Pourquoi les Pigeons tirent leur révérence

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Par Jean-David Chamboredon Modifié le 30 octobre 2012 à 16h11

Moins d’un mois après le lancement spontané du mouvement des Pigeons, et alors que le projet de loi de finances décidant de la fiscalité des cessions de parts d’entreprises a été approuvé, après avoir été largement amendé, la page Facebook du mouvement des Pigeons a fermé hier soir. Jean-David Chamboredon, le porte-parole du désormais ex-mouvement des Pigeons, nous explique pourquoi.

Economiematin.fr : Pourquoi arrêter le mouvement des pigeons ?

Jean-David Chamboredon : Tout simplement parce que cela devenait potentiellement contre-productif, avec un tohubohu un peu potache et contestataire qui devenait stérile par rapport à une réaction politique complètement caricaturale sur qui sont les Pigeons.

On avait envisagé fermer dès le milieu de la semaine dernière, et lorsque les Pigeons ont été mentionnés lors du congrès du PS, on a considéré que c’était effectivement une bonne idée de fermer. Au congrès du PS, les Pigeons ont été traités de « quarteron de millionnaires connectés ». Arnaud Montebourg a dit que les Pigeons ne sont pas ceux qu’on croit, bref, que des déclarations caricaturales et erronnées. Nous nous sommes donc dit que l’éventuelle concertation qui pourrait avoir lieu entre les entrepreneurs et le gouvernement serait d’autant plus difficile qu’elle porterait l’étiquette de Pigeons.

Economiematin.fr : Est ce que cela veut dire que cela a été une bonne idée, et cela ne l’est plus ?

Ce n’était pas une idée, puisque c’était spontané et improvisé. Qu’une communauté d’entrepreneurs se réunisse aussi rapidement autour d’un objectif commun est une bonne chose. Mais ce n’était pas une action calculée. Or, quand on a une communauté de 73000 membres, forcément, à un moment, cela devient un peu désordonné, chacun tire à hue et à dia. Mais le mouvement des pigeons a remis le petit entrepreneur au centre de la scène médiatique. Il est populaire dans les sondages. Et le gouvernement a réagi en modifiant la loi de finances, mais mal, en créant une usine à gaz non pertinente pour notre secteur du web…


Economiematin.fr : Dialogue possible ?

On l’espère : j’ai co-rédigé un manifeste qui a été remis à François Hollande la semaine dernière, signé par 3000 entrepreneurs, qui représentent 100 000 emplois, le tout collecté en 2 jours ½. Ce manifeste est un appel à concertation. On serait quand même très surpris, très décu qu’il n’y ait aucune réponse à ce manifeste, surtout lorsqu’il se nomme « appel à concertation ». Mais c’est vrai que pour l’instant nous n’avons pas eu de retour.

Economiematin.fr : Sur quoi porte cet appel à concertation, que voulez vous voir modifié encore dans le projet de loi de finances ?

Il y avait deux sujets à adresser. Le premier, la fiscalité de l’entrepreneur. Il a été adressé, et très mal adressé, par le gouvernement. L’entrepreneur de croissance n’est pas traité correctement, contrairement à l’entrepreneur de longue durée, traditionnel, dont la situation est sans doute correctement adressée.

Mais il y avait un deuxième sujet, que le gouvernement n’a pas compris, pas entendu : c’est le sujet du financement par les business angels. Or, le vrai sujet de préoccupation des entrepreneurs derrière le mouvement des pigeons était en fait, pas tant celui de la plus value de cession, lointaine pour eux, que celui de la capacité à lever 100 000 euros demain, pour couvrir 2013 ! Or ce sujet n’a pas du tout été entendu. La fiscalité, telle quelle ressortirait de la loi approuvée en première lecture, si je suis business-angel, aboutit à être taxé entre 42,5 et 62,2% de l’éventuelle plus-value d’un investissement ! Investissement qui par nature est super risqué ! Un business-angel a une chance sur deux de tout perdre, et une sur dix de faire une jolie plus-value, avec tous les cas intermédiaires ou il récupère peu ou prou sa mise.

Aujourd’hui, des milliers de sociétés sont financées chaque année avec des tours de 100 000 à 300 000 euros. Ce sont donc des milliers de sociétés qui vont se trouver sans solution car là, en l’état de la loi de finances, c’est totalement dissuasif. Or je vois mal la BPI [Banque Publique d’Investissement NDLR] faire des milliers d’opérations entre 100 000 ou 300 000 euros pour suppléer les business angels l’an prochain.

Ce sujet n’a pas du tout été entendu, et je ne sais pas si le gouvernement fait seulement la sourde oreille, ou si c’est simplement parce qu’ils n’ont pas compris le problème. Mais nous sommes prêts à venir leur expliquer.

Economiematin.fr : Avez vous un espoir que le gouvernement et le parlement infléchissent leur position en deuxième lecture ?

Je suis incapable de faire un pronostic. En revanche, il est facile de savoir qu’on va avoir des centaines de start-ups, de bébé-entreprises, qui vont fermer dans les semaines et mois qui viennent si l’on agit pas vite.

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Jean-David Chamboredon est président du fonds d'investissement des entrepreneurs Internet ISAI. Jean-David a commencé sa carrière chez Cap Gemini où il passe 13 ans et fonde le Cap Gemini Telemedia Lab dans la Silicon Valley en 1997. Il rejoint le monde du Capital Investissement en 1999, d'abord chez Europatweb comme CTO, puis Viventures comme Partner. Ces 6 dernières années, il était le Partner Français de l'activité Venture et TMT de 3i Group plc.Son "track record" inclut SeLoger.com (IPO Euronext), Screentonic (acquis par Microsoft), Okyz (acquis par Adobe), Highdeal (acquis par SAP), Netonomy (acquis par Comverse), Priceminister (acquis par Rakuten), Fastbooking, Twenga...