Le développement relativement récent dans le monde du travail des « réunions-discussions » et plus généralement du travail de groupe n'a pas gommé l'entretien de face-à-face qui reste fréquent, utile, très souvent indispensable. La rencontre de deux personnes consiste alors en un échange d'informations verbales et non-verbales plus ou moins équilibré, qui gagne à être régulé. Cette recherche de régulation de l'entretien en guide la préparation comme la conduite.
... L’objectif de l’entretien à mener était évident : sélectionner la personne la mieux à même de s’intégrer dans l’Organisation, non seulement pour ses compétences mais aussi parce qu’elle s’y sentira bien et donnera alors le meilleur d’elle-même. Mais, à bien y réfléchir, fallait-il plutôt « laisser parler », « informer », « s’informer » … ? Et quelle attitude adopter ? Et quelles conditions matérielles prévoir ?…
L'objectif d'un entretien de face-à-face, tout comme celui d'une négociation, d'une réunion ou encore d'une prise de parole, guide, justifie et sous-tend l'ensemble de la démarche. Clair dans la pensée de celui qui conduira l'échange, cet objectif l'aidera à préparer, puis mettre en œuvre lors du déroulement, une stratégie qui sera par exemple : « Ne pas être directif, laisser parler en se contentant, si nécessaire, de relancer afin de recueillir un maximum de données » ou « Communiquer avec clarté et précision des consignes, des informations, une orientation politique » ou encore « S'informer sur un point particulier, recueillir un avis ciblé, une opinion ». Ce même objectif clairement annoncé aidera, nous le verrons plus loin, à la motivation de celui qui doit suivre l'entretien.
L'attitude. D'après Porter (voir lexique) six attitudes sont envisageables et chez chacun de nous, l'une de ces six attitudes prédomine plus ou moins.
– Attitude de jugement : on porte un jugement par rapport à un modèle moral ou une évaluation selon des normes communes et logiques. Ce qui induit chez l'interlocuteur : blocage, infériorisation, montée de l'agressivité. En cas d'accord, recherche du maintien de cet accord. Eventuellement, perte de confiance.
– Attitude d'interprétation : on tente d'expliquer à autrui le sens de ses pensées ou de son action pour l'aider à y voir plus clair. Ce qui induit chez l'interlocuteur : un risque de refus et de déclenchement de l'hostilité, des tentatives de dissimulation des problèmes, une perte de confiance.
– Attitude de soutien : on rassure, on minimise la situation, on masque une part du problème, on console. Ce qui induit chez l'interlocuteur : un sentiment de dépendance et de « prise en pitié », un risque de rejet. L'interlocuteur momentanément renforcé risque par la suite de ressentir davantage le poids de ses difficultés.
– Attitude d'enquête : on recherche des informations complémentaires pour éclairer plus particulièrement un point de la conversation. On pose des questions, on interroge. Ce qui induit chez l'interlocuteur : une réaction de gêne, de refus, éventuellement d'hostilité si l'attitude d'enquête est perçue comme de l'indiscrétion, voire de l'inquisition.
– Attitude de décision : on indique à l'autre ce que l'on ferait à sa place, on le conseille, on décide de l'action à entreprendre. Ce qui induit chez l'interlocuteur : un sentiment de dépendance qui peut rendre résigné et passif, le soulagement de ne pas avoir à prendre soi-même de décision, une action vite engagée et la fin rapide du dialogue.
– Attitude de compréhension : on ré-exprime en le reformulant ce qu'autrui vient de dire en respectant au mieux sa façon de « sentir » (effet miroir). Ce qui induit chez l'interlocuteur : confiance, sécurisation favorable à la poursuite du dialogue, responsabilisation. Cette dernière attitude est la plus démocratique, elle participe à la motivation, respecte l'autre, l'incite à se prendre en charge.
Fort de cet enseignement, celui qui conduira l'échange et qui se sait plus ou moins « conditionné » par sa tendance dominante à « juger », « interpréter », « soutenir », « enquêter », « décider » ou « comprendre » aura à clarifier l'objectif de la rencontre et mettre en œuvre la stratégie la plus efficace du point de vue de cet objectif. Cette adaptation peut le conduire à une attitude en partie « affectée ». Il aura alors à « violer » sa tendance dominante, par exemple, moins de « décision » pour plus de « soutien » ou encore moins « d'enquête » pour plus de « compréhension ». Si ce choix de tendance est à faire lors de la préparation de l'entretien, il est à appliquer lors du déroulement. Ceci dans l'optique où, des six attitudes envisageables, celle de compréhension, comme nous venons de le voir, s'avère la plus favorable à l'instauration d'un dialogue aussi complet que possible. En effet, à l'instar de la reformulation, étudiée précédemment, l'attitude de compréhension a pour vertu de mettre en confiance : l’interlocuteur se sentant compris respecté et reconnu participe plus complètement. Cette attitude n'est cependant pas universelle et ne convient pas à tous les types d'entretiens ni à tous les moments d'un même entretien. Par ailleurs ...
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… Autre contrainte, et pas la moindre : la situation d’entretien de face-à-face est par définition inégale. Les entretiens, quelle que soit la structure dans laquelle ils se déroulent, sont plus ou moins entachés par une relation hiérarchique dans laquelle « x » et « y » ne sont pas égaux.
Ceci est un extrait du livre « Le management durable : Du concret pour réussir ensemble » écrit par Alain Astouric paru chez Éditions Chronique Sociale (ISBN-10 : 285008543X, ISBN-13 : 978-2850085437). Prix : 14,50 euros.
Reproduit ici grâce à l'aimable autorisation de l'auteur et des Éditions Chronique Sociale.