Cinq mois après le début de la crise des Gilets Jaunes, la France connaît encore une situation d’extrême tension politique et sociale, qui se vérifie notamment par les polémiques qui traversent le débat public, et par les menaces qui pèsent sur les libertés. Plusieurs affaires fâcheuses montrent que le climat collectif est fortement dégradé à l’approche d’une intervention présidentielle particulièrement délicate. Tout laisse à penser que la sortie de crise n’est pas pour tout de suite.
Les interpellations de journalistes l’ont montré: le pouvoir politique est de plus en plus allergique à l’opposition et à la critique, qu’elle émane de l’opinion ou de la presse. Partout, des sanctions pénales lourdes sont prononcées contre les récalcitrants. Partout, les pressions s’accumulent pour tenir l’appareil d’Etat.
Tension politique et fichage des opposants
Dans ce sentiment de crispation qui domine l’appareil d’Etat à mesure que son fonctionnement est contesté, la révélation d’un fichage des Gilets Jaunes par les hôpitaux parisiens constitue probablement un scandale d’Etat, dont seule une certaine forme d’accoutumance à la violation de l’Etat de droit permet d’atténuer la gravité.
Alors que les données de santé sont supposées être confidentielles et mieux gardées qu’un trésor de la Banque de France, on découvre que les hôpitaux ont mis à disposition de la justice et de la police un fichier d’opposants politiques soignés dans leurs murs. C’est tout simplement hallucinant.
L’affaire vaut d’ailleurs à l’Assistance Publique une saisine de la CNIL par l’ordre des médecins. Si l’on se souvient que le directeur général des hôpitaux parisiens n’est autre que l’énarque donneur de leçons Martin Hirsch, on comprend comment une caste peut brutalement mettre l’appareil d’Etat au service de ses intérêts, en foulant au pied toutes les règles qu’elle prétendait infranchissables ou inviolables dans l’intérêt des patients et des citoyens.
Violentes attaques de Nathalie Loiseau contre la presse
Parallèlement, la laborieuse tête de liste des marcheurs aux européennes, Nathalie Loiseau, s’est livrée à de violentes attaques contre Edwy Plenel, après que celui-ci a fait une petite révélation: Nathalie Loiseau se serait commise sur une liste d’extrême droite à des élections étudiantes du temps où elle était à Sciences Po.
La réaction de la tête de liste laisse un peu perplexe sur la proportionnalité des attaques qu’elle lance à ses détracteurs. L’ancienne ministre s’est en particulier fendue d’un tweet rageur dénonçant Edwy Plenel:
“Venir de la droite, avoir rejoint Emmanuel Macron et combattre l’extrême droite, avoir même une chance de la battre, c’est insupportable à Edwy Plenel. Avoir été gaulliste à 20 ans plutôt que maoïste, soutien du terrorisme palestinien et des khmers rouges, c’est insupportable à Edwy Plenel”
Face à la boule puante de campagne, peu glorieuse mais classique, c’est une nouvelle fois la presse qui est attaquée. Ce sens de la répétition ne manque pas d’inquiéter.
Une stratégie du clivage ?
Au total, on se demande dans quelle mesure cette tension ne résulte pas aussi d’une stratégie délibérée de la majorité présidentielle, et du Président lui-même, pour gouverner. Selon la rumeur, Emmanuel Macron devrait ouvrir ce jeudi soir d’autres lignes de fracture en proposant aux Français de travailler plus tout en gagnant autant.
Rien ne garantit qu’il se livrera effectivement à ces annonces. Mais si cette tendance devait se confirmer, on peut craindre un embrasement important de l’opinion déjà chauffée à blanc par le vide politique en plein milieu de la contestation hebdomadaire des Gilets Jaunes.
Article écrit par Eric Verhaeghe sur son blog