Tout à un prix, l’important est de trouver le bon

Photo Jean Baptiste Giraud
Par Jean-Baptiste Giraud Modifié le 18 juillet 2012 à 6h37

L’un des sports préférés des vacanciers depuis quelques années n’est pas, contrairement aux idées reçues, le farniente, mais de comparer. Réflexe acquis depuis le début de la crise mais aussi voici maintenant dix ans, avec l’arrivée de l’euro, dont certains avaient largement abusé.

Le café à 1 franc 50 n’est-il pas passé à 1 euro 50, quand ce n’est pas à 3, 4, voire 6 euros, au seul prétexte que la table est installée en terrasse dans un beau quartier ou sur une plage ou une place réputée ? Tout cela n’a évidemment plus aucun sens, et l’on atteint le comble du ridicule lorsque un club sandwich, qui contient bien plus de « valeur travail » et de matière première qu’un simple café, coûte 2 euros de plus que les 5 cl d’eau noire parfumée. A 6 euros le café, j’ai l’impression d’avaler des pièces de monnaie et le sirote le plus longtemps possible.

Pourtant à Lisbonne, ou le même euro à cours, le café en terrasse se trouve à 80 centimes, en plein centre. Mieux encore : le trajet en taxi, avec les même grosses Mercedes ou plus rarement Citroën ou Peugeot diesel, dans un pays ou l’essence coûte le même prix qu’en France, revient à … 6 euros pour relier le centre ville à l’aéroport. Je veux bien admettre que l’aéroport de Portela est plus proche de Lisbonne que Orly ne l’est de Paris, mais la « même course », Orly jusqu’à mon domicile relativement proche, m’a été comptée 60 euros, certes, en tarif de nuit.

Mangeons un peu ? En Crête, sur le port de Sitia, j’ai encore en travers de la gorge un déjeuner on ne peut plus banal pour 7 personnes dont 5 enfants, dont le taulier prétendait que leurs menus seraient offerts, à plus de 150 euros. Les mêmes euros que chez nous. On paye et on jure de ne plus se laisser re-piéger. Pendant ce temps, sur le bassin d’Arcachon, des restaurants tout ce qu’il y a de plus accueillants, aux menus classiques mais efficaces, s’affrontent autour du seuil stratégique des 15 euros, plus souvent en dessous qu’au dessus.

Dans tout cela, point de travailleurs asiatiques exploités sous-payés sans protection sociale pour expliquer la différence de prix, même si certaines arrières-cuisine peuvent réserver des surprises, en France comme ailleurs. Mais une chose est sûre : alors que les vrais temps difficiles sont devant nous, ne survivront que ceux capables de justifier réellement leurs prix, par la qualité de leur produit ou de leur service (au sens large), et non parce qu’ils auront simplement suivi la tendance, fait comme les autres.

D’autres biens ou services ne sont plus à leur prix depuis bien longtemps : Prenez par exemple le téléphone mobile. Voici encore 24 heures, je payais 60 euros hors taxes pour un forfait 2 heures, avec 1000 SMS inclus, 2 Go de data et... la télévision en illimité. La belle affaire. Chez le même opérateur, j'ai pu migrer vers une offre "grand public" pour... 24,90 euros. Résultat ? Appels illimités 24h/24, SMS et MMS illimités, 2 Go de data avec le mode modem (partage de connexion) inclus. Ne me manque que la télé. La belle affaire ! Pourquoi diable devais je payer 60 euros hors taxes jusqu'ici pour un service infiniment moins bon ? Je me le demande encore. J'entends que les opérateurs "historiques" doivent faire des investissements, et ont besoin de cash pour les financer. Mais n'ont ils pas affiché des santés insolentes ces dix dernières années, largement bénéficiaires, tous les ans ? Il y avait certainement trop de gras sur le prix des forfaits mobiles, et l'arrivée de Free a remis un peu de saine concurrence dans ce secteur.

Autre exemple : le logement, largement sous évalué dans l’indice des prix à la consommation de l’Insee : il ne pèse que 13 %, quand pour certains Français le logement dépasse 40 % de leur budget mensuel. Mais dans ce cas, seule une politique volontariste de libération du marché de la construction pourra inverser la tendance, en assouplissant les règles d’urbanisme.

Il est plus que temps : le bâtiment commence à terriblement souffrir, et pourrait détruire 15 000 emplois cette année, mais surtout 30 ou 40 000 l’an prochain, quand les promoteurs n’auront plus de programme à se mettre sous la pelleteuse. Sans action immédiate en faveur du bâtiment (qui selon le dicton, « quand le bâtiment va, tout va », est un moteur de l’activité en France), le prix à payer pour avoir manqué de courage politique sera vraiment très cher, trop cher pour les Français et notre économie.

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Jean-Baptiste Giraud est le fondateur et directeur de la rédaction d'Economie Matin.  Jean-Baptiste Giraud a commencé sa carrière comme journaliste reporter à Radio France, puis a passé neuf ans à BFM comme reporter, matinalier, chroniqueur et intervieweur. En parallèle, il était également journaliste pour TF1, où il réalisait des reportages et des programmes courts diffusés en prime-time.  En 2004, il fonde Economie Matin, qui devient le premier hebdomadaire économique français. Celui-ci atteint une diffusion de 600.000 exemplaires (OJD) en juin 2006. Un fonds economique espagnol prendra le contrôle de l'hebdomadaire en 2007. Après avoir créé dans la foulée plusieurs entreprises (Versailles Events, Versailles+, Les Editions Digitales), Jean-Baptiste Giraud a participé en 2010/2011 au lancement du pure player Atlantico, dont il est resté rédacteur en chef pendant un an. En 2012, soliicité par un investisseur pour créer un pure-player économique,  il décide de relancer EconomieMatin sur Internet  avec les investisseurs historiques du premier tour de Economie Matin, version papier.  Éditorialiste économique sur Sud Radio de 2016 à 2018, Il a également présenté le « Mag de l’Eco » sur RTL de 2016 à 2019, et « Questions au saut du lit » toujours sur RTL, jusqu’en septembre 2021.  Jean-Baptiste Giraud est également l'auteur de nombreux ouvrages, dont « Dernière crise avant l’Apocalypse », paru chez Ring en 2021, mais aussi de "Combien ça coute, combien ça rapporte" (Eyrolles), "Les grands esprits ont toujours tort", "Pourquoi les rayures ont-elles des zèbres", "Pourquoi les bois ont-ils des cerfs", "Histoires bêtes" (Editions du Moment) ou encore du " Guide des bécébranchés" (L'Archipel).