L’e-réputation : vers une norme internationale ?

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Par Bertrand Girin Modifié le 10 février 2015 à 7h30
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@shutter - © Economie Matin
45 %Selon une dernière étude de la DGCCRF, 45 % des avis laissés par des consommateurs sur des sites Internet seraient faux.

La réputation des entreprises du monde entier est plus que jamais liée à la digitalisation de la société. Aujourd’hui Internet est quasi incontournable dans un processus de pré-achat.

C’est pourquoi, une norme internationale - ISO 20488 - se prépare. Cette dernière est à l’initiative de l’AFNOR, qui a commencé en 2013 à travailler sur les avis de consommateurs. La France pilotera ce comité de l’ISO sur l’e-réputation, qui a pour but de définir des outils et méthodes de référence pour l’international.

Les consommateurs influent sur l'image de l'entreprise

L’e-réputation est directement liée aux recommandations faites par les consommateurs. Aujourd’hui, ils ont le pouvoir d’influencer l’image de l’entreprise. La réputation est en effet ce que l’on dit de vous sans vous. On peut désormais affirmer que les commentaires faits par les clients sur un produit ou un service impactent autant la décision d’achat, si ce n’est davantage, que la communication officielle des marques. La communication a beaucoup évoluée depuis les années 80 ou 90. A l’époque, les marques avaient un discours descendant vers leurs consommateurs. Aujourd’hui, les internautes contribuent très largement à la réputation de celles-ci.

Le travail sur la normalisation de la réputation des entreprises contribuera à développer cette relation de confiance entre internautes, qui souhaitent aujourd’hui pouvoir se fier aux avis et commentaires qu’ils trouvent sur Internet. Un premier travail a été réalisé en France avec la création de la Norme AFNOR autour des avis clients, travail que l’AFNOR souhaite désormais internationaliser et élargir à la réputation avec le Comité de l’ISO sur l’e-réputation, selon les 3 axes de travail suivants : s’inspirer de la 1ère norme française sur les avis de consommateurs et la dupliquer à l’international, définir un glossaire commun de l’e-réputation des organisations publiques et privées, étudier le rôle des médias sociaux dans les débats de normalisation.

La reconnaissance des faux avis grâce à la normalisation : les bases d’un travail plus profond

L’AFNOR (Association française de normalisation) est à l’origine du projet de normalisation volontaire au niveau international. Ce projet s’inscrit dans la lancée de 2013 avec la publication de la norme NF Z74-501, qui propose une méthode fiable de traitement des avis des consommateurs. Publiée le 4 juillet dernier, elle se base sur trois étapes : la collecte, la modération et la restitution des commentaires laissés par les internautes. Parmi les nombreux critères à suivre – pour autant que le gestionnaire de site le décide car la norme est d’application volontaire – la vérification de l’identité du commentateur devient plus poussée ainsi que les preuves d’achat ou de consommation.

Le premier comité de l’Organisation Internationale de normalisation (ISO) sur l’e-réputation des entreprises et des administrations a récemment vu le jour. Objectifs : être en phase avec d’autres pays et "vulgariser les meilleures pratiques", pour Olivier Gibert, porte-parole du groupe AFNOR. Animé par la France, via AFNOR, ce projet de normalisation volontaire international se mobilise sur des sujets ambitieux qui dépassent le seul traitement des avis en ligne des consommateurs. Actuellement, 9 pays (dont Allemagne, Royaume-Uni, Canada, Chine) participent à cette élaboration tandis que 18 autres se contentent du statut d’observateur, les Etats-Unis ayant quitté le groupe de travail.La prochaine réunion est prévue en septembre ou en octobre 2015 en Chine.

Pourquoi internationaliser le projet de normalisation volontaire de l’e-réputation ?

Les avis clients représentent un socle de base pour le travail d’internationalisation des normes e-réputation. L’importance des avis et l’impact sur la décision d’achat touchent les marques du monde entier… les problématiques sont donc communes. De plus, cela permet d’enrichir les partages d’expériences par les visions multiculturelles des organismes de normalisation et des entreprises d’un maximum de pays.

Un glossaire de la réputation en ligne est prévu dans cette norme, pourquoi ?

Les pays doivent se mettre d’accord sur la terminologie employée, afin de pouvoir travailler ensemble et s’assurer qu’ils se comprennent bien.

