Les marchés montent tandis que les signes d'une nouvelle crise du crédit se multiplient. Ce siècle sent le délabrement et l'argent falsifié de la Fed le mine.
Quel horrible siècle ! Le pire que nous ayons jamais connu. Il suffit de regarder les Etats-Unis. Les revenus des ménages baissent. Les chiffres de l’emploi baissent, avec sept millions d’Américains en âge de travailler qui sont au chômage. La croissance de la productivité baisse. La croissance du PIB baisse : elle s’est limitée à 0,5% par habitant l’an dernier. Même l’espérance de vie est en baisse.
Les overdoses sont en hausse. De même que les suicides. Un enfant sur huit vit dans une famille qui perçoit une aide alimentaire. Un adulte sur huit prend des psychotropes. La moitié de l’ensemble des familles perçoit de l’argent de l’Etat. La moitié dispose de moins de 500 $ en cas d’urgence. Les deux tiers n’économisent pas pour leur retraite. Plus de la moitié ne peuvent se payer leur propre maison. 49 millions d’Américains vivent dans la pauvreté.
A quoi devons-nous ce siècle si nul ?
En plus de la dégradation de la santé et des modes de vie – et des valeurs –, l’art, la musique et l’architectures sont également pitoyables… et nous déplorons des guerres perdues d’avance contre la pauvreté, la drogue et le terrorisme… 20 000 Mds$ de dette publique… ainsi que des actifs surévalués qui ne laissent rien de bien intéressant aux investisseurs raisonnables ou aux retraités désespérés.
Ne nous embarquez pas sur le thème de l’Etat ! En attendant, les signes d’une nouvelle crise de la dette progressent, telle une flash-mob lors d’un rassemblement politique. Le marché actions grimpe depuis trop longtemps sans subir de correction. L’économie devrait déjà être en récession. Les impayés enregistrés par la Federal Housing Administration [NDR : administration fédérale du logement] sont en augmentation. Les défauts de paiement enregistrés sur les prêts étudiants sont en augmentation. Les remboursements des prêts automobiles dérapent.
Comment nous sommes-nous mis dans cette situation lamentable ? Selon Alan « Bulles » Greenspan, désormais à nouveau adepte d’une monnaie adossée à quelque chose de tangible : « Nous n’aurions jamais atteint ce niveau d’endettement extrême si nous avions un étalon-or, car l’étalon-or est un moyen permettant de garantir que la politique budgétaire ne sorte pas du rang ». Il a raison. Lorsque l’argent sort du rang, tout le reste suit. Pour autant que nous le sachions, le Dow est en route vers les 30 000 points. Mais ce sera sans nous. Nous ne pouvons supporter autant d’émotion.
Par ailleurs, nous subodorons toujours que le postulat à l’origine de ce grand rally est faux. Il part du principe que les actions étaient correctement évaluées le 8 novembre 2016, et qu’à présent M. Trump va pouvoir faire passer des allègements fiscaux majeurs, payés par une augmentation des impôts. Et il part du principe que, d’une façon ou d’une autre, cela entraînera une expansion qui doublera les taux de croissance du PIB. « Steven Mnuchin, Secrétaire au Trésor, estime qu’un remaniement des impôts pourrait intervenir d’ici le mois d’août », clame un gros titre du Wall Street Journal.
Crise du crédit : Des tortues imaginaires pour soutenir un édifice imaginaire
Au XIXème siècle, alors que les merveilles de la science et de l’ingénierie étaient encore plus époustouflantes qu’aujourd’hui, Thomas Henry Huxley (le grand-père de l’auteur du Meilleur des Mondes, Aldous Huxley, et de Julian Huxley, biologiste et théoricien de l’eugénisme) parcourut le Royaume-Uni pour parler de l’agnosticisme. La force de l’avenir, disait-il, c’était la science, et non le mysticisme ou la superstition. De plus, il informait les péquenauds souvent ignares que la Terre était ronde et qu’elle tournait autour du soleil.
« Pas si vite », M. Huxley, le défia un jour une vieille femme. « La Terre est plate ».
