La dernière émission de dettes, réalisée par le Trésor espagnol, confirme une légère détente sur les taux. A la crise économique s’ajoutent des tensions indépendantistes.
Mariano Rajoy, le président du gouvernement espagnol, qui résiste aux pressions de ceux qui veulent le pousser à demander, une nouvelle fois, l’aide financière de l’Europe a gagné un court répit. Réalisée jeudi, l’émission de dettes à 3 et 10 ans a permis de placer pour 4,8 milliards d’euros de bons au dessus des 4,5 milliards prévus et a surtout confirmé la légère détente sur les taux déjà relevée, mardi, lors de l’adjudication de lettres à 12 et 18 mois. Avec une demande 2,8 fois supérieure à l’offre, le Trésor espagnol a ainsi levé pour 859 millions d’euros de bons à 10 ans avec un taux de 5,66% contre 6,64% au mois d’aout et 3,9 milliards de bons à 3 ans à un intérêt de 3,8%. Ces derniers ont été d’autant plus recherchés qu’ils sont assurés de l’appui de la BCE qui s’est dit prête désormais à intervenir sur le marché secondaire des obligations d’Etat de 1 à 3 ans.
Alors que l’économie espagnole est déjà asphyxiée et qu’il s’apprête à présenter, le 27 septembre, un projet de budget des plus stricts, le gouvernement de Mariano Rajoy cherche, à tout prix, un moyen d’éviter de se voir imposer un nouveau tour de vis par ses partenaires européens. Assuré d’une aide de Bruxelles de 100 milliards d’euros pour restructurer le secteur bancaire, Madrid qui va créer prochainement une structure de défaisance pour accueillir les créances douteuses des banques dans l’immobilier pense que 50 milliards devraient suffire pour sauver ces dernières. Le solde pourrait lui servir alors de cagnotte de secours. On devrait en savoir plus à la fin de la semaine prochaine.
L’opposition, les socialistes du PSOE en tête, soupçonne aussi le gouvernement de vouloir gagner du temps à la veille d’élections régionales importantes, le 21 octobre, en Galice, contrôlée par le Parti Populaire de Mariano Rajoy, et au Pays basque où le Parti Nationaliste Basque (PNV) devrait renouer avec le pouvoir après un intermède socialiste de quatre ans. Ce sont deux régions au particularisme très appuyé. Or, l’Espagne est déjà confrontée à de fortes tensions en Catalogne où plus d’un million de personnes ont défilé pour l’indépendance, le 11 septembre, à l’occasion de la fête catalane de la « Diada ». Jeudi, Artur Mas, le président nationaliste de la Generalitat, le gouvernement de la Catalogne, qui réclamait à Mariano Rajoy de bénéficier d’une autonomie fiscale, a pris acte de son refus. A la sortie de sa réunion avec le président du gouvernement espagnol, il a laissé planer la menace d’appeler prochainement à un scrutin régional avec la question de l’indépendance au cœur de son programme.
C’est un luxe que ni la Catalogne, déjà plombée par 44 milliards d’euros de dettes, ni l’Espagne ne peuvent s’offrir. Ce qui a d’ailleurs fait sortir le roi Juan Carlos de sa neutralité, via une lettre mise sur le site Internet de la Maison Royale (casareal.es), dans laquelle il explique que « la pire chose que nous puissions faire, c’est de diviser nos forces, d’attiser les dissensions, de poursuivre des chimères, d’approfondir nos blessures »…