Salariés : à la vie, à la mort

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Par Eric Verhaeghe Modifié le 12 septembre 2012 à 4h10

Dans le document d’orientation remis par le gouvernement aux partenaires sociaux le vendredi 7 septembre, figure en toutes lettres l’introduction de la portabilité des droits à la formation. Cette proposition, en apparence purement technique, pourrait donner lieu à une évolution essentielle dans la notion de salariat. De quoi s’agit-il ?

Aujourd’hui, chaque salarié dispose d’un droit garanti à la formation professionnelle, notamment au travers d’un droit individuel à la formation (DIF). Si le salarié perd son emploi, par exemple à cause d’un licenciement économique, les heures de formation qu’il n’a pas utilisées sont pour l’essentiel perdues à leur tour.

Cette mécanique se comprend assez simplement : le droit du salarié est lié au contrat de travail qu’il détient. Lorsque le contrat cesse, les droits cessent. La notion de portabilité est en contradiction avec cette évidence intuitive, puisqu’elle prévoit que le salarié qui perd son contrat de travail ne perd pas automatiquement les droits ouverts par ce contrat. Elle induit donc l’idée qu’un salarié dispose de droits tout au long de la vie indépendamment du contrat qu’il détient.

Cette logique qui vise à limiter l’impact de la perte d’emploi dans la vie du salarié rejoint la notion de sécurité sociale professionnelle défendue par des acteurs aussi divers que la CGT ou Nicolas Sarkozy. Derrière cette idée de sécurité sociale, se cache un principe simple : le salarié doit bénéficier de droits concrets tout au long de sa carrière, qu’il détienne un emploi ou qu’il soit au chômage.

Cette notion de portabilité existe déjà de façon embryonnaire et limitée dans le temps. Par exemple, lorsqu’un salarié perd son emploi, il peut conserver pendant une durée limitée le bénéfice de la couverture santé offerte par l’entreprise. Beaucoup d’organisations syndicales sont globalement favorables à l’extension de ces droits. Le gouvernement semble les entendre.

À terme, c’est la notion de salariat elle-même qui pourrait être complètement revisitée, en procurant à chaque salarié des droits et des avantages tout au long de sa vie, indépendamment de l’entreprise où il travaille. Au fond, une sorte de statut du salarié est en train de voir le jour, avec des droits indépendants du poste occupé. Une formule qui ressemble à ce qui existe dans la fonction publique où le fonctionnaire bénéficie de protections indépendantes de l’emploi qu’il occupe.

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Né en 1968, énarque, Eric Verhaeghe est le fondateur du cabinet d'innovation sociale Parménide. Il tient le blog "Jusqu'ici, tout va bien..." Il est de plus fondateur de Tripalio, le premier site en ligne d'information sociale. Il est également  l'auteur d'ouvrages dont " Jusqu'ici tout va bien ". Il a récemment publié: " Faut-il quitter la France ? "