnels de la santé, La Médicale, pour une somme avoisinant les 435 millions d’euros. À la fin du même mois, le holding de Warren Buffet, Berkshire, mettait la main sur le réassureur Alleghany Corporation, démontrant à nouveau le resserrement des liens entre sociétés d’assurance et de réassurance.
Après avoir obtenu l’aval de la Commission européenne – qui s’est exprimée en vertu du règlement sur les concentrations –, Covéa est en passe de réaliser une opération d’envergure. Le groupe d’assurance mutualiste, détenteur de la MAAF, MMA et GMF, devrait conclure le rachat du réassureur bermudais PartnerRe, actuellement détenu par le holding italien Exor. Pour rappel, Covéa et Exor avaient conclu un protocole d’accord, fin octobre dernier, pour une vente à hauteur de 9 milliards de dollars – 7,8 milliards d’euros – un montant identique à celui qu’elles avaient arrêté lors de négociations précédentes, entre mars et mai 2020. Ce « mega deal » contenterait largement les deux parties : d’une part, Exor ferait une plus-value de plus de 2 milliards de dollars ; de l’autre, Covéa acquerrait une entreprise aux bénéfices nets exponentiels depuis des années et répondant, surtout, à la stratégie de diversification de ses produits et de ses risques « afin d’anticiper les évolutions de l’environnement mondial » du secteur.
Les entreprises françaises très actives
De manière générale, les entreprises françaises ne sont pas en reste en matière de fusions-acquisitions depuis la fin d’année dernière. Le spécialiste français des matériaux, Saint-Gobain, a racheté le fournisseur américain de produits de construction, Applied Technologies, pour 2,3 milliards de dollars, en décembre. Le 6 janvier, la filiale de location de la Société Générale, ALD, a mis le grappin sur son concurrent Leasplan pour 4,9 milliards d’euros. À en croire Augustin d’Angerville, le niveau élevé de fusions-acquisitions enregistré depuis l’an dernier s’explique par des « financements abondants et bon marché », et par la crise sanitaire « qui a rebattu les cartes dans tous les secteurs ». Et le spécialiste d’augurer d’une année 2022 « très active ».