L’évasion de capitaux quittant notre pays pour des raisons fiscales occasionnerait, selon diverses estimations, une perte annuelle de recettes fiscales de 40 milliards d’euros. Pour tenter de combler les déficits, la tentation est grande pour les pouvoirs publics de « mettre la main » sur ces capitaux qui échapperaient au fisc, légalement ou illégalement. Mais est-ce là une bonne solution ? Ne faudrait-il pas s’attaquer aux racines du mal et comprendre ce qui pousse les Français et leurs capitaux à quitter notre territoire ?
Chaque année, le flux net (départs moins retours) de Français partant s’installer à l’étranger concernerait 65.000 compatriotes. Ce sont en majorité des personnes diplômées, à fort potentiel et bons revenus (48.000 € nets annuels, contre 24.000 € en moyenne). Certes, l’objectif d’échapper à une fiscalité trop lourde concerne un certain nombre d’entre eux (environ 11.500 par an, vers la Suisse et la Belgique principalement), mais la volonté de trouver des opportunités de carrière plus enrichissantes motive l’essentiel de ces émigrés. Ainsi, l’ISF ne représente qu’une faible part (1,28 milliards) des 8 milliards d’euros perdus chaque année par l’Etat du seul fait de l’installation de ces contribuables à l’étranger.
Trouver de meilleures perspectives pour leur avenir semble être la motivation principale qui pousse les talents à quitter le pays. D’après l’une des rares enquêtes sur les raisons poussant certains d’entre eux à ne plus désirer revenir, ils dénoncent « Une France où rien ne bouge », où le « Le travail n’est pas motivant… » et les « Taxes et impôts trop lourds ».
Alors, que faire ? Bien évidemment, la complexité de notre fiscalité, l’instabilité juridique (35 % d’augmentation du nombre de lois en 30 ans), l’aspect confiscatoire de certains impôts comme l’ISF sont des critères importants à prendre en compte. Mais l’ingénierie fiscale ne peut suffire à elle seule.
Il est en effet primordial, alors que les déficits publics ne sont plus soutenables, d’aligner le poids de la dépense publique sur le niveau moyen de nos voisins : les dix pays développés ayant atteint le plein emploi grâce à un taux de croissance supérieur au nôtre ont tous un taux de dépenses publiques massivement inférieur. Pour six d’entre eux, ce taux est inférieur à 35 % du PIB, contre 56,5 % en France. Diminuer les dépenses plutôt qu’essayer d’augmenter à tout prix les recettes, c’est le seul moyen pour notre pays de retrouver la prospérité.