Des avis de consommateurs hétérogènes et erronés

Selon une récente enquête de la Direction générale de la concurrence (DGCCRF), de la consommation et de la répression des fraudes, le taux d’anomalies s’accroit : il avoisine les 45 % tous secteurs confondus (automobile, électroménager, mobilier, habillement, services), en 2013, alors que ce taux s’élevait à 28,8 % en 2010. D’après la DGCCRF, les façons de biaiser un avis sont toujours aussi nombreuses, depuis les choix de modération qui visent à supprimer les avis négatifs, à la mise en avant plus subtile des remarques positives, en passant par la rédaction de faux avis ou encore d’avis obtenus contre l’espérance d’un gain au tirage au sort. Des pratiques apparaissent également, comme les allégations trompeuses de conformité à la norme NF sur les avis en ligne.

Des faux avis de consommateurs sanctionnés au niveau international

Au niveau international, des dérives importantes ont récemment été sanctionnées. L’autorité de garantie de la concurrence et du marché (AGCM), l’anti-trust italienne, a infligé à Trip Advisor une amende de 500 000 euros d’amende en décembre dernier. L’autorité italienne estimait que, malgré, les messages sur le caractère "authentique et sincère" des avis du site, s’y glissaient toujours quelques contenus douteux.

Inciter à redonner confiance aux avis consommateur

Les méthodes de collectes et de traitement des avis sont en effet très hétérogènes. L’importance des avis en effet est telle qu’ils engendrent un véritable business. Sont concernés, les portails spécialisés (collecte, traitement, et restitution d’avis), les prestataires techniques (notamment les éditeurs de logiciels de filtrage des avis), les instituts de sondage, les agences d’e-réputation, les comparateurs de prix, les commerçants, les sites d’e-Commerce. Dès lors, comment redonner confiance à l’internaute dans la véracité des avis ? Afin de promouvoir des avis fiables pour redonner confiance à l’internaute, de nouvelles méthodes apparaissent sur la toile, avec plus ou moins de succès.

Reconnaître les faux avis avec les "algorithmes contextuels"

Parmi elles, les "algorithmes contextuels". Grâce aux travaux des linguistes sur le mensonge, des chercheurs américains de la Cornell University ont mis en lumière des caractéristiques textuelles propres aux faux avis. A l’aide d’indicateurs comme le style ou le niveau de langage, la longueur du texte ou l’emploi de certains mots, les chercheurs affirment pouvoir distinguer les faux avis des vrais avec 90 % de certitude. Pour en tester l’exactitude, les internautes sont d’ailleurs appelés à poster un avis en anglais dans un champ du site www.reviewskeptic.com. Problème, les agences d’e-réputation spécialisées dans la création de faux avis adaptent leur style de rédaction aux dernières avancées des systèmes de détection. La course entre la recherche et les faussaires rend ainsi le filtre de détection difficile et fragile à tenir sur la durée.

Reconnaitre les faux avis avec une facture de la prestation

Des sites proposent également des avis "garantis". Pour cela, étape importante, les équipes de ces sites demandent la preuve qu’il y a bien eu transaction du consommateur, en réclamant une facture de la prestation évaluée. Par exemple, sur le site de mise en relation truster.fr, l’exactitude des inform ations déposées par les professionnels inscrits est vérifiée avant publication. Sans inscription, pas d’anonymat possible et le client accepte d’entrer dans une vraie démarche. Pour le moment, Truster.fr ne propose de mise en relation qu’en Ile-de-France.

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Bertrand Girin est le Président co-fondateur de Reputation VIP, une entreprise qui permet aux marques et dirigeants de maîtriser leur réputation en ligne et qui a lancé https://forget.me un service en ligne de gestion du droit à l'oubli pour les Européens. Auparavant, Bertrand a géré un fonds Européen de capital-risque de 40MEUR et a travaillé pour le groupe Air Liquide. Il est ingénieur diplômé de l'Ecole Centrale Paris. Il a enseigné l'innovation à l'Executive MBA de l'ESSEC et à l'Ecole Centrale Paris. Il enseigne la gestion de l'e-réputation aux diplômés de l'Ecole des hautes études en sciences de l'information et de la communication.

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