Alors qu’Emmanuel Macron s’apprête à rendre visite à son homologue égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, tour d’horizon des liens politiques, économiques et militaires qui unissent les deux pays.
France-Égypte : rapprochement
Ces dernières années, les rencontres officielles entre la France et l’Égypte se sont « multipliées, avec un rythme d’une visite au niveau des chefs d’État quasiment tous les ans », affirme le ministère français des Affaires étrangères. Une proximité aux retombées économiques notables : les échanges commerciaux entre les deux pays ont ainsi enregistré une augmentation de 21,8 % en 2017, pour atteindre les 2,5 milliards d’euros. Les entreprises françaises, qui emploient plus de 30 000 personnes en Égypte, selon les chiffres du ministère, « bénéficient de positions fortes sur les secteurs porteurs de l’économie égyptienne : industrie, agro-industrie, équipements électriques, pharmacie, distribution, exploitation d’hydrocarbures, tourisme et infrastructures ».
C’est sur le plan militaire que ce rapprochement est le plus concret. Plusieurs contrats d’exportation majeurs ont été conclus ces dernières années avec l’Égypte : la vente de 4 corvettes par DCNS (mai 2014), de 24 Rafale par Dassault Aviation, d’une frégate multi-mission par DCNS et d’armement par MBDA (février 2015). Le pays du Proche-Orient a également fait l’acquisition, fin 2015, des deux bâtiments de projection et de commandement (BPC) de type Mistral construits par DCNS et initialement destinés à la Russie.
La coopération militaire entre les deux pays ne se limite pas à de simples échanges commerciaux. Celle-ci englobe en effet « tous les aspects propres aux relations de défense, que ce soit en matière de formation et d’échanges, d’exercices, d’équipements ou de dialogue stratégique », précise l’ambassade France au Caire. Chaque année, les forces armées françaises et égyptiennes organisent par exemple un exercice mené alternativement sur le territoire français et égyptien : « Cleopatra ». Le nombre d’exercices dirigés conjointement par les deux pays a par ailleurs nettement augmenté en 2018 et le plan annuel de coopération de défense entre l’Égypte et la France comporte aujourd’hui plus de soixante-dix actions de coopération.
Les relations militaires entre les deux pays devraient même s’intensifier dans les prochaines années : d’après le quotidien français La Tribune, Le Caire devrait profiter de la visite du président français, prévue fin janvier, pour annoncer une nouvelle commande de 12 avions Rafale à Dassault. Par ailleurs, lors de l’inauguration du premier salon égyptien de l’armement le 3 décembre dernier, la ministre française des Armées, Florence Parly, en compagnie d’Abdel Fattah al-Sissi, a tenu à rappeler « l’importance que la France attache à renforcer et développer son partenariat avec l’Égypte à tous les niveaux, militaire et sécuritaire inclus ».
Acteur diplomatique clé
Et pour cause. L’Égypte, l’une des premières puissances militaires de la région, est confrontée à la menace Daesh, entre autres formations terroristes sévissant dans sur son territoire. Le défi sécuritaire auquel fait face le pays, ainsi que son poids économique et démographique, en font un acteur diplomatique clé au Moyen-Orient. Un rôle confirmé par la levée, en 2015, des restrictions sur la livraison d’armes aux forces égyptiennes, l’appui militaire de plus en plus soutenu de la Russie et le soutien sans faille de Paris.
« La France et l’Égypte mènent un dialogue politique étroit sur les sujets régionaux, tels que le processus de paix au Proche-Orient ou la Libye. L’Égypte est en outre un partenaire important dans la lutte contre le terrorisme », insiste le ministère français des Affaires étrangères. « Comme la France, l’Égypte a pour ambition constante de jouer un rôle médiateur au Moyen-Orient », analyse pour sa part le journaliste Roland Jacquard, spécialiste du terrorisme. Engagée dans une lutte frontale contre « tous les mouvements islamistes, y compris les courants djihadistes les plus radicaux », l’Égypte du président Sissi est le « meilleur allié » de Paris, affirme l’expert.
Un constat partagé par Jean-Yves Le Drian qui, en 2017, a tenu à réaffirmer la volonté de l’Hexagone d’œuvrer à un règlement du conflit libyen en coopération avec l’Égypte. « Nous ne pouvons laisser prospérer à la frontière égyptienne, aux portes de l’Europe, une instabilité dont profitent les terroristes et les trafiquants en tous genres », avait en effet déclaré le ministre des Affaires étrangères. De son côté, l’Égypte affiche clairement sa volonté d’éradiquer le terrorisme et compte bien s’appuyer sur Paris pour y parvenir : selon les informations de La Tribune, « Le Caire est très intéressé par l’achat de 30 drones Patroller (Safran) armés » et les militaires égyptiens « ont marqué un intérêt pour l’hélicoptère Cougar (Airbus Helicopters) ».
La visite d’Emmanuel Macron dans la capitale égyptienne sera également l’occasion pour le président français de rappeler son intention de « renforcer et diversifier les projets économiques bilatéraux », comme l’a annoncé Bruno Le Maire il y a quelques jours, lors de son passage en Égypte. « Le président Sissi a fait un travail remarquable pour redresser l’économie égyptienne. Il a fait des choix courageux. Ça fait de l’Égypte un marché encore plus intéressant pour les entreprises françaises » a ainsi déclaré le ministre français de l’Économie. Nouvel « Eldorado des entreprises tricolores », l’Égypte s’affiche aujourd’hui comme un partenaire de premier plan pour l’Hexagone tant sur au niveau économique que diplomatique.