France : le choc, ou l’étouffement

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Par Eric Verhaeghe Publié le 6 septembre 2012 à 4h45

Une tribune n’est pas passée inaperçue dans Libération, ce mardi de rentrée des classes, sous le titre : “Jeunes de France, votre salut est ailleurs : barrez-vous !”, rédigée par un journaliste, un rappeur et un acteur associatif. Si le texte n’incite qu’à une émigration provisoire, en soulignant l’impact négatif du chômage des jeunes, il évoque bien d’autres sujets tout à fait justes et inquiétants pour la France.

D’une part, il y a la crise, qui dure depuis 4 ans maintenant, et ne semble pas devoir s’achever. Cette crise interminable pour laquelle une ardoise de plusieurs centaines de milliards est présentée à une jeunesse dont la seule perspective est de passer la moitié de sa vie à rembourser.

D’autre part, il y a cette grand peur, et ce grand raidissement qui saisit la société française tout entière. Plus que jamais la France se crispe.
Les élites ne se renouvellent pas et verrouillent autant les débats que les idées. Le pouvoir est concentré en quelques mains dont le mot d’ordre est de se maintenir coûte-que-coûte aux responsabilités dans un pays qu’elles ont mis au bord de la ruine. Et plus que jamais, ce sont les mêmes idées sans avenir qui nous sont servies, avec toujours cette même arrogance d’une élite qui pense tout savoir et qui stigmatise tout ce qui n’est pas elle.

De ce point de vue, les manoeuvres en cours dans les deux grands partis de gouvernement de ce pays sont affligeants. Au parti socialiste, un processus nord-coréen de transmission du pouvoir triomphe. A l’UMP, c’est une sorte d’invocation à la chinoise du Mao local, Nicolas Sarkozy, qui remplace le débat d’idées. La France a pourtant un besoin urgent d’autre chose: d’un renouvellement en profondeur de ses élites, et surtout de ses mentalités.

La croissance économique est aujourd’hui à ceux qui innovent et qui ouvrent de grands yeux optimistes sur le futur. Il faut libérer les initiatives, les envies et les désirs. Il faut reconstruire un nouveau monde. Il faut remettre la finance à sa place, c’est-à-dire dans un rôle de financeur de l’avenir, et non de rentier du passé. La peur et le besoin de protection doivent céder la place à l’audace et au risque. Au lieu de cela, le pays est gouverné par la volonté de préserver les héritages, de se figer dans un patrimoine immuable.

Ceux qui, absurdement, travaillent encore, consacrent la moitié de leurs ressources à une mutualisation dont ils ne bénéficieront pas la moment venu. Peu à peu, les forces vives s’étouffent et s’amneuisent. Sans un choc profond, cette logique dévastatrice mènera malheureusement le pays à la catastrophe, ou pire, à l’évasion massive des meilleurs.

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Né en 1968, énarque, Eric Verhaeghe est le fondateur du cabinet d'innovation sociale Parménide. Il tient le blog "Jusqu'ici, tout va bien..." Il est de plus fondateur de Tripalio, le premier site en ligne d'information sociale. Il est également  l'auteur d'ouvrages dont " Jusqu'ici tout va bien ". Il a récemment publié: " Faut-il quitter la France ? "