Selon le Commissariat général à la stratégie et à la prospective, les dispositifs de soutien aux énergies renouvelables contribuent à la crise du système électrique européen. L’institution appelle à une évolution « urgente ».
Trop de subventions pour les énergies renouvelables ? À l’heure où le Gouvernement prépare une loi sur la transition énergétique destinée à remplacer partiellement les énergies fossiles, le Commissariat général à la stratégie et à la prospective réclame un réaménagement urgent des dispositifs de soutien.
L’Europe de l’énergie en crise
Le Commissariat général à la stratégie et à la prospective, rattaché au Premier ministre, explique dans un rapport paru fin janvier que « le développement des énergies renouvelables ayant atteint une certaine maturité technologique, devrait reposer uniquement sur les mécanismes du marché » et non pas sur des tarifs d’achat garantis, comme c’est le cas aujourd’hui.
Les tarifs d’achat subventionnés contribuent à la crise du système électrique européen, qui menace « sérieusement » la compétitivité des entreprises, la sécurité d’approvisionnement, le pouvoir d’achat des ménages et la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre.
Dans son enquête, le Commissariat envisage à la place « un système temporaire de rémunération complémentaire, tel qu’un système de primes ».
En outre, le Commissariat rappelle, pour appuyer sa position, que l’Europe de l’énergie est en pleine crise. D’un côté les surcapacités de production des énergies vertes, dues à la baisse de la demande et la montée en puissance des énergies renouvelables ; de l’autre la révolution des gaz de schiste outre-Atlantique, qui ont provoqué l’arrêt de nombreuses centrales à gaz en Europe. « Les dix plus grandes compagnies d’électricité européennes ont annoncé l’arrêt de 38 gigawatts de capacité thermique d’ici 2015. À long terme, environ 40% de la capacité thermique actuelle risque d’être fermée pour des raisons économiques » note le Commissariat. Une alarme pour l’industrie européenne, tant pour les énergéticiens que pour leurs clients.
30 milliards d’euros d’investissements en 2012, 1 000 milliards en 2020
Les dispositifs de soutien aux énergies renouvelables ont coûté 30 milliards d’euros en Europe en 2012. Les dépenses ont « entraîné une augmentation du nombre de personnes en situation de précarité énergétique en Europe. D’autre part, elles ont creusé le fossé de compétitivité entre les industries européennes et leurs concurrents situés dans d’autres pays du monde, particulièrement aux États-Unis » précise le rapport.
« La situation pourrait se détériorer dans le futur », avertit le Commissariat. Les faibles prix de gros découragent les investissements, pourtant « nécessaires pour décarboner le secteur », alors que « le prix de détail va continuer à augmenter ».
Dès lors, le Commissariat a formulé des recommandations pour réaménager le système électrique européen, comme augmenter le nombre des interconnexions électriques entre les pays et étendre les Bourses de l’électricité à davantage de pays, ce qui permettrait «d’optimiser l’adéquation de l’offre à la demande sur une zone géographique plus étendue ».
Dans la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, le rapport préconise également une valeur de la tonne de CO2 fixée entre 40 et 50 euros sur le marché européen du carbone, contre 3 à 5 euros aujourd’hui. La mise en place de prix plancher et plafond donnerait plus de visibilité aux investissements.
Enfin, les douze acteurs majeurs de l’énergie en Europe, le « G12 », réunis à l’initiative du PDG de GDF Suez, Gérard Mestrallet, militent pour un développement plus modéré des énergies renouvelables et s’inquiètent de la chute des prix de gros de l’électricité provoqués par les surcapacités de production actuelles. Une préoccupation accentuée par le fait que ces groupes investissent massivement pour moderniser leurs installations. L’Observatoire des marchés européens de l’énergie avait notamment chiffré à 1 000 milliards d’euros les investissements nécessaires dans les infrastructures électriques et gazières d’ici à 2020.