Bourse : ce qu’il faut savoir avant de rentrer

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Par Christopher Dembik Publié le 20 août 2014 à 3h21

Juste avant la rentrée de septembre, il est temps de faire un bilan des huit premiers mois écoulés sur les marchés financiers et de revenir sur nos prévisions.

L’été ne fut pas si calme que cela sur les marchés boursiers mais ce serait avoir une lecture erronée des dernières semaines que d’affirmer que la tendance de fond dominante depuis le début d’année est définitivement derrière nous. Tant que le S&P 500 maintient le cap au-dessus des 1900 points, on peut être prudemment optimiste pour le deuxième semestre boursier des deux côtés de l’Atlantique.

Nous anticipions une correction de l’ordre de 5% à 10%. Elle est d’environ 8 % pour le CAC 40 par rapport à son point haut annuel. Ce mouvement de baisse généralisée est survenu plus tôt que prévu mais il semblait inévitable car, le marché manquant de catalyseurs, il avait besoin de reprendre son souffle après quasiment six mois de hausse ininterrompue. Peu ou prou le même bilan peut être dressé pour les autres indices européens et pour les indices américains.

Quand les marchés cèdent à la psychose…

Il semble indéniable que le risque géopolitique, comme très souvent en période estivale, a constitué l’excuse idéale pour corriger. Si on effectue un rapide retour en arrière, la situation actuelle en Europe de l’Est n’est guère plus préoccupante du point de vue des places boursières qu’en juin ou en mars derniers. La psychose actuelle à propos des craintes d’invasion de l’Ukraine par la Russie sont largement infondées, ne reflètent pas la realpolitik russe et devraient rapidement s’estomper à la rentrée.

D’ici la fin du mois, on peut anticiper sans trop de risques un maintien des ranges opérationnels depuis août sur les indices européens. Les points bas atteints le 8 août dernier, à savoir les 4100 points pour le CAC 40, les 8900 points pour le DAX 30 et les 387 points pour l’AEX 25, devraient limiter l’amplitude d’un nouveau repli. A la hausse, on prendra en compte les 4260-4300 points pour le CAC 40, les 9400 points pour le DAX 30 et enfin les 410 points pour l’AEX 25.

A l’inverse des indices boursiers, le marché des changes semble comme immunisé par les remous géopolitiques. Le Dollar Index a bien connu un sursaut cet été pour atteindre un plus haut annuel mais, en ce qui concerne les principales paires Forex, les tendances de long terme demeurent. En toile de fond, une volatilité qui est toujours préoccupante et qui risque de s’imposer durablement comme la norme sur le marché, rendant l’intérêt du trading intraday faible.

L’EURUSD suit paisiblement sa pente descendante en direction de notre objectif énoncé au printemps dernier à 1.3225/50. L’AUDUSD, récemment pénalisé par de mauvais chiffres australiens, a encore un potentiel de rebond à court terme mais, à moyen terme, un repli vers les 0.91 reste d’actualité. Enfin, tout porte à croire qu’une sortie du range établi depuis février pour l’USDJPY n’est pas pour demain mais, contrairement au consensus de marché, nous maintenons notre vision baissière à moyen terme vers les 99 puis les 98.


Jackson Hole : Le banquet des banquiers centraux

Cette deuxième partie d’août est habituellement calme, au moins au niveau des grandes annonces. C’est souvent l’occasion pour les investisseurs de revenir sur les bancs de l’université et d’apprendre des banquiers centraux. Ces derniers vont faire leur rentrée à Jackson Hole.

On peut anticiper une piqûre de rappel salutaire à l’intention des opérateurs de marché et des politiques pour rappeler, une énième fois, qu’on attend beaucoup trop de la politique monétaire qui ne peut, en aucune façon, se substituer à la politique budgétaire. Un message qui ferait tout à fait sens en France…

A part cela, rien de nouveau. Vu la psychose actuelle sur les marchés financiers, il y a fort à parier que Mario Draghi et Janet Yellen vont chercher à ne pas faire de vagues. Devant les caméras du monde entier, ils vont sûrement se contenter de se féliciter du travail accompli et ils auront, ensuite, tout loisir de s’inquiéter en coulisse de la nouvelle crise qu’ils alimentent en essayant de sortir de celle de 2007-2008.

