Les entreprises commerciales tenant leur comptabilité d’après leurs créances acquises et leurs dettes certaines – et non d’après leurs recettes encaissées et leurs dépenses payées -, elles sont autorisées à comptabiliser des provisions. Il s’agit de sommes déduites de leur résultat en prévision d’une perte ou d’une charge qui n’est pas encore effective à la clôture de l’exercice, mais que des évènements en cours rendent probable.
Pour être admises en déduction du résultat fiscal d’un exercice, les provisions doivent répondre à quatre conditions de fond : la provision doit être destinée à faire face à une perte ou à une charge déductible de l’assiette de l’impôt ; la perte ou la charge doit être nettement précisée ; la perte ou la charge doit être probable ; la probabilité de la perte ou de la charge doit résulter d’événements survenus pendant l’exercice et en cours à sa clôture.
La perte, la dépréciation ou la charge en vue de laquelle une provision est constituée, doit être probable et pas simplement éventuelle. A ce titre, la probabilité est distinguée de la simple éventualité en ce sens qu’elle est établie par des circonstances précises particulières, alors que l’éventualité résulte d’un simple risque d’ordre général.
Le Conseil d’Etat a eu à connaître des faits suivants. Une société, exerçant une activité de crédit à la consommation, a fait l’objet d’une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2009 et 2010. A l’issue des opérations de contrôle, l’administration fiscale a remis en cause la déductibilité de provisions pour dépréciation de créances détenues sur la clientèle et constituées au titre de ces exercices.
Cette réintégration s’est traduite par un rehaussement en base de 28.024.168 euros au titre de l’exercice 2009 et une réduction de 6.786.727 euros au titre de l’exercice 2010 en raison de la correction symétrique de la reprise sur cet exercice de la provision comptabilisée au cours de l’exercice précédent.
La société a contesté ce redressement devant le Tribunal administratif de Montreuil qui lui a accordé, dans un jugement du 11 mai 2017, la décharge des suppléments d’impôt en litige au titre de l’exercice clos en 2009 et rehaussé, par voie de conséquence, le résultat de l’exercice clos en 2010 du fait de la correction symétrique.
L’administration fiscale ayant fait appel de ce jugement, la Cour administrative de Versailles, dans un arrêt du 29 mai 2019, a annulé le jugement du tribunal administratif de Montreuil. Pour la Cour, le non-paiement des créances à leur échéance, l’échec des campagnes d’appel, l’impossibilité de compenser cet impayé par un prélèvement sur les comptes bancaires de ses clients n’établissent pas que les créances en litige présentaient, à la clôture des exercices en litige, un risque probable de non recouvrement.
Le Conseil d’Etat, dans un arrêt 433028 du 22 avril 2021, a annulé l’arrêt de la Cour administrative de Versailles : « En statuant ainsi, alors que s’agissant d’une société exerçant une activité de distribution de crédit à la consommation, le constat de retards de paiement des créances, nonobstant les diligences entreprises par l’établissement en vue de leur recouvrement, caractérisent le caractère probable du non recouvrement de ces créances à la clôture de l’exercice, la cour a commis une erreur de droit. »
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