L’heure n’est pas à la sécession bancaire

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Par David Hamsem Modifié le 7 mai 2018 à 19h37
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7,3 %En 2016, le nombre de banques a baissé de 7,3 % dans la zone euro.

En Europe, le secteur bancaire, qui pâtit encore de la crise de 2008, doit se consolider et non se disloquer, estime la Banque centrale européenne. Pourtant, en France, Arkéa, une filiale du Crédit Mutuel, a décidé de prendre le contrepied de cet appel au rassemblement et ne jure que par l’indépendance. Un choix risqué.

Dix ans après l’une des plus graves crises financières de l’histoire, il serait présomptueux d’affirmer que le secteur bancaire a recouvré toute son assurance. Si les Etats et les banques centrales ont sorti le porte-monnaie pour sauver ce qui pouvait encore l’être — et ont manifestement réussi dans les grandes lignes —, il flotte toujours sur les succursales un vent d’incertitude. Or, on le sait, l’argent n’aime pas ce qui n’est pas sûr. En Europe, notamment, plusieurs pays sont loin de présenter toutes les garanties nécessaires au bon fonctionnement de leurs banques. Dont l’avenir est dès lors compromis.

« Cure d’amaigrissement »

En Allemagne, par exemple, où il existe une multitude de petites banques qui échappent au contrôle de la Banque centrale européenne (BCE), plusieurs d’entre elles menacent de faire faillite en cas de nouvelle crise, affirmait un rapport de la Bundesbank l’an dernier. En cause : leurs fonds propres, insuffisants, ne permettraient pas de les sauver en cas de sévère détérioration de l’économie. Et d’après la banque centrale allemande, les établissements concernés — une soixantaine — doivent s’attendre à voir leur résultat avant impôts baisser de 9 % dans les quatre prochaines années.

Ce constat, potentiellement alarmant, n’est pas propre à la première économie européenne : le vieux continent dénombre plusieurs banques classées parmi les « plus faibles », et qui risquent donc la faillite sous peu, analysait en fin d’année dernière le cabinet de conseil en stratégie Bain & Company. En cause, cette fois-ci : de fortes proportions de prêts défaillants que les recapitalisations ne résolvent pas. Et comme un mauvais présage, le cabinet de conseil de souligner que tous les établissements européens ayant déposé le bilan, dans les dix dernières années, se trouvaient dans cette catégorie.

Toujours à la même époque, fin 2017, Danièle Nouy, responsable de la supervision bancaire au sein de la BCE, lâchait un pavé dans la mare en déclarant que « le secteur bancaire européen est surdimensionné et pourrait avoir besoin d’une cure d’amaigrissement ». À l’image de l’Allemagne — qui présente par ailleurs de très solides établissements —, les États membres possèdent trop de banques. Celles-ci se faisant logiquement « concurrence pour attirer des clients », délaissant ainsi « leurs coûts du capital ». Sous-entendu : en y laissant des plumes.

La solution, selon la fonctionnaire européenne ? Le regroupement et la consolidation. Car « il y a de bonnes chances que la taille du secteur bancaire [européen] doive en effet diminuer ». Et c’est ce qui est en train de se passer. En 2016, le nombre d’établissements de crédit, dans la zone euro, a par exemple baissé de 7,3 % pour atteindre un peu plus de 5 000 en décembre, selon le rapport annuel sur les structures financières publié en octobre dernier ; d’après la BCE, entre 2008 et 2016, la « masse bancaire », au sein de l’Eurozone, a diminué de 25 % — ce qui est considérable.

Arkéa à contre-courant

Le « banquier central européen » n’est d’ailleurs pas le seul à prôner ce regroupement bancaire ; pour un responsable de la banque privée au sein du cabinet McKinsey, la consolidation du secteur est ainsi « inévitable ». En France — où « le marché est déjà très concentré » — comme ailleurs. Un point de vue que partage François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France. « Aux États-Unis, les cinq premières banques disposent d’une part de marché de plus de 40 % […] Faciliter des fusions saines et bien conçues pourrait [donc] améliorer la stabilité financière » du continent selon lui.

Car l’heure ne peut être à la multiplication des établissements bancaires. Ni en Europe ni en France. Aujourd’hui, le courant est même inverse : autrefois tabou, la fermeture d’agences — en milieu rural notamment — est une réalité, et on estime qu’un tiers d’entre elles auront disparu d’ici cinq ans. Certaines « marques », comme le Crédit Agricole ou le Crédit Mutuel, étant particulièrement touchées, puisqu’une bonne partie de leurs agences se trouvent dans des petites villes ou villages. Pourtant, une filiale de la seconde menace clairement depuis quelque temps de faire cavalier seul.

Arkéa, la branche bretonne du Crédit Mutuel, souhaite plus que jamais obtenir son indépendance, provoquant l’incompréhension de sa maison-mère, et des agences de notation. En janvier dernier, Standard & Poor’s a en effet indiqué qu’elle envisageait de dégrader la note de la banque bretonne — qui pourrait sortir de la catégorie d’excellence « A » —, celle-ci ayant d’ores et déjà chuté à « A-A1 ». Avec surveillance négative. Soit l’antichambre de la catégorie des « plus faibles » précitée. Elle-même promesse de faillite en Europe…

Un autre secteur est en route vers la consolidation : l’assurance. Que ce soit entre AG2R La Mondiale et La Matmut, ou entre la Macif et Aesio, là aussi, l’heure est au rapprochement. L’objectif ? Satisfaire les nouvelles normes prudentielles et pérenniser son avenir. « Le fait d’être plus gros nous permet de mutualiser les coûts et les investissements, alors que le ticket d’entrée pour répondre aux exigences des clients est de plus en plus élevé », affirmait Nicolas Gomart, le directeur général de la Matmut, en janvier dernier. Pas de doute, que ce soit dans le secteur bancaire ou assurantiel, le salut passera par l’unité.

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Titulaire d'un master en Economie et Gestion mention Banque, chargé de clientèle, David Hamsem a d'abord travaillé comme consultant en finance pour un célèbre cabinet de conseil en technologies, auprès de banques et d'organismes financiers. Depuis 2011, il est gestionnaire de patrimoine indépendant, et fait valoir son expertise en ingénierie patrimoniale auprès de particuliers. David Hamsem est également membre et conférencier au sein du think tank La Finance autrement.