Le scientifique, ayant repéré une proie facile, lui posa la question suivante : « alors, Madame, sur quoi repose-t-elle, cette Terre plate ? »
« Ben, sur une tortue, bien sûr ».
« Et sur quoi repose cette tortue ? »
« Sur une autre tortue ».
« Eh bien, cette tortue repose sûrement sur quelque chose. Alors sur quoi ? »
« Oh, M. Huxley, vous ne comprenez pas. Il y a des tortues jusqu’en bas ».
Au sein de l’économie actuelle, nous voyons également des tortues imaginaires jusqu’en bas.
La pêche miraculeuse des compères lobbyistes
Le marché actions, par exemple, était largement surévalué en novembre 2016 et, actuellement, il repose sur l’illusion d’un futur allègement fiscal (financé par une augmentation des impôts) et d’un surcroît de dépenses publiques (financées par davantage de dette). Premièrement, ce plan ne passera pas au Congrès : pas sans de nombreuses exclusions, bidouillages et collusions permettant de le transformer en nouvelle pêche miraculeuse pour les compères lobbyistes.
Deuxièmement, si une réelle réduction des impôts ne s’accompagne pas d’une réduction des dépenses, alors son financement basculera vers une source moins évidente. La « réforme » fourre-tout que cela entrainera ne réduira pas les accords gagnant-perdant qui dévastent l’économie. Elle ne boostera pas non plus les résultats des entreprises en leur permettant de conclure davantage d’accords gagnant-gagnant avec leurs fournisseurs et les consommateurs, et d’apprendre plus rapidement.
Au contraire, la seule chose qu’elles apprendront, ce sera comment s’adapter à ce nouveau système fiscal. En attendant, l’explication justifiant le cours actuel des actions se trouve sur le dos d’une autre tortue imaginaire : les rachats d’actions. En 2016, par exemple, les sociétés du S&P 500 ont davantage dépensé pour racheter leurs propres actions (puis les annuler) qu’elles ne l’ont fait pour régler des dividendes et financer la recherche et le développement. D’où sortent-elles cet argent ? Elles l’empruntent. L’argent prêté aux grandes entreprises est si bon marché qu’une fois corrigé de l’inflation, il est pratiquement gratuit.
L’imposture de la Fed qui soutient les marchés
Au-dessous de cette tortue s’en trouve une autre, qui s’en prend aux investisseurs. Il s’agit de l’imposture selon laquelle tous les investisseurs peuvent investir comme les initiés de Wall Street… en suivant simplement le marché… et en réalisant des gains lorsque les actions prennent de la valeur. C’est peut-être même vrai… Au cours de ces six dernières années, les résultats des entreprises cotées sur les marchés actions ont stagné, en gros. Alors il devrait en être de même pour le cours des actions. Après tout, les entreprises sous-jacentes ne valent que ce qu’elles peuvent gagner, non ?
Mais au contraire, le cours des actions a augmenté de 80%. Allez comprendre. Au-dessous de cette carapace se trouve la célèbre option put, initiée par Alan Greenspan alors qu’il était encore dans sa phase « Alan des Bulles », à la tête de la Fed, et qu’il a léguée à son successeur. A présent, les investisseurs pensent qu’ils ne peuvent pas perdre car si un nouveau sell-off majeur se produisait, la Fed s’empresserait de voler au secours des marchés avec une nouvelle option put, en abaissant encore les taux et en fournissant d’autres QE… voire en intervenant directement et en achetant des actions afin de faire remonter les cours pour déclencher un « effet de richesse ».
Et à un niveau encore inférieur, se trouve l’argent falsifié de l’Etat… qui porte sur son dos tout ce dispositif infernal. Voilà la véritable cause du mal personnifiant le XXIème siècle. Il génère des taux d’intérêts falsifiés… des performances boursières bidon… la mondialisation… la financiarisation… de la témérité budgétaire… une montagne de dettes s’élevant à 20 000 Mds$… et les nombreuses autres folies et illusions qui ont rendu ce siècle honteusement nul. Des tortues… jusqu’en bas !
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