9 successions sur 10 resteront exonérées de taxes affirme Jérome Cahuzac, le ministre du Budget. Fort bien : cela veut dire que 72 000 des 720 000 successions annuelles seront frappées par l’impôt sur la mort, et 55 000 des 550 000 donations, conséquence de l’alourdissement des droits de succession que l’Assemblée a approuvé et que le Sénat s’apprête à amplifier un peu plus encore.
La présidence de François Hollande se voulait exemplaire, car juste. De prime abord, taxer 1 contribuable sur 10 semble être tout le contraire d’une décision juste, mais ce n’est pas la faute des socialistes. La réforme Sarkozy des droits de succession exonérait 95 % des transmissions, contre « seulement » 90 % avec le projet de loi du nouveau gouvernement.
Pourtant à l’heure où tout le monde doit faire des efforts, le bon sens exigerait au contraire d’imposer toutes les successions, bien entendu progressivement ce qui est déjà le cas, mais dés le début, même symboliquement. Qui s’offusquerait, sincèrement, de voir l’Etat prélever 2 % de 0 à 10 000 euros transmis, 3 % de 10 à 50 000, et par exemple, 5 de 50 000 à 100 000 ? Sachant que les patrimoines transmis à l’occasion d’un décès flirtent avec le seuil des 100 000 euros, en moyenne, la mesure serait non seulement juste puisque l’ensemble des contribuables payerait, même un peu, de droits de succession, mais elle représenterait aussi une recette fiscale non négligeable. Et Juste. A tel point que de plus en plus d’économistes et de fiscalistes considèrent que l’impôt sur le revenu aussi, devrait être payé par tous. Même pour 20 euros par mois, pour ceux dont les revenus sont les plus faibles, quitte à ce qu’ils retrouvent d’ailleurs cette somme dans les prestations sociales dont ils bénéficient forcément.
Au lieu de cela, voici donc que 130 000 transmissions de patrimoine par an vont se voir taxées quand elles étaient exonérés de droits par l’ancien barème, ou bien encore vont être taxées encore plus, avec un effet de seuil non négligeable, puisque la déduction forfaitaire de 159 325 euros passera désormais à 100 000 euros par enfant.
Est-ce juste ? Ma réponse est définitivement, inéluctablement, non.
D’abord, parce que l’on oublie de préciser une chose : dans une large majorité des cas, ce qui est transmis n’est pas liquide, on ne parle pas d’argent, mais d’un bien immobilier. Bien souvent la maison familiale. Acquise par le travail des parents, parfois le travail de toute une vie, justement pour y abriter leurs enfants, et leur transmettre un patrimoine tangible, capable de les mettre à l’abri du premier des besoins : se loger. Or, chose absurde, la maison (l'appartement), dont la fonction première est donc d’abriter une famille, est bien exonérée d’ISF, preuve s’il en est qu’un statut particulier lui est accordé par l’administration fiscale et le législateur. Elle est aussi exonérée de taxes sur la plus value lors d’une vente. Mais en revanche, lors d’une succession, quand bien même le ou les enfants reprendraient la maison familiale pour y élire domicile, ou pire encore, même s’ils y habitent toujours, même si, cynisme suprême, ils sont en bas âge, point de salut ! Le fisc qui rape tout passe, et taxe.
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