Bulles spéculatives : L’éternel retour…

Les risques sur les marchés sont, en effet, élevés. La politique monétaire occidentale de taux d’intérêt très bas a attisé les phénomènes de bulle spéculative qu’il n’est plus question de nier. Les bulles sont présentes sur le marché des obligations d’entreprises à haut rendement aux Etats-Unis, où on a constaté depuis début août d’importants mouvements de sortie de capitaux, sur certaines valeurs internet et des réseaux sociaux, ou encore sur la dette souveraine. Les taux d’emprunt historiquement bas dans la zone euro reflètent, à maints égards, une bulle qui est la conséquence de la politique monétaire de la BCE et de son programme OMT. La déconnection entre la sphère réelle et la sphère financière n’a jamais été aussi patente depuis la bulle internet des années 2000.

Pour autant, les risques à court et moyen terme sont faibles. Souvenons-nous qu’Alan Greenspan mettait en garde en 1996 les investisseurs à propos de l’évolution des indices et qu’il aura fallu quatre ans de plus pour que la bulle éclate. Surtout, soyons optimistes puisque le simple fait de parler depuis le début d’année des risques de bulle montre que les opérateurs sont plus vigilants, peut-être mieux informés si on se raccroche à la théorie des marchés efficients.


Nos deux paris boursiers pour le deuxième semestre 2014

Pas d’éclatement de la bulle pour demain ni de krach obligataire comme en 1994, mais il n’en demeure pas moins qu’au regard du niveau de valorisation des indices majeurs, investir sur le marché boursier américain, voire même sur le marché européen, parait problématique.

Plusieurs outils permettent d’en juger, à l’instar du ratio cours sur bénéfices ajusté cycliquement (ratio CAPE) dont le niveau actuel incite à la prudence. Le potentiel de hausse à moyen terme est assez limité et on ne peut en aucun cas nier un phénomène d’exubérance irrationnel qui fausse les cours. Dans cette perspective, suivre le flot d’investisseurs se plaçant sur le S&P 500 ou le Dow Jones ne semble pas très opportun.

Pour le deuxième semestre, nous privilégions plutôt des marchés exotiques à plus fort potentiel. Nonobstant le risque géopolitique indéniable, nous maintenons notre vision positive pour le MICEX russe et ses principales composantes bancaires et énergétiques qui ont montré leur forte résilience au cours de la première partie de l’année. L’indice principal de la Bourse de Moscou affiche un repli de 6% depuis janvier et certains titres sont même sous-évalués à hauteur de 50%. Tout porte à croire qu’à moyen terme le rebond est assuré. N’oublions pas que le MICEX avait regagné en l’espace d’environ cinq mois tout le terrain perdu suite à l’annexion de la Crimée. On peut anticiper que ce scénario se reproduise dans les prochains mois, une fois la tragédie de la Malaysia Airlines moins présente dans les esprits et la détente entre Moscou et l’Ouest actée.

Notre deuxième pari pour le semestre commencé est le marché boursier israélien qui est intégré depuis 2010 à l’indice MSCI Pays Développés. Le point commun avec le marché boursier russe, c’est bien sûr la présence d’un risque géopolitique. Cependant, là encore, nous considérons que l’impact à moyen terme est minime sur les valorisations. Notre intérêt porte notamment sur le TA-100, qui est plus large que le TA-25 de référence, et comporte de nombreuses entreprises innovantes des secteurs énergétiques et des NTIC susceptibles d’être cotées également au Nasdaq. Notre biais positif s’appuie sur une analyse historique, puisqu’au cours des 25 dernières années, le TA-100 a connu une meilleure performance que le S&P 500, mais également sur des anticipations favorables pour plusieurs titres de la cotation. Il s’agit notamment d’Elbit Systems et de Delek Israel Fuel qui, via Alvner Oil Exploration et Delek Drilling, est engagé dans l’exploitation du champ gazier Leviathan.

Les opportunités d’investissement n’ont jamais été aussi présentes, en dépit du climat d’incertitude économique et financière en Occident. Il suffit simplement d’oser détourner son regard de Paris et de New York.

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Christopher Dembik est économiste chez SaxoBank.