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L'exemple cruel d'Haïti
Nous nous souvenons tous du dramatique tremblement de terre en Haïti le 12 janvier 2010 avec ses 230 000 morts, 300 000 blessés et plus d'un 1,2 million habitants sans abris. Dès les premiers jours, parmi les principales urgences, la question de l'eau potable et de l'assainissement s'est posée avec beaucoup d'acuité, en particulier à Port aux Princes. C'est ainsi qu'il a fallu très vite approvisionner la population malgré l'omniprésence des décombres bloquant les voies d'accès. Par chance, les ONG participant au « cluster wash » des Nations Unies, sous l'égide de l'UNICEF, se sont coordonnées très tôt et en particulier avec l'acteur public haïtien, la DINEPA, qui par chance sortait relativement indemne du cataclysme et qui comprenait une équipe considérée comme motivée et compétente. C'est ainsi, très vite que SOLIDARITES INTERNATIONAL avec le soutien ses partenaires institutionnels et donateurs, a installé à Port aux Princes une vingtaine de points de distribution permanentes d'eau potable avec des réservoirs souples et des rampes de distribution, suivie ensuite de construction de latrines. Avec les Haïtiens, l'ensemble des acteurs humanitaires ont ainsi permis de répondre pour l'essentiel aux besoins immédiats de la population et d'éviter alors les épidémies.
On se souvient aussi de l'épidémie de choléra qui a débuté entre le 14 et le 16 octobre 2010 après que des excrétas de soldats népalais de la force des nations unies (MINUSTA) aient été déversés directement dans le fleuve Artibonite. Soulignons ici que si le Professeur Piarroux de l'Université de la méditerranée avec une équipe du ministère haïtien de la santé, du service de santé des armées françaises a très tôt identifié la source de l'épidémie, il a fallu attendre le mois de mai pour que son pronostic soit confirmé. En aval, des gens sont morts dans la journée, d'autres ont fui. L'épidémie s'est alors propagée. L'action d'urgence s'est à nouveau trouvée mobilisée massivement par la distribution de savon et de comprimés de purification d'eau, la vidange et le nettoyage de puits ainsi que des réservoirs d'eau, la construction de latrines et la collecte des déchets, l'approvisionnement en eau potable, la désinfection des habitations par la pulvérisation de clore. Sans parler de l'action déterminante des ONG médicales et des autres acteurs de santé qui ont alors mis en place un dispositif considérable de traitement des cas de choléra. Deux ans plus tard, le choléra a déjà tué 7000 Haïtiens et en a infecté plus de 500 000 dans un pays ou celui-ci n'existait pas ! La vigilance devra maintenant être permanente face à un choléra qui revient avec la saison des pluies.
Le choléra, un fléau qui progresse dans l'indifférence générale au Tchad, au Nigéria, au Niger, au Cameroun ou en RDC. Plus de 130000 personnes en meurent chaque année et entre 3 millions et 5 millions sont touchées. Pourtant, comme l'écrit Béatrice Gurrey : "Malgré l'aggravation de cette « maladie de pauvres », les budgets de recherche diminuent comme peau de chagrin. Au moins, les morts d'Haïti auront-ils rappelé au monde l'urgence qu'il y a à se pencher sur ce fléau d'un autre âge". Les populations locales sont au cœur de toute solution et l'ampleur et la complexité des réalités nous a aussi interpellés sur nos capacités et compétences en zone urbaine. nous avons beaucoup appris.
Avec l'aimable autorisation de l'auteur. Article initialement publié dans la revue Géoeconomie
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